Colonie « Bonnes vacances » des Bordes

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L’association “Les Bonnes Vacances” est créée en novembre 1913 ; les statuts sont déposés à la sous-préfecture de Castres dans le Tarn. Le but de l’association est de proposer à des enfants Castrais et des environs de partir à Montredon-Labessonnié situé à une vingtaine de kilomètres pour quelques jours de vacances. À cette époque, seuls des ecclésiastiques s’occupent alors en France de ce que l’on appelle le « patronage », qui va devenir les colonies de vacances. Aujourd’hui, les enfants qui sont accueillis viennent de la France entière voire même, de l’autre côté des Pyrénées à l’occasion d’échanges linguistiques.

En 1951, le président d’alors, l’abbé Gau entend parler du bon air de l’Atlantique et plus particulièrement du Bassin d’Arcachon. En compagnie d’un industriel de Castres, M. Pélissier et de quelques administrateurs, ils partent vers Arcachon et achètent à La Teste un ancien haras à chevaux de près de 10 ha jouxtant le bassin.

M. Pélissier, responsable des usines Viala, participe financièrement à cette aventure et détache quelques ouvriers sur place, le temps de remonter un bâtiment amené pierre par pierre depuis Castres !

Tout a débuté avec Barthélemy Amen, « un tisserand qui a décidé de passer à la vitesse supérieure et d’évoluer du métier de fabricant et négociant qui commercialise les tissus à celui de manufacturier », explique Aimé Balssa. Si le fondateur de l’entreprise impulse le mouvement, la dynamique va nettement s’amplifier avec les successeurs qui vont prendre la suite, Jean-Baptiste Cabrol puis son gendre Henri Viala. « Ce dernier est à la tête de la société pendant la guerre de 14-18 qui va voir l’entreprise castraise profiter pleinement du démantèlement des usines textiles du nord de la France et des commandes de l’armée. »

Les bénéfices sont importants et on va alors construire une usine pour le tissage rue Mérigonde. Une deuxième usine (Bagatelle) verra le jour pendant la deuxième guerre mondiale alors que ce sont les maris des filles Viala, tous des Pélissier et des Corréziens, qui ont repris les rênes. « En 1950 on a alors affaire à une entreprise intégrée qui emploie 500 personnes environ. »

Elles seront 1000 en 1960 avant que le prêt-à-porter puis la concurrence étrangère n’érodent les carnets de commandes, même si l’entreprise a réussi à se développer dans la bonneterie et marche plutôt bien dans les années 1970. 450 salariés en 1980, 160 en 1988. Plus dure sera la chute pour les établissements Viala qui fermeront leurs portes en 1996.

La belle histoire des “Bonnes Vacances” :

L’association perdure et se spécialise dans l’organisation de colonies de vacances durant de nombreuses saisons. Le domaine s’embellit au fil des ans pour devenir aujourd’hui totalement adapté aux nombreuses exigences sécuritaires et administratives dans de larges espaces toujours préservés.

Les présidents qui se succèdent œuvrent toujours dans le même esprit de bénévolat. Pendant une trentaine d’années, sous la conduite de Jacques Donnadille, l’association cherche dans la diversification une source régulière de revenus ouvrant même les colonies aux enfants envoyés par des CE d’usine de l’est de la France. Elle accueille alors des classes de découverte, des séjours sportifs, des séjours de formation de jeunes ou d’adultes.

L’été, des groupes extérieurs peuvent être accueillis dans des structures indépendantes et fonctionnelles, les colonies restant une partie importante de l’activité.

Le camping familial ouvert 2 mois par an garde l’ambiance conviviale de vacances réussies.

Depuis 2002, Jean-Luc Donnadille préside aux destinées de l’association : il sait fédérer autour de lui une équipe de dirigeants passionnés, motivés et actifs qui s’engagent dans un programme de rénovation : modernisation et mise aux normes de l’ensemble des bâtiments (chambres, cuisine, salles à manger). “Les bonnes vacances” se veulent résolument être dans l’air du temps. Les colonies classiques et généralistes deviennent des séjours adaptés aux demandes des enfants et des parents, les vecteurs de communication actuels sont utilisés, “Les bonnes vacances” sont incontournables dans le milieu associatif et les tarifs proposés restent toujours très attractifs.

En 2011, les dirigeants des « Bonnes Vacances » réfléchissent à une refonte des séjours proposés aux enfants. Ils entreprennent un audit afin de trouver des pistes de réflexion au sein des enfants des familles et des professionnels de l’animation. Ainsi, l’été 2012 voit naître une nouvelle génération de séjours thématiques. Cette conceptualisation des séjours correspond aux demandes des familles. Les thématiques des semaines laissent le choix de la durée de séjours et des activités dominantes. Les atouts du domaine des « Bonnes Vacances » et des environs sont mis en avant : Aqualand, plages océanes, dune du Pilat, Bassin et forêt.

En 2013, et avec une certaine fierté, l’association fête ses 100 ans avec beaucoup d’événements : la sortie d’un livre, une exposition photo, un grand apéritif avec les élus et  500 personnes au Théâtre Municipal de Castres et un grand week-end festif durant lequel 200 « anciens » retrouvent le bonheur de dormir à la colonie au bord du bassin d’Arcachon.

En 2014, et pour la première fois de son histoire, l’association des « Bonnes Vacances » propose 18 séjours de 8, 15 ou 21 jours. Ainsi, elle se positionne totalement en phase avec les différentes attentes des enfants, des familles ou des organismes sociaux. Cette formule avec ces séjours thématiques, est reconduite  et est toujours en place avec 15 séjours au choix.

Aujourd’hui, son domaine de 7 ha entièrement clôturé, possède une piscine zodiaque, un terrain de basket, de volley, de football, dans un cadre toujours magnifique. Le camping deux étoiles, et ses trente emplacements ombragés, est ouvert à tous !

Les bénévoles qui ont en charge la gestion de ce merveilleux patrimoine, se retrouvent régulièrement sur place pour des travaux d’entretien ou d’amélioration du domaine que l’on appelle volontiers la colonie voire la “colo”.

https://www.lesbonnesvacances.com/page-1/page-1-2/?fbclid=IwAR2pRpMbjJK8GGHFzb6vJqk_4g6q4G1ecSeovlpYjyBwysXEUf1MddyZnw8

https://www.lejournaldici.com/actualite/a-la-une/c%C3%A9tait-la-plus-grosse-usine-textile

 

Extrait du roman de Pierre Galibert “Le livre sur la commode”

Pour moi l’abbé Gau restera un vieux monsieur, rongé par la maladie qui venait souvent dans la maison familiale des allées Corbière. Il avait été toute sa vie un homme persévérant, voulant atteindre le but fixé, désireux de conduire les Bonnes Vacances sur les rails du succès.

Avant de monter me coucher, j’avais le droit, ou plutôt le devoir, de l’embrasser. Le vieil homme se calait dans le fauteuil crapaud gris bleu, à droite en rentrant dans la salle à manger. Mon père restait à table. Les deux hommes parlaient beaucoup. J’étais trop jeune pour participer aux conversations ou pour les comprendre mais je ressentais la sérénité qui habitait la pièce. Mon père éprouvait un immense respect pour son aîné. Je crois que l’abbé l’appréciait aussi.

En 1951, par un matin forcément très beau, ils étaient  partis pour La Teste. Titou Clerc, papa de Marie-Françoise future mono,  et papi de Louise, future serveuse, complétait l’équipée. Ils avaient rendez-vous pour signer, chez le notaire testerin, l’acte de vente d’anciennes écuries plus insalubres qu’attirantes, en bordure du Bassin et infestées de moustiques venant des marécages environnants. L’abbé avait déjà visité des terrains sur la côte méditerranéenne sans donner suite. Là, malgré les inconvénients, il avait eu instantanément le coup de foudre. On raconte que les billets de banque prévus pour l’achat étaient cachés sous le siège du passager de la 4 CV.

L’abbé Gau voyait là une colonie. La municipalité envisageait même la construction d’une passerelle pour accéder directement au petit port de la Hume sur la commune voisine de Gujan-Mestras plaçant la plage à quelques dizaines de mètres de la future propriété. L’abbé imaginait déjà la plus-value apportée si ce passage était réalisé. Ce petit pont n’a jamais vu le jour. Peu importe, les bains de mer n’étaient pas forcément la priorité à l’époque. Seul l’air de l’océan comptait et ce n’est certainement pas les odeurs de la conserverie voisine au bord de la voie ferrée  et des marais environnants qui allaient contrarier les projets du prêtre entrepreneur.  Financer cet achat n’avait pas été une mince affaire. L’abbé Gau avait bien compris que Marcel Pélissier, riche industriel du Tarn qui employait son papa comme contremaître, pouvait aider l’association qui jusqu’alors organisait les colos à 20 kilomètres de Castres, à Montredon-Labessonnié et au bord de l´étang de Berre dans les Bouches du Rhône. Marcel Pelissier finança l’achat sans hésiter en pensant aux petits des ouvriers qui pourraient se régaler en vacances. Après avoir dirigé les séjours tarnais,  l’abbé Gau fut directeur en Gironde comme le seront l’abbé Maffre, l’abbé Pic, l’abbé Chatelain, l’abbé Roudouleuse, l’abbé Maraval et bien d’autres…

Eté 1971, toutes les radios du pays chantaient l’énorme succès de Michel Delpech « Pour un flirt ». Les « pattes d’éléphant » et les cols « pelle à tarte » étaient portés par les gens à la mode.

Gau déjà fatigué, était bel et bien là sur le domaine pour organiser la grande fête autour des 20 ans de l’achat du terrain. Quelques notables faisaient partie de la cinquantaine d’invités. On croisait les artisans locaux qui avaient aidé aux travaux. Le garagiste Grégoire et le boucher Selhay faisaient partie de la fête comme les curés de la Hume et de la Teste. Pour présider les festivités, Monsieur Le Maire, le Docteur Aristide Ichard, fut accueilli par Mado Laplagne. Mado était la première directrice laïque aux Bonnes Vacances, clôturant ainsi définitivement  une impressionnante liste de prêtres et de sœurs, notamment Sœur Marie-Dominique, qui dirigèrent les séjours. Ceux-ci s’enchaînaient déjà au rythme de deux ou trois par été. Les garçons, en juillet, et les filles, en août, dormaient sous des marabouts de l’armée américaine.

J’imagine la bonne ambiance champêtre qui régna lors du banquet : les officiels déjeunèrent au troisième service après le repas des enfants et celui des campeurs. En effet, jusqu’au milieu des années 1980, les campeurs pouvaient acheter les repas, tel un service traiteur, à la colonie. Une file se formait alors au niveau de la porte de la réserve aux heures des repas et les campeurs, gamelles bien remplies, de traverser la prairie pour rejoindre les toiles et déguster les plats encore fumants.

Il n’était pas inhabituel de croiser des campeurs ou des voisins, gourdes et bidons à la main : le puits artésien permettait de récupérer, par 119 mètres de profondeur, une eau saine et gratuite: l’eau de la ville n’arrivait pas encore au bout de la rue André Lesca et des centaines de colons ont pu apprécier sa vertu diurétique  pendant des décennies.

Parmi les multiples talents de Gau, il y avait incontestablement celui du sens des relations. Il s’était lié avec le Maire qui, médecin de son état, venait soigner les petits malades de la colo. Le Docteur Ichard rajoutait parfois quelques visites qui n’avaient rien de médicales à l’invitation de l’abbé :

– Aristide, tu reviens demain… On a préparé quelques haricots… façon Castelnaudary…

Et le médecin de repasser entre deux malades le lendemain, et de s’éterniser autour d’un bon cassoulet sans se soucier des horaires des consultations du début d’après-midi.

Gau nouait des relations partout : c’était important, indispensable même, pour bien soutenir l’action menée. Il avait parfaitement compris que tisser un réseau était primordial. Même les gendarmes étaient ses amis. Les chiens de la maréchaussée appréciaient particulièrement les restes des repas des colons. Ainsi, plusieurs fois par semaine, un bruit effroyable et un nuage de poussière précédaient l’atterrissage d’un hélicoptère de la gendarmerie nationale sur la prairie. Deux gendarmes, seaux à la main, venaient chercher le repas pour leurs chiens. En échange, quelques décollages et atterrissages, aux frais du contribuable, pour les dirigeants de l’époque et de jolis baptêmes de l’air au-dessus des cabanes tchanquées ou de la Dune.

L’abbé Gau maniait également l’humour et les calembours. Madeleine Donnadille imposa un jour à son époux d’aller se changer, sali qu’il était par les travaux qu’il venait d’accomplir :

– Va te changer, on dirait un bohémien !

– Un « beau » et « mien » car il est beau et il est à toi…

L’abbé Gau voulut même un jour louer un avion pour embarquer Yves Donnadille, alors bébé, afin de le guérir de la coqueluche : Ichard, le docteur ami et complice, rappelait que l’altitude était salutaire pour cette pathologie. L’abbé Escande, dont le sens de l’humour n’était pas adapté aux délires de Gau, pesta contre tant d’inepties.

Jean Gau taquinait souvent Maurice Escande. C’était un jeu entre eux. Un soir il voulu libérer Jacques et Madeleine et proposa de garder le bébé pour la soirée. Tonton Maurice s’insurgea devant cette charge impossible:

– Mais tu es fou, s’il pleure, qu’est-ce qu’on fera ?

Et Gau de répondre sans jamais se laisser désarçonner :

– Y’aura qu’à remuer le berceau…

Jean Gau se serait fait tuer pour la colo. C’était sa vie. Si la classe naturelle qui se dégageait de lui impressionnait, elle était vite rattrapée par son contact magique. Si nous sommes tous réunis ici aujourd’hui, c’est grâce à lui. Ne l’oublions jamais. Nous avons pour devoir de le faire connaître aux jeunes générations de bâtisseurs.

Nombreuses furent déjà les tentations à l’époque de vendre tout ou partie du domaine car l’investissement de départ avait été excellent et le terrain de l’association prenait d’année en année une valeur remarquable alors que les fonds manquaient. Gau ne céda pas malgré de nombreuses tentatives. Certes, il alla jusqu’à faire réaliser les plans d’un lotissement lucratif sur l’emplacement actuel du camping. Les lots prévus, avec accès direct sur la rue André Lesca, auraient renfloué d’une manière exceptionnelle les caisses. Finalement Gau n’alla pas au bout de ce rentable projet. En revanche, au fil des ans, quelques petites parties du domaine furent vendues pour permettre de construire l’appartement du concierge, en surélevant la direction et d’aménager une nouvelle cuisine. Peut-être, au fil des décennies qui se profilent, jalonnées par  les exigences sécuritaires et les demandes improbables des commissions d’hygiène, serons-nous obligés de nous séparer de quelques hectares en échange d’un équilibre économique.

https://www.lesbonnesvacances.com/page-1/anecdotes/le-visionnaire/

 

Le Bassin a connu plusieurs raz-de-marée, le 28 octobre 1882, le 8 janvier 1924, mais c’est celui du 29 décembre 1951 qui a provoqué la rupture de la digue des prés salés, et marqué les esprits par son ampleur, sa soudaineté en pleine nuit.

Le service des archives municipales en a conservé les traces et a bien voulu apporter son aide à cette “enquête”.

Ainsi le témoignage d’une habitante du quartier des Bordes rapporte combien le 29 décembre 1951, elle fut traumatisée de se réveiller dans le noir, les objets flottants autour d’elle : « Les tapis, les chaussures faisaient petits bateaux”. Les eaux montaient et personne ne savait si cela allait s’arrêter… On se réveilla les enfants, récupéra le maximum de vêtements chauds et on monta dans les étages… »

Le maire de l’époque, Aristide Ichard, et son premier adjoint relatent ces événements en détail, lors d’une séance extraordinaire du Conseil Municipal le 8 janvier 1952. « C’est un chaos, un désastre incalculable. Cette masse d’eau a rompu les digues, causant ainsi de nombreuses brèches dont la plus importante est celle du bassin de la Société ostréicole testerine, longue de plus de 30 mètres et profonde de 6 mètres. Elle a entraîné l’inondation des bassins dégorgeoirs ostréicoles et des habitations attenantes. L’eau a atteint 1,50 m environ et même davantage par endroits, en contrebas […] »

La municipalité fait appel à l’armée qui envoie sur le champ un premier contingent de soldats.

Le maire poursuit : « Le matériel nécessaire palplanches et madriers nous a été fourni par les scieries locales […]. Il a fallu ensuite trouver 7000 sacs de jute auprès des ostréiculteurs, de la Cellulose du pin et d’une maison de Bordeaux.

C’est ainsi que 300 tonnes ont été charriées ».

Les troupes militaires sont logées dans la salle des fêtes, la salle de gymnastique du patronage et ravitaillée par les hôtels locaux, pendant que la population constate l’ampleur des dégâts du haut d’un monticule de terre, futur boulevard Curepipe.

http://stopurbanisationlt2.free.fr/infosurb09102010.htm

 

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Raphaël

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