Société viticole

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1873 – Gironde vinicole, Coutant

Carte routière et vinicole du département de la Gironde, E. Coutant (18..-18..?). Éditeur : E. Feret (Bordeaux)

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53230724z.r=vinicole%20Gironde?rk=107296;4

1877 Carte vintage France vinicole

Tour des vins en France : Retrouvez les crus de chaque région sur cette réédition d’une carte vinicole et hydrographique

https://www.bazeek.fr/cartes-thematiques/170-carte-vintage-france-vinicole-1877.html

 

1880 – Gironde vinicole, Valteau

Carte générale de la Gironde vinicole agricole, routière, hydrographique, topographique et statistique, dressée par A. Valteau, Publié par H. Duthu,…

https://1886.u-bordeaux-montaigne.fr/files/original/01acaa063db6a3a5b1373c4b0015164cc0adb0c0.jpg

 

1886 – Gironde vinicole, Lapierre

Carte routière et vinicole de la Gironde, Alfred Lapierre, (18..-19..?). Dessinateur

Éditeur : Féret et fils (Bordeaux)

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8439404q

1930 – Gironde vinicole, Féret

Carte vinicole du Département de la Gironde publiée par Féret & fils ; gravé et imprimé à l’Institut cartographique de Paris…

 

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b532307044.r=vinicole%20Gironde?rk=128756;0

1879 – Société viticole de Gujan

En 2014, « Arcachon Guide » fait la promotion de Vanessa Alonso, danseuse, professeur et chorégraphe au parcours hors du commun ; elle vous propose au Chai du Vin, 345 route des Grands Lacs à Gujan, ses cours de Flamenco, de Danse Orientale, de Danse Bollywood, tirés des chorégraphies des films cultes du cinéma indien, et de Danse Indienne Traditionnelle (Maha-Ratri, Kathak) tout au long de l’année.

La Troupe vous propose également ses spectacles : passion du Flamenco, sensualité de l’Orient, ou bien féerie indienne.

C’est à vous de choisir la destination magique de votre voyage…

Depuis 1846, époque à laquelle la Compagnie agricole et industrielle d’Arcachon déclarée en faillite, abandonne l’exploitation de Gujan, après y avoir fait un remarquable travail de canalisation destiné à l’assainissement, à l’irrigation et à la création de chutes d’eau industriellement utilisables, la bruyère et les ajoncs s’emparent des terrains abandonnés par la culture, les canaux et rigoles s’envasent, les nombreuses constructions élevées sur divers points, abandonnées, sont détruites successivement par les habitants de la Lande…

La nature des sables de la plaine de Cazaux, véritable terre de bruyère, est à peu près uniforme ; elle se compose de 94% de silice, 5% d’argile et 1% d’humus. Au-dessous, à une profondeur variant entre 0m 70 et 1m 30, s’étend une couche plus ou moins épaisse d’alios.

Alors qu’en décembre 1847, 6 600 hectares de la société originelle sont dispersés en 119 lots à la criée du Tribunal de Première Instance de la Seine, en 1872, une décision judiciaire ordonne une deuxième série de ventes pour mener à terme la liquidation.

Les terrains résiduels de la Compagnie sont successivement mis à l’encan et adjugés à vil prix : c’est dans ce cadre, qu’en 1877, trois cents hectares d’un seul tenant, situés entre les canaux n° 2 et 4 et traversés par ce qui n’est encore que le chemin de grande communication de la Hume à Sanguinet, deviennent par « subrogation  » la propriété d’Ernest Feray.

Ernest Feray, ce personnage hors du commun, est donc la pierre angulaire de cette affaire. Petit-fils de Christophe Oberkampf qui sous l’ancien régime a accumulé une fortune considérable dans la fabrication de la célèbre toile de Jouy, « Avant tout Feray est l’héritier d’Oberkampf, peut-être par certains traits de caractère : rigueur et autorité, franchise et vivacité, des manières simples avec le goût de la persuasion. Mais pour cet industriel, le fait d’être « le petit-fils d’Oberkampf » est une gloire et un capital qu’il a cultivés avec soin sa vie durant. Cette donnée-clef de sa biographie a une dimension économique, intellectuelle et morale. Elle fonde une partie de son comportement. »

En juin 1879, Ernest Feray vient sur ses terres gujanaises envahies par la bruyère et les ajoncs. Il est accompagné de son ami Paul Decauville (on lui doit le système Decauville ou « chemin de fer portatif »). Ernest a soixante quinze ans et ses affaires parisiennes, au contraire de celle de son ami, sont engagées depuis longtemps dans un irrépressible déclin.

Après avoir parcouru la propriété, les deux hommes tombent en arrêt à une centaine de mètres de là devant la vigne d’un paysan local. Les pieds sont âgés de plus de vingt ans et promettent une récolte abondante.

Le même jour, Ernest et Paul forment une association pour défricher à la vapeur ces landes, que le premier apporte à une Société Civile Feray-Decauville, en vue de créer un vaste vignoble dans la grande plaine de landes de Cazaux, communes de Gujan et de la Teste ; ces deux opérations sont compatibles avec les servitudes issues du droit d’usage concédé par le Captal Frédéric de Foix de Candale dans la baillette de 1550 : pour atténuer le caractère perpétuel de son engagement, le Captal s’est réservé, comme cela existe dans toutes les baillettes, la faculté de bailler ces landes à des tiers qui accepteraient de les défricher et de les labourer « pour faire bled » ou qui voudraient y bâtir des moulins à vent. Lors de la transaction de 1746 confirmant la baillette de 1550, ces obligations sont allégées autorisant le Captal à « donner à fief nouveau lesdits lieux, soit pour convertir en labourage, bâtir moulins et autres œuvres de cette nature. »

Vingt ans plus tard, quand la majorité de la plaine de Cazaux est concédée à Daniel Nézer, cette concession autorise le nouveau propriétaire à défricher ses landes pour les convertir en « terres labourables, vignes prairies, bâtiments, parcs et autres objets de cette nature  » tout en lui interdisant formellement d’y « ensemencer aucune espèce de bois. »

La rédaction de ces servitudes est reprise dans les actes de propriété d’Ernest Feray.

Le vin des Landes est très apprécié, parfois préféré aux meilleurs Bordeaux. Et ce, malgré la remarque de Jean-Florimond Boudon de Saint-Amans dans son Voyage agricole, botanique et pittoresque dans une partie des Landes (1818) qui n’hésite pas à attribuer la médiocrité du peu de vin produit à Gujan par le fait qu’il est produit par les femmes, les hommes étant tous occupés à la pêche ou à la navigation.

En 1833, lors de leur voyage de reconnaissance préparatoire à la création de la « Compagnie d’exploitation et de colonisation des Landes de Bordeaux », ses initiateurs, Jean-François-Bernard Boyer-Fonfrède et Jules Mareschal font remarquer que « les vins récoltés sur les territoires de Gujan et de la Teste sont bons, corsés, et d’une saveur agréable. Ils auraient même de la qualité si, par suite du peu de soins et de recherche des Landais, dans tout ce qu’ils font, on n’avait, généralement, la fâcheuse habitude de mettre toujours ces vins dans les mêmes barriques, ce qui, en raison de l’épaisse couche de tartre qui se forme, à la longue, au dedans de ces vieux fûts, donne au liquide un goût d’aigre qu’il ne perd que bien difficilement. »

En 1859, Jean Lacou fait remarquer dans Les heures d’un prisonnier, que « les vins de sables sont consistants et agréables à boire, comme ceux de Cap Breton, du Vieux Boucau et de Mestras-Gujan. »

Jules Chambrelent a écrit : « Depuis les désastres du phylloxera et dans la pensée que le terrain sablonneux des Landes mettrait les vignes plantées à l’abri de l’insecte, quelques propriétaires ont tenté la plantation des vignes dans les sables des Landes.

Ils espéraient aussi que le mal produit en France par le phylloxera ferait assez augmenter le prix des vins pour qu’ils puissent trouver un produit rémunérateur dans la culture vinicole, malgré les sacrifices qu’elle devait exiger. »

M. Pierre Decauville aborde l’entreprise de la création du grand vignoble de Gujan, en commençant, exactement le 10 novembre 1879, le défrichement de ces landes au moyen d’une puissante charrue à vapeur au moyen de deux locomobiles de 14 chevaux chacune, construites par la maison Fowler, de Leeds, dont Paul Decauville est le représentant pour la France.

« La distance d’un kilomètre qui sépare les grands canaux était éminemment favorable au labourage à vapeur. À égale distance entre les canaux, on a fait une route avec une rigole latérale : une locomotive circulait sur cette route, prenant son eau dans la rigole, pendant que l’autre locomotive circulait sur le chemin de service du canal. Les câbles auxquels était attachée la charrue ayant un peu plus de 500 mètres de longueur, la charrue traçait un sillon de 500 mètres, puis basculait et avançait d’environ 1m50 ; dans ce mouvement le soc qui travaillait montait en l’air, le soc qui était en l’air entrait en terre, et la charrue, retournant sur ses pas, traçait un sillon parallèle au précédent. Seulement, ce n’était pas un sillon que la charrue traçait à chaque évolution, c’était trois sillons, parce qu’on se servait de la charrue dite charrue Cubaine, qui est armée à chaque extrémité de trois socs. Les sillons avaient de 27 à 28 centimètres de profondeur.

Après la charrue, les locomotives, toujours par le moyen des câbles, coupaient les mottes au moyen du disker, instrument composé de disques d’acier tournant tous sur un axe fixe en acier.

Après le disker venait la herse, qui retirait du sol les racines de bruyères et d’ajoncs ; on en faisait des tas à la main, qu’on enlevait au moyen de petits wagons circulant sur un chemin de fer Decauville. Ces racines mêlées au bois de pins, formaient le combustible des locomotives. Après cela, on faisait avec la charrue Cubaine un second labour pénétrant cette fois de 55 à 60 centimètres de profondeur ; on employait de nouveau le disker, puis la herse, et en dernier lieu le rouleau uni qui égalisait le sol, le plombait, de manière qu’on traçait facilement au cordeau les lignes pour la plantation. »

De plus, une maison roulante loge les mécaniciens et les chauffeurs.

Plus tard, en 1881, on change de système et on opère le défoncement au moyen d’une charrue à socs superposés, mettant au fond de la raie, à 0m 55 la partie supérieure du sol. Après cette opération, un hersage et un roulage suffisent.

On l’a remplacée en 1882 par une grande charrue à un seul soc, avec laquelle on obtient d’un coup la profondeur voulue. Six personnes – deux chauffeurs, deux hommes montés sur la charrue, un aide pour chaque machine pour les approvisionner en bois, changer de place le tuyau d’alimentation en eau et remplacer les chauffeurs pendant les repas – parviennent de cette façon à préparer environ un hectare et quart par jour.

Avant d’entreprendre ce travail, Ernest Feray envoie un échantillon du sol de la plaine de Cazaux au directeur de l’École d’agriculture de Montpellier, Camille Saint-Pierre, avec lequel il est lié. Celui-ci confirme qu’il se prête parfaitement à la culture de la vigne. Il recommande toutefois de planter chaque pied à la bêche dans un trou carré, de recourber chaque bouture par le bas, de la recouvrir de 200 grammes de phosphate de chaux et de remettre la terre par-dessus. Ce que l’on fait scrupuleusement avec des plants provenant pour l’essentiel du Médoc complétés par d’autres issus de Chalosse et même de Gujan supportés par un système de tuteurs en châtaignier reliés par du fil de fer.

Compliqué et archaïque direz-vous, pourtant c’est à la pointe de la technique de l’époque et d’une certaine efficacité puisqu’en juin 1880, 80 hectares sont déjà plantés à une distance de 3 m, entre les rangs et de 1m 50 dans le rang ce qui en fait 2 222 à l’hectare.

En 1882, on se décide à rapprocher les distances à 1m 60 dans tous les sens ; puis, en 1883, 1m 50 seulement. On replante un rang de vignes entre ceux qui ont été plantés en 1880 et 1881. Dans le fond de chaque trou destiné à la plantation des boutures, on dépose les 200 grammes de phosphate de chaux préconisés.

En 1880, la société Feray-Decauville devient la société E. Feray, Paul Decauville & Georges Schlumberger par l’arrivée de Georges Schlumberger qui apporte 200 000 francs, comme Ernest Feray qui fait de même, Paul Decauville se contentant de verser 60 000 francs.

Rappelons-nous du mariage des deux frères Mallet avec les deux filles de Christophe Oberkampf. La plus âgée de ces deux sœurs avait eu une fille, Lucie, qui avait épousé un fils, Charles ; la plus jeune dans un mariage doublement consanguin qui donne, entre autres, Nathalie Mallet. Et celle-ci épouse à son tour ce Georges Schlumberger, dont le grand-père, Nicolas Schlumberger, avait crée au début du XIXe siècle une importante filature à Guebwiller. Mais Georges sera mort (le 16 avril 1904) quand les enfants de son cousin germain, Paul Schlumberger, donneront à cette famille sa pleine mesure : Conrad dans la recherche pétrolière, Maurice dans la banque et Jean dans la littérature.

Dans un premier temps, l’arrivée de Georges Schlumberger permet d’acquérir d’autres terrains, puisque la société va bientôt être propriétaire de 708 hectares, et un quart des droits d’eau qui, de la « Compagnie Agricole et Industrielle d’Arcachon » en passant par la « Société Ouvrière de Colonisation des Landes de Gascogne », finissent par échoir en 1873 à Narcisse Desforges et Claude Dumay, dont Ernest Feray sera subrogataire.

Ces droits dits « concession d’eau » sont forts compliqués et entraînent de nombreuses difficultés pour être mis en œuvre. Les juristes d’aujourd’hui diraient que tant les servitudes passives dont souffre la Société que les servitudes actives dont elle profite sont de véritables « nids à contentieux ».

En 1837, la « Société agricole et industrielle d’Arcachon » avait obtenu du gouvernement la concession de tout le volume d’eau sortant de l’étang de Cazau et qui n’était pas nécessaire au canal des Landes, et ce canal ayant cessé de fonctionner en 1842, la Société agricole d’Arcachon a joui, tant qu’elle a existé, de la totalité volume d’eau qui dépasse 4 m3 par seconde en hiver, et ne descend pas en été au-dessous de 2 m3.

La Société agricole d’Arcachon avait confié l’exécution de ses travaux d’irrigation à MM. Delisle et Cazeaux, ingénieurs de l’État, qui se sont acquittés de la mission avec la plus grande habileté. Ils ont fait une dérivation du grand canal, au-dessus de la première écluse du canal des Landes, et creusé le canal dit des Usines, parallèle au canal des Landes et distant de ce dernier d’environ 300 mètres. Le canal des Usines va du midi au nord. Profitant de la configuration de la plaine de Cazau, qui est de niveau de l’ouest à l’est et qui a une pente régulière de 2m 50 par kilomètre, du midi au nord, les ingénieurs ont piqué sur le canal des Usines quatre canaux allant de l’ouest à l’est et distants l’un de l’autre d’environ 1 kilomètre ; le dispositif est complété au nord par un cinquième canal, plus ancien, dit craste de Baneyre.

Ces quatre canaux ont 4 mètres de large et environ 10 km de longueur. Il y a entre chaque canal une différence de niveau de 2m 50 et chaque canal peut se vider, à la hauteur d’eau souhaitée en fonction des saisons, au moyen de rigoles dans le canal au-dessous de lui.

Les liquidateurs de la Société agricole d’Arcachon ont vendu cette concession d’eau à MM. Dumay et Desforges. MM. Feray, Decauville et Schlumberger ont acheté à MM. Dumay et Desforges le quart du volume d’eau et l’ont transmis à la Société viticole.

En même temps que se fait si rapidement cet immense travail de défrichement et de plantation, la Société viticole de Gujan fait curer les canaux et les rigoles qui sont complètement envasés et construit un grand nombre de nouvelles rigoles, de manière que ces canaux, qui vont de l’ouest à l’est, et ces rigoles, dirigées du midi au nord, présentent un développement total de 73 kilomètres qui, dans la saison humide, procure aux vignes un complet assainissement. Tout est, en outre, disposé pour pouvoir élever le plan d’eau, s’il en est besoin, dans les temps de sécheresse et s’il reste bien encore à creuser 18 kilomètres de ces rigoles, l’apparition intempestive du phylloxéra peut être efficacement combattue en inondant le terrain.

L’eau provenant de l’étang de Cazau et des pluies, divisée par les rigoles, coule entre la terre végétale et l’alios, et la nature spongieuse de celui-ci, à la faveur de la capillarité des sables, maintient dans le sol une humidité favorable à la végétation.

Voyant une belle végétation générale, la Société n’hésite pas à se lancer dans les constructions. Outre les réédifications de celles qui n’ont plus que les murailles, on édifie un immense chai, admirablement conçu dans tous ses détails, meuble les instruments de vinification et du matériel les plus complets et les plus supérieurs. Le bâtiment du cuvier est disposé pour recevoir 4 000 hectolitres en une seule cuvée.

Malheureusement il n’est encore entré que des quantités bien insuffisantes de raisin dans ces magnifiques vendangeuses.

Certes, s’il ne s’agissait que de la végétation, on aurait bien lieu d’être satisfait de l’entreprise. Elle est, en effet, sur beaucoup de points, remarquable, ailleurs au moins satisfaisante et les parties médiocres sont peu importantes.

Mais on a le grand tort de prétendre faire des vins délicats et pour cela on adopte le système de culture du Médoc et les cépages qui font sa gloire, la composition du sol ne donnant pas de craintes pour le phylloxera qu’on pourrait d’ailleurs combattre par l’immersion ; la vigne est cultivée en cordons avec des carassons, du fil de fer, suivant l’usage du Médoc. Au début, on y a bien joint le Gujan et la Chalosse, en certaines proportions, mais depuis que M. Blanchard, vigneron médocain laborieux et expérimenté, a pris la direction viticole, c’est-à-dire en 1882, on ne plante plus que les Carbenets sauvignons et francs, le Verdot, le Malbec. Or, on sait à quel point ces derniers surtout, craignent la coulure.

Dans cette immense plaine froide, toute en longueur du nord au sud, entre d’interminables bords de pins, la coulure est plus à craindre que partout ailleurs et vient ajouter ses dangers à ceux des gelées toujours à redouter dans ce milieu où l’eau abonde. Les vents balayent dans toute sa longueur cette plaine, où le premier soin de planter des rideaux de bois et de multiplier les brise-vents. Le Malbec est tellement sujet à la coulure, surtout depuis quelques années, que les viticulteurs girondins n’en plantent plus et que certains d’entre eux sont arrivés à greffer d’autres variétés sur leurs souches.

Pierre Decauville qui devait à l’origine ne rester que six semaines sur place, devient le gérant local de l’affaire. Il se sédentarise en achetant 32 hectares jouxtant ceux de la Société et sur lesquels, au lieu dit « Terre Neuve », il se fait bâtir un chalet.

Pour faire face à ses besoins, la Société Feray, Decauville et Schlumberger ne peut compter que sur elle-même. Elle emprunte 210 000 francs  au Crédit Foncier. Le fait que le beau-père de Georges Schlumberger ait été administrateur de cette prestigieuse institution a dû grandement faciliter la transaction !

En 1883, le chef de culture Blanchard choisit les plants les meilleurs du Médoc et préconise de les planter à 1m 60 les uns des autres mais de limiter l’écart des rangs à cette même distance d’1m 60, soit 3 907 pieds à l’hectare au lieu de 2 222 précédemment.

Pendant l’hiver, les premières pièces plantées sont fumées en partie avec le fumier provenant des attelages en location, en partie avec du « coup » ou « cop » cette boue que les gens du pays ramassent à marée basse sur les bords du Bassin couverts d’herbes marines et en partie avec les bruyères arrachées enfouies dans le sol. Pour le reste de la propriété, la Société projète d’utiliser à l’avenir non seulement le fumier des boues de Bordeaux qui voyageraient pas le chemin de fer jusqu’à la gare de La Hume, mais aussi du sang de bœuf desséché délayé avec des tourteaux de colza et d’arachides, et, si cela ne suffit pas, tout engrais chimique que l’expérience lui indiquerait comme les meilleurs.

Tant et si bien qu’au début de l’année 1883, la Société possède 285 hectares plantés de vignes représentant 855 690 pieds, 120 hectares de terre de labour, 275 hectares de landes, canaux, francs bords, chemins, et 18 hectares de bois situé à « Terre Neuve » où a été construit un logement pour le chef de culture et pour un garde, une maison contenant 48 lits d’ouvriers sise à Vaucluse, un logement pour le chef terrassier et six hommes construite à Bergantade et enfin, à la Madeleine, un logement pour le chef mécanicien et quatre hommes, un magasin, une remise pour les locomotives et une écurie.

Témoin d’une aventure industrio-agricole particulièrement originale, la remise pour les locomotives de la Madeleine existe toujours et mériterait d’être préservée sinon classée…

Cette même année 1883 va permettre d’engranger les premiers fruits de tous ces investissements avec la vendange des 80 premiers hectares plantés. Aussi, nos trois associés décident-ils de donner une nouvelle dimension à leur affaire. Enfin, c’est comme cela qu’ils présentent une opération plus certainement destinée à satisfaire un perpétuel besoin en nouveaux capitaux : le 25 février 1883, ils créent une société anonyme au capital d’un million deux cent cinquante mille francs divisé en 250 actions de 5 000 francs chacune, sur lesquelles 80 sont des actions de fondateurs qui ne prendraient part aux dividendes qu’après que les autres actions auraient touché 5% d’intérêt annuel. Cette nouvelle société, à laquelle la Société Feray, Decauville et Schlumberger cède tout son actif, essentiellement composé de la propriété du terrain et du matériel y afférent, prend la dénomination sociale de « Société Viticole de Gujan ». Son siège social est situé à Paris au 74, rue de Turbigo dans les bureaux de MM. Feray & Cie. Elle est administrée par un Conseil composé de sept membres : Ernest Feray, Président, Jules Marcuard, secrétaire, Charles-Frédéric Dietz-Monin, Paul Decauville, Georges Schlumberger, Abel Couvreux et Belmontet.

Pierre Decauville garde le titre de gérant local et les administrateurs n’ont droit à aucun prélèvement sur les bénéfices. Ils doivent se contenter des jetons de présence auxquels ils acceptent même de renoncer tant que les actionnaires ne toucheront pas leurs 5%.

Jules Marcuard 1838-1909, protestant, de la banque suisse Marcuard-Kraus & Cie, a épousé une cousine germaine, née Madeleine “Hélène” Élise Hartmann 1852-1933, de Georges Schlumberger.

Le père de Charles-Frédéric Dietz-Monnin a été maire de Barr où il exploite une importante filature.

Abel Couvreux 1852-1922, de son côté, est le beau-frère de Paul et de Pierre Decauville pour être mariée avec leur sœur Marie Eugénie.

Il n’y a plus qu’à attendre la vendange qui ne va pas manquer de se transformer en juteux dividendes !

En attendant, on continue à planter, cette fois des cabernets, francs, malbecs, sauvignons et verdots mais maintenant les pieds ne sont plus espacés que de 1m 50 et les rangs de la même distance, ce qui fait 4 444 pieds à l’hectare, sur 245 hectares. Pour faire bonne mesure, un nouveau rang est intercalé entre ceux des 135 hectares à 2 222 pieds pour leur donner le même nombre de pieds à l’hectare.

La plantation se fait à la bêche, en recourbant la bouture et mettant sur la partie recourbée 200 grammes de phosphate de chaux, suivant les prescriptions de M. Saint-Pierre, directeur de l’École d’agriculture Montpellier ; on n’a pas eu 2% de manque.

On commence, cette même année, à fumer les pièces de vignes arrivées à leur quatrième feuille avec des fumiers provenant des attelages en location et avec les boues de ville d’Arcachon et des bruyères.

Au mois de mars, le professeur Saint-André de l’École Nationale d’Agriculture de Montpellier, auquel on doit déjà des recherches sur les causes de la résistance des vignes au phylloxera dans les sols sableux, publie dans le Journal d’Agriculture pratique un article pour dire l’avenir radieux qu’il prévoit à la viticulture dans les landes de Gascogne. Cette publication a le don d’agacer le Marquis de Dampierre, président de la Société des Agriculteurs, qui s’inscrit en faux dès le 1er avril, dans le bulletin de cette Société contre cette affirmation.

Le sol étant presque entièrement siliceux, il est probable que le phylloxéra ne pourra pas plus s’y propager que dans les sables d’Aigues-Mortes. D’ailleurs, la Société, qui est propriétaire d’une partie de l’eau sortant de l’étang Cazau et se rendant à la baie d’Arcachon, a le moyen de mettre sous l’eau toutes ses vignes, ce qui est un remède infaillible contre le phylloxéra. La Société, confiante dans ce préservatif, ne plante aucun plant américain, tous ses plants proviennent des meilleures espèces du Médoc dont le Cabernet sauvignon qui y entre pour moitié.

Nous ne pouvons entrer aujourd’hui dans beaucoup de détails au sujet des différents modes de défense appliqués contre le phylloxéra. Mais nous pensons, comme M. Gaston Bazille, le président de la Société agricole de l’Hérault, que pour les vignes qui ne sont pas d’un grand rendement, il faut ne pas trop faire d’expériences et ne point s’attarder à des traitements qui coûtent cher et sauvent bien rarement les vignes trop profondément atteintes. L’honorable sénateur, dont les plantations américaines ont parfaitement réussi dans l’Hérault, cite à l’appui de son opinion cette histoire si piquante du paysan qui offense son seigneur qui le condamne à payer cent écus, en réparation de l’offense. Le pauvre diable proteste, gémit, dit qu’il n’a pas d’argent, et le maître, dans un moment de bonne humeur, lui laisse le choix : payer, manger douze gousses d’ail sans boire, ou recevoir trente coups de bâton. L’ail n’est pas fait pour effrayer notre campagnard, il en a si souvent mangé, qu’il n’est pas à une gousse près. Il avale, tant bien que mal, les deux ou trois premières gousses ; à la quatrième, la bouche en feu, hors de lui, il demande instamment à boire et se soumet à la bastonnade. Un estafier s’approche et lui assène rudement, sur les épaules, de vigoureux coups de bâton ; après quelques instants, le patient crie, se démène, il n’en peut plus, il va mourir ! Il se décide à dénouer les cordons de sa bourse et le seigneur, goguenardant, empoche les cent écus. Notre paysan aurait mieux fait, à coup sûr, de commencer par la fin.

C’est pour épargner à la grande majorité de nos vignerons les gousses d’ail et les coups de bâton, que M. Gaston Bazille leur conseille aussi de commencer par la fin, c’est-à-dire de recourir de suite et d’emblée aux cépages américains, à la submersion ou aux plantations dans le sable.

Les 80 hectares qui ont pris, en 1883, leur quatrième feuille, promettent une récolte assez satisfaisante.

Le mois suivant commence la construction d’un important bâtiment à vocation de chai et de cuvier, en bordure de ce qui n’est toujours que le chemin de grande communication de la Hume à Sanguinet.

Cette construction aurait pu être confiée à quelque architecte qui en aurait fait son affaire, mais ce n’est pas tout à fait comme cela que les choses se passent. Les dispositions de ce bâtiment sont longuement étudiées par Ernest Feray, Pierre Decauville et Blanchard, « auxquels Ernest Minvielle, architecte bien connu de Bordeaux, apporte le concours d’une expérience consommée, jointe à une rare intelligence et à une patience qui se prête d’une manière infatigable aux idées de ses collaborateurs. » On devine que les choses n’ont pas dû être simples, et l’argent de nos entrepreneurs a souvent permis à l’homme de l’art de surmonter de légitimes susceptibilités mises à rude épreuve.

Ernest Feray et ses associés veulent un chai tel qu’on n’en a jamais vu et tel que l’on n’est pas prêt d’en voir un pareil.

La construction du bâtiment est terminée en septembre. Il a un aspect, disons, assez ferroviaire. Rien d’étonnant à cela puisque l’un de ses concepteurs est spécialisé en chemin de fer, serait-ce à voie étroite. On dirait une gare où le côté passager et le côté marchandise encadrent l’inévitable marquise. L’endroit s’y prête pour être enclavé dans un nœud ferroviaire formé au nord par la ligne de chemin de fer de Bordeaux à Arcachon, à l’est par la ligne de la Compagnie du Midi reliant Bayonne, et à l’ouest par le petit chemin de fer de La Teste à Cazaux.

Ce chai est équipé d’une machine à vapeur qui dessert en force motrice tous les appareils qu’il abrite. La transmission fort compliquée de cette force motrice ainsi que l’installation des différents appareils est confiées à l’ingénieur Gourgues de la maison Feray & Cie. Celui-ci préside la mise en marche qui s’effectue avec le plus grand succès dans la deuxième semaine d’octobre.

L’organisation des différentes opérations habituellement menées dans un cuvier au moment des vendanges est particulièrement sophistiquée : « Le raisin est apporté de la vigne dans des récipients garnis de toile à voile, et vidé dans une plate-forme carrée munie de rebords de 25 centimètres. Au moyen d’une pelle creuse, un ouvrier met le raisin sur un tamis à déraper. Deux hommes font le dérapage à la main (ce travail sera fait en 1884 par une machine). Le raisin et le jus tombent sur la plate-forme ; de temps en temps on fait incliner celle-ci, qui peut basculer sur un axe horizontal. Le raisin et le jus tombent dans une goulotte qui traverse le mur du bâtiment et se rendent dans un auget placé au-dessous du sol dans l’intérieur.

En dehors du bâtiment du cuvier une locomobile, au moyen d’une courroie, transmet le mouvement à un arbre de couche principal fixé au moyen de chaises le long du mur du bâtiment à l’intérieur. Cet arbre principal, au moyen de poulies et courroies, transmet le mouvement à une chaîne à godets verticale qui va depuis le bas jusqu’en haut du bâtiment, alimentant une vis sans fin, horizontale.

Une chaîne verticale garnie de godets en fonte monte jusqu’au haut du bâtiment du cuvier ; elle est animée d’une vitesse d’à peu près 50 centimètres par seconde. Les godets qui puisent en bas dans l’auget et se vident en haut sur un couloir incliné, montent un peu plus d’un hectolitre à la minute. Le jus et les raisins tombent par un plan incliné sur une vis sans fin en tôle étamée tournant dans une boîte en bois garnie de même métal et concentrique à la vis. La vis va d’un bout à l’autre du bâtiment ; elle est 1m 60 plus haut que le dessus des cuves. La boîte est percée de trappes à fermeture, au-dessus de chaque cuve ; quand on veut faire aller la vendange dans la cuve n° 1, on ouvre la trappe n° 1, et, par un couloir accroché sous la boite, la vendange tombe dans cette cuve jusqu’à ce qu’elle soit pleine. Cela fait, on ferme la trappe n° 1, on transporte le couloir sous la trappe n° 2, on ouvre cette trappe et on remplit la cuve n° 2, et ainsi de suite.

Un seul homme suffit pour cette manœuvre.

On ferme les cuves, et on les plâtre.

Au bout de six, sept, huit jours, quand la fermentation est terminée, on tire le vin par un robinet placé à la partie inférieure de la cuve, on place la barrique au-dessous et on l’emplit.

Quand il n’y a plus de vin, le marc occupe tout le fond de la cuve, on ouvre une porte qui est au bas de la cuve, et on retire, au moyen d’un ringard, comme on défourne un four à chaux, le marc qui tombe dans un petit wagon, lequel le transporte aux pressoirs à marc – à claire voie – qu’on emplit et vide alternativement.

Les pressoirs faits par la maison Samain, de Blois, sont mus mécaniquement.

Une courroie fait descendre le plateau et donne en quelques minutes une pression de 100 000 kilogrammes. Une autre courroie le fait remonter par un mouvement beaucoup plus rapide. On ouvre la cage, on retire le marc et on recommence.

Le vin de marc tombe dans un récipient ; il est aspiré par une pompe rotative qui le porte au moyen de tuyaux dans une cuve placée dans un des chais.

Dans le Médoc, les pressoirs à marc sont en général placés au premier, notamment dans le bel établissement de M. Roy, à Château d’Issan, il faut remonter le marc au premier étage à bras d’homme, avec des seaux, et le pressoir est aussi manœuvré à bras d’homme. La pression obtenue est beaucoup moins forte.

Dans notre appareil, le vin de marc tombe dans un bassin. Une pompe rotative, mue par la locomobile, l’aspire et le refoule dans le bâtiment des chais qui est adjacent à celui du cuvier.

Nos appareils prennent en tout une force de 5 à 6 chevaux. Ils offrent une économie de main-d’œuvre considérable sur tous les procédés de vinification en usage jusqu’à présent dans le Médoc.

Nous pensons qu’ils seront adoptés par les viticulteurs ayant au moins 80 hectares, et quant à notre plantation de vignes, si nous réussissons comme nous l’espérons, nous aurons montré qu’on peut transformer en vignes des milliers d’hectares de landes aujourd’hui improductifs.

Le bâtiment du cuvier est fait pour contenir 8 cuves de 300 hectolitres chacune, soit 2 400 hectolitres, et dans les angles, quatre cuves de 400 hectolitres chacune, soit 1 600 hectolitres. Ensemble 4 000 hectolitres.

On espère que dans trois ou quatre ans cette production sera plus que doublée, de sorte que si on vendange en deux fois, le cuvier suffira pour une production de 8 à 10 000 hectolitres. »

Mais il y a loin de la coupe aux lèvres et parfois de la vigne au cuvier.

Surtout qu’il se met à pleuvoir au moment de la floraison. Au printemps 1883, cela dure plusieurs semaines  et entraine une importante coulure.

Le 11 juillet, un violent orage de grêlons détruit le peu de raisins que la coulure a épargné. La compagnie d’assurance contre la grêle, « La Confiance »,  remboursera 2 700 francs, déduction faite des frais de vendanges.

Il y a cependant assez de raisin pour faire l’essai de nouveaux procédés de vinification qui réussissent parfaitement ; le vin a 8 degrés en sortant de la cuve, une belle couleur et un goût agréable.

Dans une autre plaine de même aspect, mais de bien moins grande étendue (ce que je considère comme une condition favorable), située non loin de là, mais sur la rive gauche de la Teste, plusieurs propriétaires se sont également mis, depuis trois ans, à planter de la vigne sur défrichements de landes et de bois.

Mieux arrosés, spécialement M. Plos  de Gaumard, profitant des leçons données par le vignoble de Gujan et surtout des excellents enseignements puisés dans celui de Solférino, …, ils n’ont donné qu’une très petite place aux cépages fins et adopté le Madiran, le Petit-Bouschet, la Folle Blanche, l’Aramon, la Négrette de Castres etc. Aussi, bien qu’ils soient loin d’avoir mis tous les atouts dans leur jeu, puisqu’ils n’ont pas débuté par un chaulage énergique et qu’ils n’aient pas encore donné d’engrais au sol, les résultats paraissent devoir être tout autres qu’à Gujan. C’est ainsi que, malgré les rudes gelées d’avril, bon nombre de pieds d’Aramon, de Négrette, de petit Bouchet, qui ne sont qu’à leur troisième feuille, portent déjà plusieurs raisins.

La vendange 1883 n’est pas faite pour arranger la situation financière de la société. Au mois de décembre suivant, l’assemblée générale décide une augmentation de capital de 250 000 francs par l’émission de 50 nouvelles actions. Pour encourager les souscripteurs éventuels à surmonter leur réticence, le Président se fend alors d’une notice explicative intitulée : « Notice sur la Société Viticole de Gujan ». Facile à  lire, intéressante, documentée, elle est rédigée par un entrepreneur qui conserve tout son enthousiasme malgré ses quatre-vingts ans. Il donne à la fois l’impression de croire à son projet et envie d’y souscrire. Même si l’avis inséré en dernier page laisse craindre un renoncement à tout nouveau développement de la surface du vignoble : « La Société Viticole de Gujan, ayant terminé ses défrichements et labours, désire vendre ses appareils de labourage à vapeur, consistant en deux locomotives de 14 chevaux chacune, avec foyer pour brûler à volonté bois ou charbon, un certain nombre de charrues, herses, rouleaux, etc.

Ce matériel très complet, construit en 1879 par MM. Fowler, de Leeds, sur le système le plus perfectionné, a toujours été entretenu en excellent état. »

À l’abri du phylloxera, la vigne de Gujan ne craint donc plus que les gelées printanières. Mais un employé des Postes et Télégraphes à Mont-de-Marsan, l’inspecteur Lestelle, qui doit s’ennuyer dans son travail, invente un appareil de lutte contre contre ces gelées, que la « Société Viticole de Gujan », toujours à la pointe du progrès mécanique, ne peut pas dédaigner.

Voici en quoi consiste le système de production automatique de nuages artificiels pour la protection des vignes présenté au concours régional agricole de Foix par son inventeur : Un thermomètre est employé comme moyen automatique d’allumage et d’avertissement par l’application de l’électricité. Cet appareil, placé dans l’intérieur de la vigne à protéger, est l’organe régulateur ; l’électricité l’organe électro-moteur et la fonction de ces deux organes est de produire des nuages de fumée en allumant différentes matières combustibles et résineuses sous l’influence d’un appareil d’induction en rapport avec ce thermomètre qui se distingue du modèle à mercure ordinaire par l’adjonction de deux communications en fil de platine aboutissant à deux bornes d’attache en cuivre où viennent se relier les fils de communication avec l’appareil électro-automatique. Le contact qui se produit au thermomètre par suite de l’abaissement de température provoque l’allumage instantané des divers foyers disposés à cet effet pour produire des nuages de fumée et arrêter l’effet du rayonnement nocturne. Le mode d’installation est des plus simples : un fil de cuivre est tendu sur le terrain à protéger et divisé en autant de sections qu’il y a de foyers à allumer. Des amorces de tension sont disposées sur le parcours de ce fil. L’espacement des foyers, à raison de sept par hectare, et de 40 mètres en tous sens. Le prix de revient, comprenant l’achat des appareils, fils, poteaux, etc., est de 50 francs par hectare, une fois payés. Comme il arrive souvent que la gelée se produit sans qu’on s’en aperçoive assez à temps pour disposer les moyens préventifs, tous ceux qui ont des bourgeons de vigne et des fleurs d’arbre à sauver d’un désastre ne seront pas gens à reculer devant un petit sacrifice d’argent pour faire des nuages artificiels.

Ernest Feray n’a pas beaucoup de mal à persuader son ami Jules Méline, depuis un an Ministre de l’Agriculture, de venir assister à Gujan, le 4 janvier 1884, à l’expérimentation in situ de ce système.

Jules Méline, ministre de l’agriculture, part le vendredi 11 janvier 1884 de Bordeaux, gare Saint-Jean, par un train spécial, à huit heures du matin ; sont avec lui, MM. Saisset-Schneider, préfet de la Gironde, Tisserand, directeur de l’agriculture, Chambrelent, inspecteur de l’agriculture, Cazauvielh et Léon, députés de la Gironde, Léon Lesca, conseiller général, de Mouy, secrétaire général de la préfecture, Méran, maire d’Arcachon, Couenon, inspecteur viticole, et plusieurs autres personnes. Le train s’arrête à neuf heures un quart à la gare de Gujan, dont la population fait au ministre une brillante réception. La gare et ses alentours sont ornés de drapeaux et de branches d’arbres verts. M. Laroque, maire de Gujan, à la tête de son conseil municipal, reçoit le ministre à la gare et le remercie en excellents termes de vouloir bien honorer de sa visite le vignoble de la société viticole de Gujan, qui sera pour le pays une source de prospérité. M. Laroque n’oublie pas le nom de M. Feray, sénateur, qui, le premier, a eu l’idée de convertir en vignes des centaines d’hectares qui, il y a peu d’années, étaient sans valeur. Les visiteurs se mettent ensuite en marche pour le vignoble. Ils sont conduits par quatre voitures ; le ministre a dans la sienne le préfet de la Gironde, M. Tisserand et M. Pierre Decauville, gérant de la Société viticole. Les voitures, arrivées à la Hume, quittent la route de Bordeaux et prennent l’excellent chemin de grande communication de la Hume à Sanguinet. À quatre kilomètres de la Hume, les visiteurs arrivent sur les terres de la Société viticole et peuvent se faire une idée de l’étendue du vignoble qui est de deux kilomètres de large sur plus de trois kilomètres de long et qui est tenu comme les plus belles vignes du Médoc. Un kilomètre plus loin, les visiteurs descendent de voiture pour voir le cuvier et les chais. Le ministre est frappé des appareils aussi simples qu’ingénieux que la Société viticole a montés pour la vinification et le pressage des marcs. Le ministre et les personnages qui l’accompagnent acceptent le déjeuner offert par Pierre Decauville dans son chalet, situé à l’extrémité du vignoble. Après le déjeuner, où le ministre a bu à la santé de son ami M. Feray, les visiteurs assistent à une expérience d’un préservatif contre la gelée imaginé par un sous-inspecteur des télégraphes à Mont-de-Marsan.

On a élevé plusieurs tas de branches résineuses et on y met le feu au moyen d’une tige platine faisant partie d’un thermomètre à minima et arrêtée à 2° au-dessous de zéro (on a produit ce froid artificiellement) et le mercure, mis en contact avec le platine produit le courant électrique qui, par son étincelle au bout des fils conducteurs, enflamme les tas de branches résineuses et produit les nuages dont l’effet est de garantir la vigne contre les gelées printanières. Le mérite de l’invention est que l’appareil opère au moment voulu et sans avoir besoin d’aucune surveillance. L’expérience faite devant M. Méline réussit parfaitement et il adresse ses compliments à l’inventeur. Les moments du ministre sont comptés. Il faut partir pour la Teste. M. Pierre Decauville reconduit le ministre jusqu’à cette ville et, en le quittant, reçoit pour lui et pour la Société viticole les félicitations du ministre et des personnes qui l’accompagnent.

Cette démonstration a les honneurs du Journal des Débats : « Inutile de décrire ici le système lui-même dont j’ai rendu compte déjà et sur lequel, après moi, la Société d’Agriculture de la Gironde s’est exprimée favorablement. Constatons seulement qu’en cette occurrence encore, à Gujan-Mestras comme à Bordeaux, M. Lestelle a démontré l’excellence de son invention. M. le Ministre l’a vivement félicité. L’allumeur automatique fera donc son chemin pour le plus grand bien de la viticulture. »

Il fait tellement de chemin que l’on n’en entend plus jamais parler !

On ne sait rien de la production des années qui suivent, dont l’interruption rapide laisse deviner qu’elle est loin d’être brillante.

Frédéric Vassillière, incrimine les insuffisances du drainage en citant « la grande entreprise Ferré et Decauville, où rien n’a été négligé, sauf l’approfondissement des fossés d’assainissement. »

La « Société anonyme viticole de Gujan », ayant son siège à Paris, rue de Turbigo,74, est dissoute à compter du 25 avril 1887, date de l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires ; les membres du conseil d’administration, savoir M. Ernest Peray, sénateur ; M. Paul Decauville ; M. Georges Schlumberger ; M. Alfred Belnioniet ; M. Abel Couvreux fils ; M. Eugène Lebon ; M. Joseph Hinstin, sont nommés liquidateurs.

Un extrait certifié conforme du procès-verbal de cette assemblée générale est déposé au rang des minutes de Me Ragot, notaire à Paris, soussigné, suivant acte dressé par lui le 29 avril 1887.

Mais que diable sont venus faire ces deux brillants industriels, Ernest Feray et Paul Decauville, dans cette galère viticole ?

Il est étonnant que ces deux hommes intelligents, brillants même et très expérimentés aient eu la prétention de réussir là où tant d’autres avant eux ont pitoyablement échoué. Il est peu probable qu’ils aient agi par forfanterie tant cela ne leur ressemble pas. L’hypothèse la plus plausible est un excès de confiance dans les possibilités d’une mécanisation dont on ne connait pas bien encore les limites. La visite de cette plaine de Cazaux totalement plane et au sol particulièrement meuble leur a fait croire qu’elle se prêterait parfaitement aux pratiques avant-gardistes dont ils sont spécialistes. Considèrent-ils leur savoir-faire comme capable d’y faire des miracles !

Peut-être aussi que Pierre Decauville n’est pas l’homme de la situation.

 « Le fils d’un grand industriel, Pierre Decauville, dont je fus l’ami, nous dit Frédéric Vassillière, vint s’installer à Villemarie. Sa famille voulant l’éloigner de Paris, dont il goûtait trop avidement les plaisirs coûteux, l’avait incité à planter des vignes à la place des genêts, des bruyères, et des daphnés sauvages que les gens du pays, sans doute à cause de leur parfum suave, appellent des lilas suisses : pourquoi pas landais ?

Pierre Decauville cumulait ses fonctions de vigneron avec celles de master de l’équipage de chasse à courre d’Arcachon. On le voyait plus souvent au Grand-Hôtel de cette ville que dans le pavillon de la route de Sanguinet qu’on appelle encore chalet Decauville, où il recevait ses amis et surtout ses jolie amies  de Paris, avec un luxe dont ses invités garderont longtemps le souvenir.

Il construisit des chais immenses, que vous voyez encore sur la route de Sanguinet et qui ont été transformés en vacherie. J’ai assisté à l’inauguration de la cuve, au fond de laquelle était servi un succulent déjeuner. On nous offrit des vins tellement exquis que certains convives eurent quelques difficultés à remonter le joli escalier de fer qui nous avait permis de descendre dans cette salle à manger vinicole. Inutile de vous dire que les vins que nous dégustâmes ne venaient pas de la lande de Villemarie, aussi réfractaire à la production du vin qu’à celle du riz.

Cette coûteuse expérience ne découragea pas Pierre Decauville, qui me confiait, quand j’allais le voir à Paris, qu’il n’avait qu’une idée : revenir à Villemarie. La dernière fois que je le rencontrai, il s’occupait de mettre sur pied une affaire de plantation de topinambours, à la place des vignes, se promettant de transformer en huilerie les chais devenus vacherie. » 

Et quelle qualité de vin Ernest Feray et Paul Decauville comptaient-ils produire dans les sables de Gujan ?

Le Baron Mortemart de Boisse avait précisé en son temps au sujet des projets viticoles de la « Compagnie Agricole et Industrielle d’Arcachon » : « Beaucoup de personnes, dans le département de la Gironde, disent qu’on doit uniquement viser soit la quantité, soit à la qualité, rarement aux deux à la fois ; cependant, dans le département des Landes, à Capbreton, petit village situé sur le bord de la mer, à trois lieues de Bayonne, on obtient, sur le revers des dunes, dans les sables purs apportés par la mer, du vin de bonne qualité, quoique la vigne fournisse en même temps avec abondance.

Ceux des terrains des landes qui ont pour base un sable fin analogue à celui des dunes donneront-ils un vin semblable au vin de Capbreton et aussi abondant, c’est ce que l’expérience seule démontrera. »

Et à l’évidence l’expérience ne s’est montrée guère concluante.

Qu’en est-il du vin de la « Société Viticole de Gujan » ? Du côte de Gujan ou côte de Leyre, il est difficile de lui donner un nom puisque n’ayant pas été produit pendant assez longtemps pour faire l’objet d’une appellation d’origine contrôlée, aucune trace dans les guides œnologiques… Le vin rouge récolté en 1883 pèse 8 degrés en sortant de la cuve et son goût comme sa couleur sont considérés comme très satisfaisants : « L’ambition de la Société n’est pas de faire un vin classé, mais un bon vin de table naturel, et l’honorabilité des producteurs sera une garantie suffisante que leurs vins seront parfaitement purs. »

Heureuse époque où l’honorabilité du producteur est garante de la qualité de son produit !

Mais nos deux hommes sont empreints de saint-simonisme comme l’ont été, avant eux, leurs prédécesseurs de la « Société Agricole et Industrielle d’Arcachon ». Le petit-fils d’Oberkampf est convaincu que le travail est la dignité de l’homme, l’usine un but en soi et l’industrie un moteur de la civilisation. Paul Decauville professe également des idées chères aux saint-simoniens et a un certain mérite à cela puisque ces idées sont alors beaucoup plus répandues dans le monde de l’industrie que dans celui de l’agriculture.

En plus du caractère capitalistique de leur démarche, ils sont venus sans doute à Gujan poursuivre un double objectif aussi humaniste qu’utopique : « Si la « Société Viticole de Gujan » réussit comme elle l’espère, elle aura rendu deux services au pays :

1° Elle aura appris aux habitants de la Gironde qu’ils peuvent convertir en vignes plus de 50 000 hectares de landes aujourd’hui à peu près sans valeur ;

2° Elle aura introduit, pour les vignobles d’une certaine étendue, des procédés de fabrication du vin présentant une grande économie de main d’œuvre sur ceux qui ont été en usage jusqu’à présent. »

À l’échec d’avoir été incapables de produire un vin concurrentiel s’ajoute donc ces deux autres fiascos. Et pour Ernest Feray un quatrième même : il ne parviendra jamais à organiser quelque mariage que ce soit entre ses affiliés et ceux de Paul Decauville !

En 1886, Ernest Feray doit se résoudre à modifier le statut de la Société Feray & Cie au profit de celui d’une société anonyme : « Au commencement de 1886, les capitaux de notre société étant épuisés, j’ai formé avec le concours de mes amis une société anonyme pour la filature de lin. En 1887 elle est surchargée de marchandises et je ne sais comment elle pourra continuer. Mes capitaux personnels sont épuisés et à l’âge de 83 ans j’ai le chagrin de penser qu’après moi mes enfants ne pourront pas conserver cette propriété. »

Par opposition, le « chemin de fer portatif Decauville » est l’une des grandes vedettes de l’Exposition Universelle de 1889 où il triomphe en faisant du nom patronymique Decauville, comme pour Eiffel, un nom commun qui va faire le tour du monde.

Les Gujanais peuvent se consoler en se rappelant cette déclaration prémonitoire faite, le 2 février 1874 à l’Assemblée Nationale, par le député Ernest Feray : « Est-ce que les industriels ont un bonheur plus grand que de dépenser dans l’agriculture ce qu’ils ont gagné dans l’industrie ? Je déclare que, quant à moi, je n’ai pas de plus grande satisfaction. »

C’est à la fin de 1889 ou au début de 1890 que le patrimoine foncier de la « Société Viticole de Gujan » passe dans les mains d’Auguste Dauban résidant sur l’île Silhouette (a appartenu à la famille Dauban de 1860 à 1960), troisième île en surface des Seychelles, dont il est propriétaire et où il est surnommé le « Rothschild de l’Océan Indien ».

Celui-ci s’acoquine alors, ou tente de s’acoquiner, avec des gens spécialisés dans la culture du topinambour, mais impécunieux. Il s’agit d’Ernest Vauvillé, maire de Saint-Aubin dans l’Indre mais aussi agriculteur de père en fils et spécialiste de la culture du topinambour, de S. Cungniez dont on nous dira simplement qu’il aurait dirigé des distilleries dans le Nord, et de V. Fournier, ingénieur.

Ensemble ils créent le 5 janvier 1891 une nouvelle société, la « Société Agricole et Viticole de Gujan et La Teste », qui sera définitivement constituée par deux assemblées générales des 6 et 19 janvier suivants. Son capital de 500 000 francs est essentiellement constitué de l’apport par Dauban de ses terrains de Villemarie. Apport toutefois conditionné par le placement réussi d’un emprunt obligataire.

Quatre mille obligations de 300 francs proposant un rendement de 5 % sont imprimées. Qui ne semblent pas avoir attiré l’attention des investisseurs.

Au printemps de cette même année, la Banque Générale des Valeurs, installée 21 rue Drouot à Paris, fait alors passer plusieurs articles dans l’Avenir Financier et le Moniteur des Actionnaires et des Obligataires pour vanter tous les avantages que les lecteurs de ces deux publications auraient à souscrire des obligations de la « Société Agricole et Viticole de Gujan et La Teste ». Ceux-ci n’avaient pas dû être très enthousiastes pour que la banque se résolve à regrouper ces articles dans une petite plaquette à fin d’une diffusion plus étendue : « Il s’agit du placement d’obligations d’une entreprise agricole de grande envergure créée en vue d’une exploitation industrielle de premier ordre. »

Le ton de cet opuscule n’a rien à voir avec la plaquette de la « Société Viticole de Gujan ». Il sue l’effort, ne contient que des suppositions et à force de trop vouloir prouver donne l’impression maladroite de vouloir faire prendre des vessies pour des lanternes aux éventuels obligataires.

Cette société dont le siège social est situé 78 rue Lafayette à Paris aurait donc repris l’ensemble des terres de l’ancienne « Société Viticole de Gujan » qui sont toujours de 708 hectares – mais les canaux d’irrigation qui les traversent ne sont plus que 3 au lieu de 4 bien qu’ils représentent quand même avec les rigoles qui les relient un développement de 55 kilomètres – mais aussi les dettes, pour l’essentiel l’emprunt au Crédit Foncier de France remboursable en 60 ans entraînant une annuité de 10 668 francs.

La société offre de souscrire 4 000 obligations de 250 francs rapportant 15 francs d’intérêts payables par moitié les 1er avril et 1er octobre, soit maintenant un rendement de 6 % non compris la prime de remboursement à 300 francs par tirage au sort en 25 ans et pour la première fois en 1895.

Cet emprunt a pour objet de financer la nouvelle politique de la société à la fois agricole, viticole et industrielle. D’ailleurs elle se réserve d’ajouter à tout moment dans sa dénomination sociale cette nouvelle caractéristique d’industrielle.

Sur le plan agricole, elle se propose de porter de trois à cinq le nombre de fermes situées sur ses terres. Celles-ci se consacreront à l’élevage et les 180 hectares qu’elles exploiteront seront ensemencés en fourrage. Elle attend un revenu annuel de 80 000 francs de cette activité.

Sur le plan viticole, elle a décidé de ne conserver que 200 hectares de vigne, choisis dans les meilleurs plants, sur les 530 plantés, preuve que l’exploitation de la « Société Viticole de Gujan » n’a jamais été satisfaisante. De cette activité, elle compte tirer un revenu annuel d’également 80 000 francs.

C’est sur le plan industriel que cette nouvelle société réserve toute son ambition. Trois cents hectares, dont une partie provient de l’arrachage de la vigne, vont être consacrés au topinambour, culture déjà essayée par la « Compagnie Agricole et Industrielle d’Arcachon », et dont la distillation permettra une importante production d’alcool très demandé à Bordeaux. Pour cela, le chai à vin de 1 176 m2 sera en partie désaffecté pour permettre l’entreposage du matériel des fermes et pour abriter la nouvelle distillerie qui sera une distillerie modèle. La production d’alcool sera spectaculaire et permettra d’engranger un revenu annuel de 300 000 francs. Très vite les agriculteurs voisins ne manqueront pas, devant de tels résultats, de se convertir également à la culture du topinambour et donneront ainsi du travail à la distillerie. Le domaine sera relié prochainement par un decauville à la ligne de chemin de fer Bordeaux-Arcachon.

Les différents reports de l’ouverture de la souscription à ces obligations sont imputés au retard pris dans l’impression des titres correspondants.

En novembre1893, le quotidien Le XIXe Siècle consacre un petit article à cette opération : « En effet, à la suite de l’énumération des apports de M. Dauban, il est stipulé que cet apport ne deviendra définitif que par l’avènement de la condition suspensive suivante : la souscription par les tiers des obligations émises par la société. »

Ce qui revient à dire qu’on ne compte, pour faire marcher la société, que sur l’argent des obligataires ; que les 100 actions à souscrire en numéraire, indépendamment des 900 actions d’apport, ne l’ont été que pour la forme, fictivement peut-être,  et que M. Dauban se réserve, si elle n’a pas lieu ou si elle ne réussit pas, de retirer son apport, laissant la société sans objet.

C’est sur ces bases fragiles que l’on s’appuie pour tenter de faire prendre au public 4 000 obligations de 250 francs, ce qui représente un capital de 1 million, alors que la propriété est déjà grevée d’une hypothèque privilégiée de 210 000 francs, alors que son propriétaire ne l’estime pas à plus de 400 000 francs, payables en titres.

Nous n’examinerons pas les prétentions des lanceurs de l’affaire, qui annoncent, dans un prospectus pompeux, l’idée fantaisiste d’arracher 300 hectares de vignes en plein rapport, non phylloxérées, affirment-ils, pour se livrer à la culture des topinambours. Toute la notice consacrée à cette entreprise est, du reste, bondée de bouffonneries de ce calibre. Mais ce que nous voulons retenir, c’est que la société n’existe pas légalement ; c’est que l’apport, n’étant que conditionnel, ne permet pas à la société de se constituer, en vertu même du vieux brocard de droit : « Donner et retenir ne vault ».

Donc, nos lecteurs feront sagement de s’abstenir de participer à la souscription qui leur est offerte ; et, dans le cas où ils auraient commis l’erreur d’acheter quelques-unes de ces obligations, de réclamer purement et simplement leur argent aux émetteurs, puisque la société n’ayant pas d’existence légale, n’a aucune qualité pour compromettre ou pour emprunter.

Ce conseil à ses lecteurs est d’autant plus judicieux qu’en vérité la « Société Agricole et Viticole de Gujan et La Teste », fait l’objet d’une dissolution dès le 5 mars 1891 et S. Cungniez en est nommé le liquidateur.

Les barbots

À la fin du XIXe siècle, la culture de la vigne est très répandue à Gujan, et lorsque celle-ci se mit à dépérir les gujanais crurent que les coccinelles (on dit que le coupable était l’eumople=barbott’s en langage local) qui recouvraient les plants étaient responsables de leur malheur. En désespoir de cause, après avoir épuisé tous les moyens de traitement, l’abbé Martron[1], commissionné par les dames patronnesses, et suivi par une grande partie de la population entreprit une procession  pour chasser l’envahisseur.

La légende dit que la semaine suivante, un grand vent se leva et emporta des milliers d’insectes qui allèrent se noyer dans les prés salés.

Les jours suivants, sur les parcs à huîtres, les Testerins ne se privèrent pas d’apostropher les Gujanais par un sonore : « Ouille Barbott’s ! » Vexés les Gujanais répondirent par un non moins tonitruant  « Te cagua sus pots ! »  c.a.d « je te ch. sur les lèvres ! »

Elégant, non ?

En 1921, lors d’un match de rugby contre La Teste, l’équipe de Gujan arbora fièrement  un maillot brodé de la coccinelle qui demeure depuis ce temps-là l’emblème de la ville.

[1] –  Nommé curé de Gujan de 1889 à 1896, nous devons à l’abbé Martron la Chapelle de Mestras et la belle Croix de Mission plantée sur la jetée de Larros le dimanche 25 octobre 1891.

Après quoi Jean-Baptiste Barrat habitant Toulouse se porte acquéreur de l’ensemble du domaine, arrachant la vigne pour planter des pins sans respecter les servitudes liées à la baillette qui le frappent.

Après lui, le domaine est souvent morcelé et passe dans de nombreuses mains pour aboutir à une société de fait constituée entre la société en commandite simple « Les successeurs d’A. Pelletier » (qui compte parmi ses commanditaires des gens comme René Easthope et Urbain Triscos dit Tonkin).

Lors de la dissolution de cette société de fait, le Tribunal Civil de Première Instance de Bordeaux ordonne, le 31 mai 1922, la licitation des immeubles indivis par l’organisation d’une vente  en cinq lots d’une vaste propriété de pins, de culture et d’élevage très giboyeuse, dite de Villemarie, Chabannes et la Forge, entourée de canaux, traversée par la route des Grands-Lacs de la Côte d’Argent, de la Hume à Sanguinet, communes de Gujan-Mestras et de la Teste, libre de tous droits d’usage.

1er lot – Ferme de Vaucluse et Ferme de la Madeleine (au nord de la ferme Saint-Henri), maisons et dépendances, bois de pins, jeune semis de pins, prairies. Contenance approximative 234 ha 69 a 02 ca, sises entre les canaux d’irrigation n° 2 et 3, la route des Lacs et le fossé mitoyen entre les communes de Gujan-Mestras et de la Teste. Mise à prix 160 000.

2lot – Fermes de Bergantade (le lieu dit « Bergantade», sur le côté est de la route de Sanguinet, en face de l’aérodrome de Villemarie) comprenant 3 maisons de colons et dépendances, pièces de pins, jeunes semis de pins, prairies, jardin, terres labourables. Contenance approximative 222 ha 57 a 93 ca, sises entre les canaux d’irrigation n° 3 et 4, la route des Lacs et le fossé mitoyen, entre les communes de Gujan-Mestras et de la Teste. Mise à prix 150 000.

3e lot – Grand immeuble connu sous le nom de Chai Decauville, logement de colons, écuries, vacheries, greniers, pièce de pins, terres labourables, jardins. Contenance approximative 68 ha 04 a. sis entre les canaux d’irrigation nos 2 et 3, la route des Lacs et la propriété Lebert. M. à px 110.000.

4e lot – Domaine de la Forge et Chabannes (au nord de l’aérodrome), étable en pierres et bois, couverte en tuiles, prairies, pièces de pins, traversé par le canal des usines en bordure de la route des Grand-Lacs, entre le canal d’irrigation n° 4, la propriété Beaudésert et l’ancien canal de navigation désigné sous le nom de canal des Landes (de Cazaux au bassin d’Arcachon). Contenance approximative 98 ha 04 a 07 ca. Mise à prix 115 000.

4e lot –  Pièce de 29 hectares plantés en jeunes pins ;

La vente a lieu le 25 juillet 1922 et seul le 3ème lot trouve preneur en la personne d’un directeur d’assurances de Bordeaux.

Le Tribunal décide le 16 juillet 1923 de faire vendre à l’amiable les autres lots.

Le nouveau propriétaire du 3ème lot décède le 19 août 1923 et ses héritiers le revendent le 18 novembre 1935, au quart de sa valeur de 1922 ; un résinier, deux cultivateurs et un ostréiculteur, se réunissent avec toutes leurs économies pour se porter acquéreurs.

Dans le partage qui s’en suit, une parcelle de 37 hectares sur laquelle est édifié le chai Decauville est attribuée à Léon Herran après que la partie centrale du dit chai ait été vendue et démontée pour être remontée dans quelque endroit dont personne ne se souvient plus.

Pour Albert de Ricaudy, historien local, cette aventure de la « Société Viticole de Gujan » n’est qu’un grand gaspillage qui n’a fait que succéder à bien d’autres : « Les ventes et reventes des terrains de la Compagnie Agricole avaient divisé à l’extrême l’immense domaine où Nezer avait enseveli des sommes équivalant à une vingtaine de millions de notre monnaie et pour lequel les compagnies susdites n’en avaient pas sacrifié moins. La lande après avoir produit, grâce aux soins qu’elle exige et qu’on lui avait donnés, toutes sortes de produits parmi lesquels, le rutabaga, le tabac et même le riz (mais quel riz !), pour la seconde fois, la lande était à peu près partout redevenue lande. En vain, d’autres zélateurs, dont les principaux furent M. Decauville, puis MM. Ferré et Desforges, devaient tenter de nouvelles expériences pour cultiver la vigne. Aucun essai de culture en grand, surtout par des entreprises imprévoyantes, prodigues et mal administrées comme ce fut le cas, ne pouvait décidément réussir… sinon à l’engloutissement des capitaux employés. »

Si par un coup de baguette magique, Nézer, le duc de Doudeauville, le duc de Montmorency, Ernest Feray pouvaient revenir arpenter la plaine de Cazaux, on peut être sûr qu’ils s’indigneraient unanimement : « Dieu, qu’en ont-ils fait ? »

Une sorte de no man’s land encombré d’un invraisemblable bric-à-brac où le meilleur côtoie le pire : un hippodrome, un champ de tir, un aérodrome, un lotissement de mobile homes, un golf 18 trous, une zone commerciale à l’américaine, le tout traversé par une voie rapide à s’embouteiller et où persiste envers et contre tout deux exploitations agricoles et dans un canal à l’abandon… quelques ratons laveurs.

Léon Herran partagera sa propriété entre ses trois enfants et elle appartient aujourd’hui à ses petits-enfants, dont l’un, Michel Dessarps, est le dernier producteur laitier du Sud Bassin. Tel le dernier des Mohicans…

Mais à la fin de cette année, il va prendre une retraite méritée et il n’y aura plus de vache à Gujan.

Quant au domaine de « Terre Neuve », il a été transformé en aire de repos des gens du voyage…  Si nous revenons maintenant à la route des Lacs, à la sortie de Gujan-Mestras, les pavillons s’égrènent en un long chapelet. Séparés par des chemins de terre, on les devine souvent plus qu’on ne les aperçoit, tant la forêt semble vouloir les recouvrir de ses tentacules. C’est le long de ce ruban de bitume, dans une maison protégée des regards indiscrets par une barrière végétale, qu’officiait le gourou Claude Alonso.

Logés dans un grand domaine en pleine nature, les adeptes de sa secte sont invités à vendre leurs maigres biens et à contracter des prêts. La communauté tire également ses revenus de cours de danses et de chants gérés par sa fille.

Les dieux semblent avoir abandonné à son triste sort le septuagénaire girondin. Incarcéré après avoir été mis en examen pour des viols et des abus de faiblesse par sujétion psychologique sur plusieurs femmes, il clame en vain son innocence. « Il a perdu 30 kilos, il va très mal, et il est en train de mourir », s’insurge son avocat, Me Éric Grosselle. À deux reprises, lors d’auditions en visioconférence devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Bordeaux, Claude Alonso est apparu avec des cannes.

Les magistrats ont pourtant rejeté ses demandes de remise en liberté, craignant qu’une fois à l’extérieur ce guérisseur-magnétiseur, dépeint comme un grand manipulateur par ses détracteurs, ne fasse pression sur deux anciennes disciples, aujourd’hui parties civiles.

Le septuagénaire, qui officiait à l’abri des regards dans sa propriété située en bordure de la route des Lacs, exige qu’on l’appelle Zeus, le dieu suprême et maître de l’univers de la mythologie grecque. Un dieu visiblement très friand des faveurs sexuelles de ses disciples dont le magistère s’interrompt brutalement, en mars 2015, lorsque la police judiciaire investit le domaine du Chai du vin.

Dans le panthéon grec, Zeus est le dieu qui domine les éléments. Son émule de Gujan-Mestras se veut plus modeste. Il dit prendre ses ordres auprès d’un mystérieux « Conseil supérieur invisible ». En 2013, ce cénacle censé inspirer la crainte aux adeptes qui s’écartent du droit chemin laisse passer la lettre rédigée par un médecin limousin au sujet de l’une de ses patientes, une ancienne toxicomane aux tendances suicidaires qui a appartenu pendant dix ans à la communauté de Gujan-Mestras ; au sein de ce cénacle, elle s’appelle « Korè ». Dans la mythologie, c’est l’épouse d’Hadès, dieu des Enfers et frère de Zeus. Mais, partisan d’une interprétation très libre des textes, le gourou lui confie un tout autre rôle. Si elle couche avec lui, l’humanité échappera à l’apocalypse.

Usant de son pouvoir, Zeus transforme les femmes qui l’approchent en pensionnaires de son Olympe. Une retraitée de l’armée de l’air endosse le rôle d’Hestia, la déesse du Foyer et du feu sacré, une autre se métamorphose en Déméter, la grande prêtresse des Labours et des moissons.

Ces prêtresses constituent le noyau dur d’un groupe évolutif composé de femmes aux origines modestes, en rupture avec leur famille et fragilisées par des blessures affectives.

« On est en présence d’un gourou qui rebaptise l’ensemble de ses adeptes. Séduction, destruction et reconstruction d’une personnalité sous une nouvelle identité. Les critères de la manipulation et de l’emprise mentales sont réunis », observe Me Daniel Picotin, l’avocat de l’une des deux femmes parties civiles.

« En arrivant au domaine, elles ne savaient rien au départ du caractère sectaire de Claude Alonso et découvraient d’abord un lieu accueillant, communautaire et proche de la nature », relate la juge d’instruction dans son ordonnance de mise en accusation. Progressivement, elles se dépouillent de leurs quelques biens matériels, leurs maigres ressources et les allocations de la CAF étant préemptées par Zeus pour payer les frais de nourriture et les loyers des studios qu’elles occupent.

Les policiers de la cellule spécialisée d’assistance et d’intervention en matière de dérives sectaires se sont beaucoup intéressés au trône situé dans une mezzanine dominant le séjour.

C’est là que siège Zeus, dans un temple de pacotille non loin d’une colonne où figurent les dix commandements alambiqués fruits de son imagination, là qu’il discourt des heures durant sur l’équilibre du monde et les menaces qui le guettent, là que ses fidèles nus comme des vers et oints d’une huile sacrée sont intronisés, là que sont disposées deux jarres contenant un breuvage que la décence interdit de détailler mais qu’ingurgitent chaque jour les déesses de la maisonnée. Le délire se poursuit le soir, en petit comité, sur la mezzanine du salon – un « temple » de pacotille avec sceptre, épée, boule de cristal, tables de la loi et portraits de Claude Alonso accrochés aux murs.

Assis sur son trône, devant ses sujets agenouillés, ce dernier discourt jusqu’à des heures avancées de la nuit, dépositaire autoproclamé de la parole d’un « Conseil supérieur invisible ». Un prêchi-prêcha ésotérique censé justifier des bacchanales lors desquelles il incite à une sexualité de groupe débridée et dédiée à son propre plaisir.

À ses adeptes – des femmes au passé traumatique fait d’incestes, d’alcoolisme ou de prostitution – il impose des « travaux » à exécuter sous peine de sanction… En fait, des relations sexuelles et la quête de l’orgasme parfait, destinées à recharger Zeus en énergie et, ni plus ni moins, à sauver l’humanité en évitant l’apocalypse.

Selon la doctrine en vigueur entre ces murs, seul « l’orgasme commun » peut sauver la planète. Les disciples, qui ont préalablement bu un nectar à base de vin rouge, de Lexomil… de sperme et des menstrues des femmes de la communauté, offrent leur corps au dieu suprême pour éloigner les forces du mal. Source d’une énergie inépuisable, les femmes offrent leurs corps au dieu suprême de manière à « éprouver la puissance créatrice de l’acte sexuel » qui peut seul les sauver de l’apocalypse. Elles se consument dans les bras de Zeus pour « le recharger ». Les relations de groupe sont parfois exigées, les pensionnaires étant priées de rechercher l’orgasme parfait, la fameuse « arcane AZF » qui éveille le Serpent Kundalini qui dort au niveau de la base de la colonne vertébrale.

L’une d’elles, véritable défouloir sexuel, est d’ailleurs forcée de porter des jupes pour satisfaire sur-le-champ toute pulsion du maître des lieux.

 « Les relations sexuelles de groupe étaient également exigées par Claude Alonso pour contrer les plus grosses attaques », observe la chambre de l’instruction dans l’un de ses arrêts.

Un temps magnétiseur-guérisseur, dans les années 1980, à Libourne, ce fils d’ostréiculteur gère, pendant quelques mois, une agence immobilière sur les bords de la Dordogne. Si l’on en croit son ex-épouse, alors conseillère municipale à Libourne, il aurait eu à cette époque une subite révélation. Lors d’une séance de « régression », ce passionné d’ésotérisme, fréquentant des voyants et se passionnant pour les théories de la réincarnation, aurait appris qu’il « avait été un dieu de la création du monde » et que « son âme était très ancienne. » Peu de temps après, les compagnes qui l’entourent l’appellent déjà Zeus et se prosternent devant lui.

Il y a vingt ans, le gourou avait été inquiété lors d’une enquête ouverte pour corruption de mineurs de 15 ans par le parquet de Libourne. Plusieurs des membres de l’association qu’il animait à Sablons, dans la vallée de l’Isle, avaient été entendus, mais sans qu’aucune suite soit donnée. « Un architecte, un dentiste dont l’épouse a peint le tableau de Zeus et de ses adeptes retrouvé à Gujan participaient à ces bacchanales », accuse Me Daniel Picotin.

Les rares clients de l’agence immobilière qu’il a dirigée pendant quelques mois se souviennent de la pyramide en verre édifiée dans la cour du bâtiment qui abritait son bureau.

Déjà, les contours du personnage de Zeus commencent à se dessiner. Déjà, il vit entouré de femmes souvent psychologiquement fragiles qu’il s’apprête à plonger dans le bain de la mythologie et à arrimer à ses chimères. Chimères qui l’ont aussi mené sur le chemin de la pierre philosophale, que traquent les alchimistes ébouriffés amoureux de vieux grimoires depuis la nuit des temps.

Le laboratoire de biologie du Pr Doutremepuich s’est penché sur les trois cailloux découverts dans des bocaux posés sur une commode. Des traces de sang et de sperme ont été identifiées. Le germe dont rêvait Zeus est toujours aux abonnés absents. Le gourou voulait l’hydrater avec « une rosée céleste » recueillie dans son jardin, dans l’espoir de déflorer le secret d’« une médecine alternative universelle ».

« Les fous sont autour de lui, mais il sait très bien ce qu’il fait. Comment suis-je tombée si bas… », lâche, désabusée, aux enquêteurs, une musicienne qui s’est éloignée de lui sans pour autant déposer une plainte. Mais, à Gujan-Mestras, Hestia et Déméter, les déesses esseulées, espèrent toujours que les portes de la prison de Gradignan s’ouvriront bientôt pour que revienne leur dieu et maître.

« Ces personnes ont intégré cette communauté de leur plein gré et n’ont pas été retenues quand elles ont souhaité en partir », souligne le pénaliste, rappelant que plusieurs femmes désignées comme victimes par la justice ont témoigné en faveur de son client.

L’homme vient d’être renvoyé devant les assises, accusé d’abus de faiblesse sur cinq femmes et viols sur trois d’entre elles, dont sa propre fille. Alors âgée d’une vingtaine d’années, celle-ci était venue s’installer aux côtés de son père, malade, en 2003.

Claude Alonso nie toute relation sexuelle avec sa propre fille, contrairement à ce que celle-ci rapporte. Loin d’être épargnée, celle-là assure avoir été contrainte à d’innombrables relations sexuelles avec son père et ce, pendant plus de six ans. Elle aurait également servi d’appât sur des sites Internet lesbiens et lors de soirées échangistes, son père lui désignant sur place les « matériaux » à conquérir. Son amie, devenue à son tour la favorite de Claude Alonso, la convaincra finalement de fuir avec elle et de déposer plainte.

À l’époque, Claude Alonso, deux fois divorcé, vit en communauté avec des femmes, tenant un discours mêlant mythologie et ufologie, et prétendant guérir par apposition des mains. Des tendances mégalomaniaques qui affleuraient déjà lorsqu’il exerçait comme agent immobilier : il s’était alors fait construire une pyramide en verre pour y installer son « bureau directorial ».

Avant de faire faillite et siphonner les comptes de son épouse…

Le procès de Zeus devait se tenir en 2020.

 

« La Société  Viticole de Gujan », Jean-Pierre Ardoin Saint Amand, 2004-2020

« Créations de vignobles dans les sables des Landes », G. de Lapparent, Rapports et délibérations, Conseil général des Landes, avril 1887

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k57600433/f124.item.r=%22Soci%C3%A9t%C3%A9%20viticole%20de%20Gujan%22

La semaine agricole, revue agricole et politique de la France et de l’étranger, 20 mai 1883

https://collections.maison-salins.fr/files/original/37ea09589492c54cdf74110831b600a4f673223c.pdf

Bulletin des séances de la Société royale et centrale d’agriculture : compte rendu mensuel, 1884

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62045279/f125.item.r=Soci%C3%A9t%C3%A9%20Feray,%20Decauville%20et%20Schlumberger

Journal de Toulouse du 15 janvier 1884

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5378813h/f3.item.r=%22Soci%C3%A9t%C3%A9%20viticole%20de%20Gujan%22.zoom

Cote de la Bourse et de la banque, 7 mai 1887.

https://www.retronews.fr/journal/cote-de-la-bourse-et-de-la-banque-et-le-messager-de-la-bourse-reunis/07-mai-1887/675/2741861/3

https://entreprises-coloniales.fr/afrique-du-nord/Compagnie_marocaine.pdf

https://www.entreprises-coloniales.fr/proche-orient/Financiere_d’Orient.pdf

La République confisquée : 1848 en “Essonne” : actes du colloque de Crosne, 21 et 22 novembre 1998, Muriel Genthon, 1999

https://books.google.fr/books?id=gVdmsbZULQQC&pg=PA189&lpg=PA189&dq=%22Ernest+Feray%22+gujan&source=bl&ots=7IQa-Cvjlf&sig=ACfU3U22AOQgiLG3u0ZktLhafqKdWFYVQQ&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjtlpTV08fyAhVI1xoKHbmKB64Q6AF6BAglEAM#v=onepage&q=gujan&f=false

« Le gourou de Gujan renvoyé aux assises », Dominique Richard, Sud Ouest du 10 août 2019

http://www.infosectes-aquitaine.fr/wp-content/uploads/2014/01/2019-08-10_-Article-SO-ZEUS-alias-Claude-Alonso.pdf

danse-eolia

https://www.arcachon-guide.fr/loisirs/ecole_de_danse.html

Sud Ouest du 23/03/16

https://www.danielpicotin-avocat.com/categories/affaire-zeus-12108/articles/sud-ouest-zeus-le-gourou-de-gujan-mestras-141.htm

https://www.leparisien.fr/faits-divers/le-gourou-zeus-exigeait-des-orgasmes-pour-sauver-l-humanite-22-09-2019-8157579.php

 

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