1380 – Guillelmus Soleri – Archixon

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Guillem Soler, parfois appelé Guillelmus Soleri, Guillermo Soler et Guglielmo Soleri, est un cartographe majorquin. Des documents établissent qu’il est présent à Majorque en 1368, et qu’il est mort avant 1402. Il est l’un des rares non-juifs de l’école majorquine de cartographie. Une lettre de Jean Ier d’Aragon, écrite en 1387, peu après la mort du grand cartographe majorquin Abraham Cresques, l’identifie comme « Guillermi Solerii », citoyen de Majorque, maître fabricant d’instruments et de cartes (bruixoler[1]). Guillem Soler est sans doute le père du cartographe majorquin Joan Soler, et ascendant des cartographes Rafel Soler (actif vers 1430) et Gabriel Soler (actif vers 1460). Il est peut-être également le grand-père (par l’intermédiaire de sa fille Margarita) de Rafel Lloret (actif vers 1440).

Guillem Soler est l’auteur de deux portulans :

– l’un réalisé vers 1380, non daté, mais signé « Guilmus Soleri civis maioricaru me fecit », conservé à la Bibliothèque nationale de France (Res. Ge. B. 1131) ; il mesure 65 x 103 cm et comprend les régions représentées dans la carte nautique-type c’est-à-dire le bassin de la Méditerranée. Achetée à M. Duprat en avril 1859 pour la somme de 264 fr. 60, elle a été reproduite par Marcel dans son Recueil de Portulans (1885) et dans son « Choix de cartes et mappemondes des XIVe et XVe siècles » (1896). L’état de conservation en est bon, sauf quelques trous. Les drapeaux — qui servaient aux géographes du Moyen âge à indiquer sur les cartes les divers États — sont nombreux et soigneusement dessinés et coloriés : nous en avons compté plus de soixante. Elle comprend la carte nautique-type, plus les côtes atlantiques de Dada[2] de Dansmarch (le Jutland) à Abach, Damant, Buyetder et Cavo de Buyetder (Cap Bojador) ainsi que diverses îles dans l’Atlantique. Les légendes sont peu nombreuses mais intéressantes, telle celle de Kosseir : « a Chos en esta ciutat fan port les naus dels indians les quais venen care-gades de speciaria » (à Chos — n’oublions pas que ch se prononce k en catalan médiéval — dans cette ville atterrissent les navires des Hindous, lesquels viennent chargés d’épices »)[3].

– l’autre réalisé en 1385, daté et signé « Gujllmo soleij ciujs Maoricaru me fecit […] », conservé aux Archives d’État de Florence.

Ils couvrent tous deux l’espace habituellement représenté sur les portulans (Méditerranée, mer Noire et côte Atlantique), mais on peut y observer des différences de style.

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Le premier est typique de l’école majorquine, orientée vers la description géographique, avec de nombreuses illustrations et détails sur l’intérieur des terres (blasons, rivières, chaînes de montagnes…). Le second rappelle plutôt l’école italienne, plus orientée vers la navigation, presque exempt d’illustrations, et avec très peu de détails sur l’intérieur des terres. Le premier portulan de Guillem Soler donne probablement la première représentation des armoiries de l’Angleterre écartelées [partition d’un écu héraldique par une ligne horizontale et une verticale (un coupé et un parti)] avec celles de la France (traduisant les revendications anglaises sur le trône de France au XIVe siècle).

Un fragment d’une carte catalane récemment découvert (21 x 31 cm, représentant la Méditerranée occidentale) est peut-être également l’œuvre de Guillem Soler.

Carte marine de l’océan Atlantique Est, de la mer Méditerranée, de la mer Noire et de la mer Rouge] / Guillmus Soleri civjs maioric[arum] me fecit par Guillelmus Soleri, (13..- 1399). 

https://gallica.bnf.fr/services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&query=%28gallica%20all%20%22soleri%22%29%20and%20dc.type%20all%20%22carte%22&lang=fr&suggest=0

https://fr.wikipedia.org/wiki/Guillem_Soler

[1] – Un « sorcier » au Moyen Âge, généralement un buixoler, est un fabricant de boussoles. À cette époque, cette profession était liée à la fabrication de cartes de navigation ou de cartes portolan, mais alors qu’à Gênes, elles étaient fabriquées par différents artisans, elles étaient fabriquées dans le même atelier à Majorque.

[2] – Au ch. VI de la Pantagrueline Prognostication, Rabelais prédit les événements qui auront lieu dans la plupart des pays de l’Europe et jusqu’aux « Moscovites, Indiens, Perses et Troglodytes », « Boësmes, Juifz, Egiptiens », et même chez les « Escargotz, Sarabovytes, Cauquemarres, Canibales », mais le lecteur scandinave demande en vain ce qui va arriver dans son pays, Rabelais ne faisant pas de pronostic pour les pays situés plus loin vers le nord que l’« Angleterre, Escosse, les Estrelins » (les villes hanséatiques). Rabelais n’ignore pourtant pas les pays Scandinaves. Dans leur conquête imaginaire du monde entier, les troupes de Picrochole « ont donné fièrement ensemble sus Lubek, Norwerge, Swedenrich, Dace* (Danemark), Gotthie, Engroneland, les Estrelins, jusques à la mer Glaciale. Ce faict, conquesierent les isles Orchades et subjuguèrent Escosse, Angleterre et Irlande. De là, navigans par la mer Sabuleuse (la Baltique) et par les Sarmates, ont vaincu et dominé Prussie, Polonie, Litwanie, … ». Quand Rabelais mentionne les nations les plus « absconses, imperméables et incogneues » du Nord, il les cherche au-delà des pays Scandinaves proprement dits. Ce sont « Lappia » (la Laponie), « les mons Riphées » (situés à l’extrémité nord du monde connu, d’après les géographes depuis l’Antiquité jusque vers l’époque moderne), « les Islandoys et Engronelands ». Si les pays Scandinaves se trouvent assez loin du centre du monde rabelaisien, ils ne se trouvent donc pas non plus à la périphérie de celui-ci.

* Le nom « Dace » est emprunté au latin du moyen âge Dada, courant à côté du Danemark.

[3] – Essai sur l’histoire de la géographie de l’Espagne de l’antiquité au XVe siècle, G. de Reparaz-Ruiz, Annales du Midi, 1940, pp. 280-341. https://www.persee.fr/doc/anami_0003-4398_1940_num_52_207_5548

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Raphaël

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