Chronique n° 037 – Un corsaire défie la Chapelle.

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Nous avons laissé la chapelle de Notre Dame d’Arcachon à la veille de la Révolution. Elle est pillée en mars 1789, une avant-première, mais il semble bien que les pèlerinages y continuent puisque, le 25 mars 1794, malgré l’interdiction de la municipalité testerine, des fidèles de Gujan et du Teich se rendent pour prier Notre-Dame d’Arcachon, alors que le culte révolutionnaire arrive à son apogée.

Les années passent … Les marins du Bassin pétitionnent pour obtenir un chapelain dans leur église arcachonnaise, en septembre 1804. Cinq ans plus tard, comme si déjà le destin d’Arcachon faisait un signe, voilà qu’un marin tout différent – songez qu’il est Normand et peut-être même corsaire – débarque de La Joséphine, en provenance de l’île Maurice, un certain François Legallais qui s’installe à La Teste. Il s’y marie le 20 mars 1811, avec une Bougès, Marie Angélique Dehilotte Phillis. Un événement en apparence anodin dans ces temps de conquêtes napoléoniennes et qui, pourtant, scelle l’avenir d’Arcachon. Il ne sera plus, dès lors, uniquement religieux. Mais personne ne le sait encore.

Cependant, alors que des navires de la jeune Amérique font souvent escale devant Arcachon, les temps restent troublés. Par exemple, le 4 juin 1811, un combat naval oppose La Dorade, malheureusement échouée, à la frégate anglaise Médusa dont les canots l’incendient. La paix revenue, la révolution de 1830 voit le préfet de la Gironde, Casimir Boleslas de Curzay, réfugié et très fâché de l’être, au beau milieu de l’île aux Oiseaux. Tel son confrère de rang subalterne, le héros d’Alphonse Daudet, le préfet girondin, inspiré par le calme du lieu, écrit un poème à la gloire de N.D. d’Arcachon.

Et nous pénétrons au XIXe siècle, en 1836, très exactement. Au moment où Louis-Napoléon Bonaparte fait sa première tentative de soulèvement à Strasbourg. Pendant ce temps et pour 560 francs, on rafraîchit les peintures de la chapelle. Il paraît que les résultats sont “d’une grossièreté extrême qui défigure tout”. Le 22 février 1846, le conseil municipal testerin décide de consacrer 1685 francs pour orner l’extérieur de la chapelle. Jusqu’alors, ses quatre mètres de hauteur sont couronnés d’un clocher baroque où sonne une cloche bénie en 1783. Un simple auvent en bois précède la porte principale tournée vers l’ouest.

Et voilà qu’on affuble la modeste chapelle chargée d’un riche passé, d’un énorme portail toscan à fronton triangulaire, supporté par quatre colonnes aux allures vaguement Renaissance. Un témoignage non de bon goût mais de l’importance prise par la chapelle arcachonnaise et par l’idée que les Arcachonnais se font déjà de leur cité. Il est vrai que le 11 avril 1853, Arcachon compte déjà 329 habitants, devenus des sujets de Napoléon III. Désormais, les pièces de la mécanique qui fabriquera Arcachon sont en place. La preuve : huit notables testerins dont Lamarque de Plaisance et le curé Marty, demandent l’érection de la Chapelle d’Arcachon en succursale, dotée d’un prêtre permanent. C’est l’amplification des grandes manœuvres qui conduisent à l’indépendance d’Arcachon. Le décret impérial du 15 avril 1854 crée une paroisse. Elle comprend Eyrac, le Moulleau et la presqu’île du cap Ferret. Et l’on y obtient la nomination d’un prêtre. Ce sera l’abbé Mouls. Signe des nouveaux temps arcachonnais : il ne traîne pas et il organise une procession nautique le 8 août 1854, présidée par le cardinal Donnet.

En 1855, le 31 mars, le nouveau conseil de fabrique achète un terrain pour agrandir la chapelle. Le 10 novembre 1856, le projet de l’architecte Gustave Alaux est retenu. On construira une église néogothique à trois nefs pour le prix de 104 000 francs jugé, à l’époque, peu élevé. L’édifice s’élève exactement dans l’axe de la croix que l’on juge alors colossale, érigée un an avant, au bout de l’allée conduisant au Bassin, afin de remplacer une modeste croix de bois rouge dressée en 1722 sur un monticule de sable. Et le 6 juillet 1856, dans le grand apparat de trois évêques, le cardinal Donnet, pose la première pierre du monument. Quel curieux raccourci de l’Histoire, celui qui place cette église au centre du développement d’Arcachon, puisque, depuis les pas de l’exilé ermite Thomas Illyricus, il y aura eu l’arrivée de l’entreprenant abbé Mouls, le premier curé de la paroisse et l’appui constant du cardinal Donnet qui n’a pas manqué d’observer qu’Arcachon alors, reçoit 4000 habitants l’été. Autant d’âmes à protéger. Comment en est-on arrivé là ? C’est une autre histoire.

À suivre…

Jean Dubroca

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