Croquis du Bassin – Pêche en eau douce.

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On fait beaucoup de bruit sur la pêche sportive en mer. Mais vous allez voir que pêcher sur le lac de Cazaux ne manque pas de charme. Embarquement immédiat avec Pierre et Paul, deux maîtres de la gaule qui ont décidé, en ce petit matin de juin, de taquiner le sandre, un beau poisson, des plus délicieux d’ailleurs, car sans arêtes et au goût très subtil. Pour en profiter, on le cuit au four, il mijote sur un lit de farce à base de fenouil et de vin blanc et arrosé d’huile d’olive. Mais on n’en est pas là !

Cinq heures du matin. Le lac brille encore sous les rondeurs argentées de la pleine lune comme dans ces paysages japonais des estampes du XVe siècle. Derrière la ligne bleue foncé des côtes landaises, le soleil rouge se lève. Ce spectacle, c’est la première récompense du pêcheur. Personne d’autres que nous sur le lac, hormis nos deux pêcheurs, chacun installé dans sa petite barque. Personne, non plus, sur les rives, neuves comme au premier matin des temps. Ancré à trois cents mètres du bord, juste dans l’axe du lit de l’ancienne rivière bouchée par les sables, Pierre attend le sandre là où il vient, après son petit-déjeuner, faire la grasse matinée dans des zones herbeuses que les courants déplacent.

Pierre et Paul pêchent au vif. Ils empalent de petits gardons sur des hameçons à trois branches et il ne leur reste plus qu’à surveiller de près les bouchons filiformes qui dansent sur le bleu-clair des vaguelettes. On attend, la patience étant la première qualité, sinon une vertu, du pêcheur. Néanmoins, le soleil étant déjà bien monté, Pierre s’étonne :

“- Comment ça se fait ? Ils ne sont pas là.”

Ce qui n’empêche pas de causer. D’évoquer des brochets de dix à vingt livres pêchés dernièrement. De protester contre les skieurs nautiques qui troublent la paix lacustre ou de rappeler les malheurs de celui qui osa pêcher ici au filet, une audace qui lui coûta deux mille euros d’amende. On parle aussi du lac, un milieu fragile s’il en est et qu’il faut protéger. Et pendant ce temps, Pierre, qui en est pourtant déjà à ses quarante-trois livres de sandres et de perches, sent venir la honteuse bredouille. Ce qui impose un changement de tactique et pousse au déplacement des canots en face de Peyroutas où les sandres doivent batifoler dans un amas de carcasses de voitures immergées là, voici belle lurette, par la Gaule Cazaline.

Le temps de repérer quelques amers un peu secrets et voilà les deux bateaux ancrés par vingt-deux mètres de fond. Huit heures : quoi qu’il arrive, il faut déguster le casse-croûte, face, au loin, à une maison basse construire en bordure d’une plage de lagon … Mais voilà que, brutalement, l’une des trois lignes de Pierre se courbe. Le flotteur anglais plonge. Mais attention : à la différence du goulu brochet qui avale tout et ne peut rien recracher, le sandre, méfiant, mordille l’appât. Il faut alors jouer avec lui à petits coups de fil et sentir le moment précis où le rusé poisson, un véritable requin d’eau douce, va déguster l’appât tout entier. Et voilà le premier sandre doré gigotant dans l’épuisette. Au jugé, il fait bien ses trois bons kilos. Et moins de cinq minutes après, voici le second, aussi long, aussi gros et tout aussi triomphalement accueilli. Avec une petite leçon de Pierre :

 -”Vous voyez bien, qu’à la pêche, il faut raisonner …”

On a bien vu … Mais les meilleures heures sont passées.

Le temps d’achever le casse-croûte, de savourer la victoire et même de méditer :

“ – C’est quand même beau d’être là, tous les trois, dans un endroit qui n’a pas changé depuis des siècles …”

Un charme, effectivement, qui fait les petits bonheurs de la vie.

Allez, à demain. Nous parlerons d’un Bassin américain.

Jean Dubroca

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Aimé

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