Destination Grande Dune

Imprimer cet article Imprimer cet article

Destination Grande Dune
La voiture roule plein nord entre forêt et océan sur la route littorale reliant Biscarrosse-Plage à Arcachon.
Limite Landes-Gironde, le vent chaud qui souffle de l’est soulève des nuages de pollen, à tel point que derrière le pare-brise l’horizon se voile par moment d’une brume jaunâtre.
Le printemps est bien là, la température qui monte et le vent qui souffle sur la pinède en fleur libère des nuages de ce spermatozoïde végétal ; l’épisode risque durer au moins trois semaines pendant lesquelles tout deviendra jaune ; l’herbe des jardins, les feuillages vert-tendre des jeunes pousses des chênes, les genêts, les cours d’eau, les voitures, les toits des maisons, les terrasses, même l’intérieur des habitations, l’éveil des sens de pinus maritimus ne connaît pas de limites ; la seule priorité du moment, assurer la reproduction de l’espèce et là, le pin maritime ne fait pas semblant, l’amour c’est comme ça, plus rien ne compte, épandage géant dans tout le massif !
Seules les averses à venir auront raison de ces bouffées amoureuses gargantuesques, les gouttes purificatrices redonneront à la végétation ses couleurs printanières originelles. D’épaisses traînées jaune-soufre stagneront quelques temps encore dans les flaques et caniveaux, seuls stigmates de cet ardent épisode amoureux achevé.
Passé le champ de tir du Trencat, le wharf de La Salie, la pinède se fait plus clairsemée et a même disparu complètement au niveau de La Salie Sud ; Lagune, Petit Nice, Gallouneys, l’été 2022 est tellement présent, les flammes ont façonné un nouveau paysage au point qu’il est difficile de reconnaître la route, malgré les circulations régulières depuis les vingt mois écoulés… Des semi-remorque chargés à ras bord poursuivent encore l’écoulement des grumes vers le sud, pratiquement deux après.
La souffrance endurée par la forêt est perceptible, mais dès que la tête se tourne vers l’ouest, le nouveau visuel est grandiose, tout n’est que nuances et reflets, palette du blanc de l’écume des vagues qui déferlent au loin, du bleu intense de la passe sud, de la blondeur du sable des atolls d’Arguin, du vert des hauts fonds, de l’azur du ciel, l’océan se dévoile comme pour la première fois à travers les rares pins encore là, un paysage en remplace un autre…
La voiture s’immobilise sur le parking des Flots Bleus, anciennement camping de la Dune ; rejoindre discrètement la limite nord du camping, traverser le petit bout de forêt qui semble attendre l’engloutissement avec résignation.
Quelques vénérables arbres résistent encore à l’ensevelissement, on devine dans les bourrelets de l’écorce de longues cicatrices verticales qui partent de la base des troncs des plus gros pins, cicatrices des scarifications opérées par les hommes pour récupérer la précieuse résine, une page historique de l’exploitation du massif forestier au siècle dernier. Des excroissances durcies de cette oli de gemma sont accrochées en blocs à l’écorce et forment de l’ambre jaune, un concentré olfactif de la forêt.
La bête en impose du haut de ses 80 m à cet endroit, du sable et encore du sable, rien que du sable d’une pureté unique, les grains les plus fins, les plus légers, ceux qui voyagent portés par les vents marins ; ces grains insaisissables qui filent entre les doigts avec douceur et délicatesse, ces ondulations infinies aux formes voluptueuses sculptées par les caprices des vents, cette blondeur naturelle, pas de doute, pour être aussi sensuelle la dune est une femme.
Le sommet se mérite, dans une pente à vingt pour cent les pieds s’enfoncent généreusement jusqu’aux chevilles, l’attaquer frontalement relève de l’inconscience, une succession de travers semble la solution la mieux adaptée ; la paroi est mouvante, le souffle devient court et les poses plus fréquentes, les derniers mètres seront les plus terribles…
La marée est basse, l’entrée du bassin d’Arcachon s’étale à 180° du nord au sud, la sortie de la baie entre presqu’île du Ferret et dune du Pyla, puis le banc d’Arguin serpent de sable qui ondule entre les passes nord et sud, comme un atoll polynésien avec ses reflets du jaune au bleu en passant par les verts profonds et enfin au loin l’océan blanchi par l’écume des déferlantes …le souffle était déjà court suite à la grimpette, le voilà coupé maintenant par la magie de l’endroit.
Pratiquement trois kilomètres de long, une arête sommitale qui culmine autour de cent mètres à l’extrémité nord, la plus grande dune d’Europe offre certainement un des plus beaux panorama naturel ; juste à poser ses fesses dans la douceur du sable et regarder !
Le sandwich est le bienvenu, même si le jambon beurre crisse un peu sous la dent, restaurant cinq étoiles au soleil de midi.
Place à la descente, le top départ est donné dans la pente raide, les jambes veulent aller plus vite que le reste, parfois c’est l’inverse, quelques belles roulades dans le sable complice, beaucoup de cris, d’éclats de rire, le plein de sensations dans tous les cas !
TrencArt Créations
Ce champ est nécessaire.

Aimé

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *