Carte imaginaire de 1648
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Deux itinéraires sont possibles au départ de Soulac : celui par Lilhan, Grayan, Vendays, Naujac, Hourtin, Carcans, Lacanau, Le Porge ; l’autre, le chemin du Roy, passe par Vertheuil, Le Pian, Parempuyre, Bordeaux.
Le camis roumious se dirige vers Lilhan : Saint Pierre ayant été martyrisé à Rome, Amadour bâtit en l’honneur du chef des Apôtres, une église appelée dans les vieux titres : Sanctus Petrus in ligno, ce qui dans l’idiome local est devenu : Saint-Pierre de Lignan ou de Lihnan (h précédé ou suivi d’un n se prononçant en gascon comme g) puis de Lilhan ou Lillan. Son ancienneté lui vaut d’avoir toujours le premier rang parmi les paroisses de l’archiprêtré de Lesparre. Elle se trouve à 6 km environ au sud de Soulac, dans la grande lède homonyme, à peu près sur le passage du chemin actuel de Soulac à Grayan, ou fort peu à l’ouest, en tout cas loin de la mer qui n’a pu l’ensevelir. En effet, on lit dans un pouillé de 1648 : « Ecclesia (Lilhan) est deserta et cooperta aquis. » Si c’eût été l’océan qui eût englouti cette église, on n’aurait pas dit qu’elle était déserte, on aurait simplement mentionné sa disparition. Les mots deserta et cooperta aquis ne peuvent s’expliquer que par l’envahissement des sables et des eaux douces qu’ils poussent devant eux. Après avoir couvert Lilhan, ces eaux et ces sables l’ont dépassé et laissé derrière. La carte de Blaw porte ces mots : « Paroisse de Lilhan qui a été couverte des sables un peu à l’ouest du chemin de Grayan à Soulac ».
Cette portion de route, appelée chemin de la Reyne en souvenir du passage d’Aliénor d’Aquitaine, est l’extrémité de la Levade, voie romaine qui vient de Bordeaux. Le pèlerin passe à Grayan-et-l’Hôpital (Hospitalet de La Grayanès), hospice fondé par les Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem, et dépendant de la Commanderie de Benon en Médoc, qui elle-même relève du Temple de Bordeaux. Fondé au XIIe siècle par les pèlerins de Compostelle, il disparaît de bonne heure. Le commandeur est propriétaire de l’étang de la Varreyre ou Barreyre, qui renferme des carpes et des tanches. Le pèlerin se repose en attendant de reprendre son périple. La voie littorale se détache de la voie romaine à hauteur de l’Hôpital pour obliquer soit vers Mayan (existence d’un gué) soit vers Vensac, Vendays, la Brasquette, l’Espérance, Cartignac et Hourtin, au Pey de Camin. On mentionne un hospice à Talais et un autre à Vensac (Temple de Planquetorte). L’ouvrage du baron de Marquessac, Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem en Guyenne depuis le XIIesiècle jusqu’en 1793, publié en 1866, est particulièrement précieux pour la connaissance de ces édifices. Il nous donne ainsi une description de la chapelle de Planquetorte, annexe de la commanderie d’Arcins : « C’était une affreuse masure, un toit de brique défoncé, un clocher à pignon détruit, deux pauvres portes refaites au XVIe siècle, un chevet plat sans ouvertures, un sol autour du temple tout défoncé, et en avant du côté gauche de l’angle sud-ouest de l’église, une énorme colonne de pierre d’une antiquité récente, surmontée d’une croix de fonte à dessins entrelacés. Tristement et par respect, nous entrâmes dans l’église ; il n’y avait plus rien que des murs décrépis, et de l’eau, qui tombant goutte à goutte de la voûte entrouverte, mouillait sans relâche la place déserte où devait se trouver autrefois le tabernacle de l’autel. Puis nous fîmes le tour de cette antique chapelle, et nous vîmes à la façon dont les moellons étaient posés, que les murs de l’église, plus respectés que le pignon et la toiture, devaient remonter au XIIe siècle. La porte et la façade avaient perdu leur ancienne architecture, sans doute par l’usure des années et la marche des événements. Devant une telle destruction, nous dessinâmes malgré tout et nous reprîmes après notre voyage. » Son dessin constitue la seule représentation connue de cet édifice. Il est complété par quelques précisions historiques et notamment la mention d’un rapport de visite en 1784 : « l’église a huit cannes de long et deux et demi de large, elle est bâtie de pierres ; l’autel est derrière la sacristie ». Vendue comme bien national à la Révolution, elle est achetée le 18 décembre 1792, pour la somme de 1225 francs, par le sieur Fatin « tant pour lui que pour les habitants du village du Temple de Planquetorte ». L’emprise de l’édifice est encore indiquée sur le plan cadastral de 1833. Puis en novembre 1889, les co-propriétaires décident de démolir les vestiges de la chapelle, de niveler la place et d’y élever un monument commémoratif. C’est cette croix qui se trouve à l’emplacement de la chapelle de Planquetorte et qui évoque encore le souvenir de cet édifice.
Àl’ouest de Vensac est Artigue-Extremeyre (du latin artiga défrichement et extremus extrême, ce qui indique que ce lieu était tout au bord de la forêt). Un prieuré y fut établi, comme le démontre un contrat du 11 novembre 1354, qui fut passé « au loc d’Artigua-Extremeyra, en layra devant la porta du Priorat de Artigua-Extremeyra. » Les gens du pays affirment qu’il est recouvert par la dune de la Canillouse (commune de Vensac). C’est aussi la position que lui attribuent les anciennes cartes.
Entre Hourtin et le pays de Buch, le tracé de la voie se confond avec l’ancien chemin de Port de By à la station de Lugo. Un petit hameau, situé à mi chemin entre les deux villages de Carcans et de Hourtin (qui n’existe pas encore), s’appelle Sainte Élène de l’Estang. Sa chapelle des pèlerins, donnée (1) en 1099 à l’abbaye Sainte-Croix de Bordeaux par le seigneur Fort de Gosselin, sert de lieu de repos et de prières aux pèlerins. « L’an 1099, Epacte 6, le 5e jour, par une charte authentique, Fort, fils de Gaussem (Guillaume) Seigneur du lieu, (de Lesparre) fait don à perpétuité à Foulques, abbé du Couvent de Sainte-Croix de Bordeaux, de l’église de Carcans et de celle de Saint-Vincent de Lacanau et de Sainte Elène de l’Etang : Sancta Elena de Stagno, avec toutes leurs dépendances. » Donc, au XIe siècle, cette église est une église paroissiale. À cette époque, le lac n’est pas fermé et toutes les terres qui bordent l’océan Atlantique sont un grand marécage. En 1609, la montée des eaux menace l’église ; le 18 mars 1611, le cardinal François d’Escoubleau de Sourdis, archevêque de Bordeaux, en visite à Sainte Elène de l’Estang, ordonne aux paroissiens de chercher un autre lieu de prière ; il indique qu’un des quatre autels de la chapelle est dédié à Saint-Jacques, « dont l’image est vénérée par les passants ». Il est alors décidé de déplacer l’église et son cimetière. Il faudra 17 ans pour trouver un endroit pour reconstruire une église car tous les habitants des environs la veulent dans leur hameau (à Hostein ou Hortin, au Caillava, à Cartignac, à Carcans…) En 1628, le prieuré de Carcans réclamant trop d’impôts, le duc d’Épernon, seigneur de Lesparre, décide de la construire à l’emplacement de la bergerie d’un gardien de moutons appelé Jean Hortin (c’est peut-être l’origine du nom d’Hourtin). Délaissée, l’église de Sainte Elène de l’Estang disparaît en 1725 ; selon un plan cadastral ancien, elle est située au lieu-dit la Capère. Les fouilles archéologiques, menées par l’Abbé Bertruc en 1908 dans le cimetière entourant la chapelle, mettent au jour trois coquilles Saint-Jacques percées d’un trou, portées par des pèlerins enterrés là ; une autre tombe livre une boucle de ceinture ciselée comportant une suite de coquilles Saint-Jacques, qui a probablement appartenu à une pèlerine venue mourir ici.
De l’église primitive de Carcans dédiée à saint Martin, détruite vers 1850, nous ne savons que peu de choses sauf qu’elle porte le nom d’ecclesia Carcanno dans les textes et qu’elle est donnée à l’abbaye de Sainte-Croix de Bordeaux en 1099 par Fort de Gosselin. Un de ses autels était consacré à saint Jacques et une confrérie jacquaire y est attestée en 1661. L’église actuelle s’enorgueillit d’une jolie statue de saint Jacques pèlerin, en bois polychrome, du XVIIe siècle
Ainsi que l’indiquent les cartes de Cassini, de Belleyme et de Claude Masse, au village de Talaris (Lacanau), près d’un chenal donnant sur la mer, se trouvait la chapelle Sanctus Vicentius de Canali qui, en 1099, entrait dans les vastes possessions de l’abbaye de Sainte-Croix de Bordeaux. L’élévation progressive du niveau des eaux condamne la chapelle : elle est reconstruite au centre de Lacanau-ville en 1765. L’église ancienne reçut les dévotions des jacquets, dont la confrérie perpétuait encore le souvenir au XVIIe siècle. L’église nouvelle abrite une statue polychrome de saint Jacques pèlerin, datée du XVIIIe siècle.
« Trois églises à l’origine d’Hourtin et l’origine du nom », rédaction par la classe de CM1, école E.G. Tessier d’Hourtin
1648 Saint Jacques de Compostelle, par Daniel Derveaux, vrai faussaire
« 1648 » Compostelle, éditions Daniel Derveaux ou une vraie-fausse (ou fausse-vraie) carte des chemins de Saint-Jacques, publiée en 1975.
En imitant le style ancien sur le thème de Saint Jacques de Compostelle, Daniel Derveaux imagine les routes empruntées par les pèlerins avec leurs étapes et leurs sanctuaires, de Paris, puis Vézelay, Le Puy et Arles jusqu’à Santiago en Galice. Il mentionne la date de 1648 en bas de sa création pour lui donner un caractère ancien mais le tracé des chemins ne correspond pas à celui du XVIIe siècle. Cette carte est doublement fausse, par sa date et par l’information qu’elle donne car les chemins tracés ne sont pas des chemins de Saint-Jacques ni même des voies de communication médiévales.
Daniel Derveaux, né le 26 août 1914 à Paris et décédé le 14 novembre 2010 à Saint-Malo, est un artiste et éditeur d’art français. Il a produit près de 2 500 dessins, une centaine de bois et linos gravés, 40 000 épreuves d’eaux-fortes, 6 000 pierres, zinc, aluminium, 300 gravures sur cuivre, 1 000 tirages en sérigraphie, près de 10 millions d’exemplaires tirés ; des impressions publicitaires et éditions d’art par lithographies, typographie, et offset façon lithographie. Cette production lui vaut d’avoir figuré longtemps dans le Who’s who.
Après un début de carrière artistique et littéraire dans le Nord, dont il a mis en valeur le patrimoine architectural en faisant paraître plusieurs ouvrages illustrés de ses propres œuvres, gravures sur cuivre, sur bois, dessins…, démobilisé en 1941 il vient s’établir à Saint-Malo. Daniel Derveaux a été le seul artiste à avoir véritablement dessiné et gravé le vieux Saint-Malo tel qu’il était antérieurement aux bombardements d’août 1944. Ses épreuves ont d’ailleurs servi, à la reconstruction de Saint-Malo, aux attributions des dommages de guerre. Il écrit et illustre de nombreux livres sur St Malo, Rennes et la vallée de la Rance. En même temps, il crée des lithographies de portraits, costumes et sites bretons, des vues de port et de très nombreuses cartes géographiques ou historiques sur la France et toutes ses régions, sur l’Europe et le monde. Il fut également publicitaire en créant quantité d’affiches, dépliants, papiers à en-tête à l’usage de nombreuses manifestations de toute la région ouest.
Marié en 1944 à Renée Moigne, il a trois enfants. C’est en 1982 que Pierre Derveaux reprend la suite des Editions d’Art Daniel Derveaux avec de nouvelles gravures historiques, qu’il transmet en 2006 à son fils Guillaume qui établit son entreprise à Parthenay.
(1) – Appelée dans cet acte de donation Sancte Elene de Stagno.