Chronique n° 034 – Du virtuel au spirituel, de l’esprit à la matière

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Arcachon passe du virtuel au spirituel lorsqu’en 1519, avec l’aide de plusieurs fidèles, le moine franciscain Thomas Illyricus construit un petit oratoire en bois pour honorer la statuette de la vierge à l’enfant qu’il a recueillie sur la plage de Bernet. Une statuette en albâtre que l’on peut encore voir dans la chapelle des Marins jouxtant la basilique Notre Dame. Aussitôt, comme on le lit dans des chroniques de l’époque, “les gens du pays prennent la Vierge en dévotion et viennent la prier et la veiller pour guérir de leurs maux”. Et, depuis plus de 500 ans, ces prières se poursuivent, donnant à Arcachon une forte permanence historique. En 1557, apparaît l’appellation “Notre Dame d’Arcachon”.

Autre chose, plus terre à terre : en février 1582, de Thou, président à mortier du Parlement de Paris, une VIP de l’époque, est certainement notre premier touriste. Il raconte que ses hôtes, des juristes bordelais, font dresser une table pour dîner sur le rivage d’Eyrac, qu’on leur apporte des huîtres, d’un goût si agréable qu’on croit respirer la violette en les mangeant. Et si saines, “qu’un laquais en avale plus d’un cent sans se trouver incommodé”. De la Vierge à l’huître. De l’esprit à la matière. Mais que seraient l’un sans l’autre ? C’est une chance pour Arcachon que de reposer sur ces deux piliers, ici comme en d’autres lieux inspirés, imposés par l’Histoire.

Cependant, la matière l’emporte puisque l’érosion marine détruit l’oratoire de la Vierge. Il faut le reconstruire. Le cardinal de Sourdis autorise cette opération le 16 janvier 1624 et recommande que le monument soit rebâti en pierres. Mais il doit intervenir pour régler un rude conflit entre deux Testerins, Peyjehan, d’une part et Baleste, d’autre part. Finalement, François de Sourdis, en fin politique, décide que Peyjehan, propriétaire du terrain, sera le fondateur de la nouvelle chapelle tandis que Baleste sera reconnu comme l’édificateur des murailles. En 1626, le cardinal de Sourdis accorde une indulgence plénière de cent jours à qui se rendra à Arcachon en pèlerinage, le jour de l’Annonciation, le 25 mars. Une date devenue depuis celle de la fête locale et qui se perpétue. Évidemment, la décision de 1626 du cardinal attirant vers N.D. d’Arcachon de nombreux habitants du Bassin, exacerbe rivalités et convoitises cléricales.

En effet, entre 1623 et 1628, se développe une querelle d’autant plus âpre qu’elle porte, apparemment, sur les sous récupérés dans les quêtes. Pendant cinq ans, elle oppose le curé de La Teste au révérend Père Minville, gardien de la chapelle, accusé, le malotru, “de tout accaparer”. Une paix armée est trouvée et les affaires se clarifient en 1652 avec la signature d’un contrat entre les habitants de La Teste et le révérend Père Mondon qui a proposé ses services pour la chapelle N.D., dans le plus grand intérêt des Testerins. Et ce n’est qu’en 1691 que le prêtre d’Arcachon aura, enfin, le droit de quêter pour sa chapelle. Mais c’est une autre histoire.

À suivre…

Jean Dubroca

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Aimé

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