Chronique n° 012 – Un thermomètre sous la dune

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Le microclimat arcachonnais constitue un des éléments qui explique beaucoup du développement de la ville. Mais il ne faudrait pas croire qu’il en fut toujours ainsi dans cette très, très, longue maturation d’Arcachon. Pour s’en convaincre, on dispose d’un étonnant témoignage qui, sur près de 8000 ans d’histoire, prouve qu’en matière de climat, rien n’est jamais vraiment stable.  Ce témoignage, on le trouve dans ces lignes noires qui strient horizontalement la Grande dune du Pilat. On les appelle  des paléosols. Le premier, presqu’au ras de la plage, indique qu’une forêt se trouvait là, voici huit millénaires. Dans cette forêt marécageuse poussaient des pins mais aussi des noisetiers, des bouleaux et des saules. Toutes plantes qui prouvent alors l’existence d’un climat froid de type continental, genre celui du fin fond des plaines de la Prusse actuelle.

Deux mètres au-dessus et deux mille ans plus tard, voici le deuxième paléosol. Le climat est devenu plus sec  et les vents soufflent plus fort qu’avant. Il en reste un sol gris-beige. Et même, à l’est, un étang. Continuons de gravir la Grande dune. Encore une vingtaine de mètres pour parvenir  là où l’on peut grattouiller le paléosol numéro 3,  un sol âgé de  trois mille ans.  On y trouve des traces de pins et de noisetiers et surtout, surtout, des preuves évidentes de la présence de l’homme. D’abord, des entassements de coquillages notamment d’huîtres plates. Ce qui veut dire que nos ancêtres affamés en mangeaient beaucoup et que, comme nos ostréiculteurs aujourd’hui  renforcent les chemins défoncés des ports, nos lointains ancêtres utilisaient ces coquilles d’huîtres pour remblayer leur pas de porte. Extraordinaire raccourci que cette pérennité des mêmes gestes humains, à 3 000 ans de distance.

Dans cette même forêt, on trouve des silex taillés, des assiettes du moyen âge, de la menue monnaie égarée depuis le 16è siècle et d’étonnants fours à goudron pour distiller le bois résineux et même du matériel permettant la production de sel, à partir du sable, selon une technique mise au point voici près de 2 500 ans. De 1500 à 1650, tout cela va disparaître sous une nouvelle dune, formant le quatrième paléosol. N’empêche : cela prouve bien que la vallée de l’Eyre n’a pas été le seul lieu d’installation lointaine  des hommes sur nos rivages.

D’ailleurs, à l’emplacement même de l’Arcachon actuel, n’a-t-on pas  découvert des haches polies et des grattoirs ? Vous le voyez bien que l’histoire d’Arcachon ne remonte pas à l’apparition de la station balnéaire et que ces hommes du lointain passé ont contribué à bâtir ce que nous vivons  aujourd’hui. Bien d’autres leur succéderont, mais c’est une autre histoire.

À suivre …

Jean Dubroca

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Aimé

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