Croquis du Bassin – Du train à l’auto

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Croquis du Bassin – Du train à l’auto

Nous poursuivons notre chasse à la nostalgie en plongeant aujourd’hui dans des guides et dictionnaires de toutes sortes qui décrivent des charmes du Bassin dont on se demande d’ailleurs s’ils valent ceux que nous lui connaissons aujourd’hui. À vous de juger

Le plus ancien et le plus complet des guides sur « Arcachon et ses environs » reste celui d’Oscar Déjean, paru en 1858. Son auteur, très laudatif d’Arcachon, a écrit un ouvrage qui reste un document historique des plus intéressants. Le guide d’Oscar Déjean commence par une évocation souvent très détaillée des treize stations ou villages qui rythment la ligne de chemin de fer venant de Bordeaux. Aperçus sur le voyage.

Au passage de Pessac, l’auteur, qui ne cache pas ses opinions, en profite pour réhabiliter la mémoire de Bertrand de Goth ; à Pierroton, on sait que la machine à vapeur se remplit d’eau ; durant la traversée du « triste désert » qui suit, Déjean rend hommage au « génie de Napoléon III » qui ordonne d’ouvrir là des routes agricoles, afin de desservir le massif forestier qui va naître. À Marcheprime, il souligne, avec parcimonie, les efforts agricoles d’Émile Pereire. Après avoir traversé Canauley où notre guide détaille tout le travail du résinier, voici Facture. Là, Déjean note bien la vocation industrielle du secteur : un haut-fourneau à Pont Neau et une verrerie, un peu avant le ruisseau de Leygat. À Lamothe, au moment de franchir « la Leyre », sur un pont de soixante-dix mètres de long, on apprend tout sur cette rivière. Au Teich, un salut au château de Ruat, le manoir des derniers captaux de Buch. À Mestras, le train embarque chaque jour des quantités considérables de poisson et à Gujan les bains de M.Daney « contribuent puissamment à la prospérité de la commune ». À La Hume, la voie dessert « le canal d’Arcachon », l’entrepôt des rizières de la plaine de Caz(e)aux et un atelier de fabrication, à partir de la résine, de térébenthines épurées, de savon et de colophane. Ensuite, la voie domine la route de plus de trois mètres, comme aujourd’hui d’ailleurs. À La Teste, Déjean ne remarque pratiquement que le chenal qui facilite les transports vers les navires caboteurs puis, destinés à la promenade des « étrangers »,  les chevaux landais,  broutant dans les prés salés.

Suit alors une longue histoire d’Arcachon et de son développement avant qu’Oscar Déjean ne relève tous les services que peut apporter la nouvelle ville, en cette année 1858. Une poste aux lettres offre deux départs et deux distributions par jour, quatorze hôtels et restaurants attendent les visiteurs  ainsi que de très nombreuses maisons meublées, six médecins, un dentiste et un pharmacien les soigneront, deux journaux locaux, antagonistes, « Le Journal d’Arcachon » et « Le Phare d’Arcachon » les informeront et l’on fumera grâce à deux débits de tabac. Vient ensuite une longue liste de la centaine de petites entreprise diverses : dix-sept artisans dans le bâtiment, vingt-neuf dans les métiers de bouche et cinq voituriers qui vous emportent partout dans la ville pour vingt-cinq centimes. À relever aussi : une pension bourgeoise, celle de Mme Lafon, au 90 du boulevard de la Plage, huit lisseuses et blanchisseuses, six marchands de poissons et quatre dépôts d’huîtres. Des chiffres et des activités qui prouvent combien important pour la création d’ mplois fut le développement d’Arcachon.

Le temps passant, le guide d’Oscar Déjean sera suivi de bien d’autres. L’un d’eux illustre l’évolution du tourisme et apparaît des plus originaux. C’est le premier guide rouge Michelin, paru en 1900 et « offert gracieusement aux chauffeurs ». On y apprend qu’il ne faut pas acheter de l’essence autrement qu’en bidon plombé, qu’il en coûte cinquante centimes par litre et que les pneumatiques à chambre à air ne se trouvent, été comme hiver, que chez Geniès, à Bordeaux. Par contre, Biarritz possède un dépôt ouvert toute l’année, un détail qui prouve la différence de notoriété entre Arcachon et la cité basque… Quant aux derniers perfectionnements techniques, d’après les “ réclames ”du guide, il faut absolument posséder un véhicule à quatre vitesses tournant dans l’huile, sans chaînes, à freins agissant directement sur les roues et avec une direction épicycloïdale, très démultipliée et irréversible, annulant les chocs sur le volant. Enfin, il faut s’équiper d’accumulateurs, d’allumage électrique indéréglable et de phares à acétylène, de marque Louis Blériot.

Évidemment, le “ Michelin 1900 ”, dès sa naissance, recommande des hôtels. Les meilleurs doivent posséder, dans l’ordre : un garage avec fosse pour les automobiles, une salle de bains, avec baignoire et des WC perfectionnés, dotés d’un appareil de chasse. On doit aussi, dans ces établissements, trouver le téléphone et un cabinet noir pour les photos. Dans Arcachon, seuls répondent à ces critères, le Grand hôtel, triplement étoilé et l’hôtel Legallais, moins chic d’une étoile. Mais on n’y paie pas le remisage. On répare l’auto en panne chez Couach et l’on trouve du carburant chez Agoust, qui vend aussi des cycles et qui en vendra d’ailleurs très longtemps. De l’essence, il y en a chez Ayol et Bellangé, deux épiciers du boulevard de la Plage.

Le guide donne encore d’utiles conseils. « Ne faites pas débarquer vos bagages avant d’avoir visité la chambre proposée ; entendez-vous personnellement avec l’hôtelier sur le prix ; méfiez-vous car il voudra d’abord vous donner sa plus mauvaise chambre et s’il vous dit alors que c’est complet, faites mine de vous en aller, il en trouvera tout de suite une meilleure ».  L’automobile, qui n’échappe d’ailleurs pas aux mêmes taxes que les voitures attelées de mulets, l’auto développe donc une nouvelle forme de tourisme. La preuve : les deux hôtels sélectionnés se trouvent au bord de l’eau, loin de la ville d’hiver. Il est vrai que l’on se méfie beaucoup des miasmes qu’elle retient. Alors que pensez-vous du tourisme d’autrefois ? La suite demain pour que votre opinion avance …

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6516667s.texteImage

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