Saint-Pierre-ès-Liens – Fêté le 1er août

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Saint-Pierre[1] de Casaux – appelée de Casalibus dans les anciens Pouilliés du Diocèse – est une paroisse de l’Archiprêtré de Buch et Born. Sa dénomination annonce que, dans le principe, c’est un lieu abondamment fourni d’habitations, et d’ailleurs très cultivé ; car c’est ce qu’a signifié le mot Casale dans la basse latinité. On peut consulter à cet égard les Glossaires du Ducange et de Dom Carpentier. D’ailleurs, ce qui le prouve d’une manière sans réplique, ce sont les fondements de ces anciennes habitations qu’on découvre à proportion qu’on défriche quelque pièce de lande. Mais, dira-t-on, comment est-il arrivé qu’une paroisse autrefois très peuplée et très bien cultivée, ait pu devenir dans la suite un lieu presque désert ? Cela est fort aisé à comprendre, et on n’en voit malheureusement que trop d’exemples. Il faut poser pour principe qu’un lieu n’est habité et n’est cultivé qu’autant que les fonds sont productifs, et qu’on y trouve des moyens pour subsister, et qu’il le sera d’autant plus, que les ressources pour la vie animale y sont plus abondantes. C’est, sans contredit, ce qui rendait la Paroisse de Casaux très peuplée et très florissante ; mais les choses de ce bas-monde n’ont qu’un temps, et mille circonstances auxquelles on ne s’attend pas, sont capables de leur faire changer de face. La situation de cette Paroisse auprès de la mer, dont elle n’est distante que de deux lieues, lui est devenue funeste, ainsi qu’à tant d’autres lieux de ce Diocèse, qui en sont voisins. Les sables que l’Océan jette continuellement sur nos côtes, et qui s’y accumulent en dunes ou montagnes que des vents impétueux transportent çà et là, sont la cause de la ruine des lieux que ces mêmes sables avoisinent. Ne fissent-ils autre chose que se répandre sur la surface des terrains gras et fertiles, cela suffirait pour les rendre stériles et ingrats. Mais cela n’est pas tout : il y a ordinairement au pied de ces dunes des étangs, dont les canaux par lesquels ils se dégorgent dans la mer, sont interceptés par les sables[2] : les eaux de ces étangs n’ayant plus de débouché, et d’ailleurs les sables que les vents y transportent les faisant gonfler, il faut nécessairement que ces eaux, qui pendant certains hivers sont plus abondantes, s’avancent vers les terres, et qu’elles couvrent insensiblement les fonds voisins qui sont en culture. Ces fonds ne fussent-ils même couverts par les eaux que pendant l’hiver, cela seul est plus que suffisant pour les rendre marécageux et les mettre hors d’état de culture. C’est par là que des lieux autrefois très peuplés, sont devenus des espèces de déserts ; et c’est en particulier ce qui a contribué à dépeupler la Paroisse de Casaux.

On ne le dissimulera pas : tandis qu’il arrive des désolations d’un côté, l’ordre de la Providence ouvre des ressources d’un autre ; en en effet cette paroisse en eût trouvé dans la forêt de pins de la Teste, qui a cinq lieues d’étendue, et dans laquelle on exploite une quantité considérable de résine ; mais cette forêt, dans laquelle les habitants de Casaux ont un tiers en propriété, à ce qu’on prétend, ayant été incendiée en 1716, et les habitants de Casaux n’ayant point été en état de la rétablir, en sorte que, quoiqu’ils aient droit d’y prendre leur bois de chauffage, néanmoins le seul avantage qui leur reste, est de s’occuper, au profit d’un tiers, de l’exploitation des résines dans la partie de cette forêt, dépendante de leur paroisse, dans laquelle il y a environ quarante familles de résiniers ; à l’égard du restant des habitants de la Paroisse où il n’y a que quinze feux, qui sont composés de cent personnes, en y comprenant les enfants, leur principale occupation est de charrier à la Teste la résine et les autres denrées qu’on exploite dans cette forêt. On comprend aisément que la culture y est fort négligée ; aussi les habitants n’y recueillent pas suffisamment de grains pour leur subsistance pendant la moitié de l’année. De là il s’ensuit que le Curé, réduit à subsister du seul produit de la dîme, ne s’en trouve pas mieux. Son revenu n’est pas, à beaucoup près (ou, de loin !), suffisant pour s’y soutenir, s’il n’a d’ailleurs quelle qu’autre ressource. Aussi est-il arrivé que cette paroisse est souvent vacante et abandonnée ; à ce qu’on prétend, c’est cet état d’abandon qui a été cause de cette Cure, qu’on dit avoir été régulière dans son origine, ayant été demandée en Cour de Rome comme vacante, est conférée depuis longtemps à des prêtres séculiers par les Archevêques de Bordeaux.

Les Mémoires qu’on a fournis sur cette Paroisse, quoique d’ailleurs très bien détaillés, n’administrent point la preuve de l’ancien état de ce bénéfice. Ce qui est certain, d’après les anciens pouilliés du Diocèse, c’est que cette Cure dépendait du Prieuré de Bardanac[3] (Pessac), uni autrefois au Collège des Jésuites de Bordeaux, de 1633 à 1655, date à laquelle Cazaux est de nouveau réunie à La Teste.

L’église est petite étant un ancien prieuré de bénédictins bâtie en 1140… L’ancienne église, selon l’ancienne tradition, a été enfoncée dans l’étang par son débordement qu’il allait du côté de la terre sans qu’il en paraisse aucun vestige. Son isolement était propice au travail de la légende. D’abord, l’église au fond de l’étang ; le son des cloches monte de temps à autre à la surface des eaux, ajoutent les habitants. Seulement, pour le simple passant, il se trouve que l’une des deux cloches de l’église, porte qu’elle fut fondue l’an 1546 pour Saint-Pierre-de-Cazaux. Elle ne fut pas plus engloutie que l’église, à moins qu’on puisse présenter un texte sur un temple disparu. On ne le trouvera pas.

On prétend que depuis cette époque le service paroissial a été fait dans l’église du Prieuré, qui appartenait à l’Ordre de Saint-Benoît. On n’assure rien à cet égard ; on observe simplement que l’église actuelle de Casaux est petite ; et néanmoins les églises qui appartenaient à cet Ordre, soit dans les Landes, soit dans le Médoc, étaient de grandes et belles églises, telles que sont, entre autres, les églises de Soulac et de Memisan, qui feraient honneur à de grandes villes.

En 1626, la visite de l’église de Cazaux porte dans le procès-verbal dont elle fait l’objet : « Nous sommes transporté en l’église paroissiale de St Pierre de Cazaux, en laquelle n’avons trouvé aucun prêtre qui fasse le divin service, et nous ont représenté, les habitants dudit lieu, n’y avoir eu messe en ladite église depuis trois semaines et que le vicaire ne faisait sa résidence audit lieu. Quant au dedans de ladite église, l’avons trouvée mal ornée, les vitres cassées… mal propre ». Le défaut de présence du vicaire est ici constaté. En même temps, dans ses devoirs sacerdotaux peu chargés, il lui était interdit de faire du zèle. En effet, en 1622, le vicaire de Cazaux est cité devant l’autorité ecclésiastique en raison de ce qu’il administrait les sacrements, à Pâques, à d’autres que ses paroissiens.

En 1695, lors de la visite de l’église de Cazaux, le curé Friguet, de la paroisse de Saint-Siméon de Bordeaux, commissaire délégué par l’archevêque note : « Et advenant le 29 mai (1695»), nous commissaire susd., accompagné dud. sieur curé greffier, nous serions transporté dans l’esglize de St Pierre de Cazaux, où estans entré… aurions trouvé lad. esglize en désordre. Et il nous auroit été représenté un procès-verbal de visite de lad. esglize faicte en l’an mil six cent septante un par Monseigneur de Béthune, lequel n’auroit été exécuté en aucun chef à raison du petit nombre des parroissiens et de leur pauvreté extrême, ne sachant quy deuroit contribuer aux frais desd. réparations ou s’il ne seroit pas plus à propos de desmolir entièrement lad. esglize. Et estant allé aud. Cazaux a dessain de célébrer la sainte messe, il ne se seroit pas trouvé de vin pour le sacriffice de la messe dans toute la paroisse. » Si les habitants de Cazaux, au dire du curé Friguet, délégué de l’archevêque, étaient privés de vin, il faut convenir qu’à l’occasion ils avaient l’eau chaude, ou même bouillante. En 1638, l’officialité frappa d’excommunication trois habitants de Cazaux, coupables d’avoir « porté leurs mains violentes » sur leur curé. En 1747, il y eut à Cazaux des troubles apportés au service divin par les résiniers de la forêt reconstituée.

L’endroit restant sans importance, un prêtre n’y pouvait pas vivre. La vacance, en 1730, marquée comme « bénéfice abandonné » a été bizarrement attribuée dans ses causes « aux sables jetés dans les terres ». Le curé, M. de Brissac, en 1778, précise qu’à part l’étang il y avait des forêts à l’ouest et la lande à l’est. Pas de sables mobiles, dès lors, et l’abandon signalé en 1730 eut pour cause l’incendie de 1716.

En 1817 : 1° Le nombre des feux de cette paroisse consiste en ces quarante établissements ou familles dispersées dans la partie de la forêt de la Teste, qui est du territoire de Casaux, auxquelles le Curé administre les secours spirituels. 2° En trois maisons voisines du Presbytère. 3° En cinq autres situées au quartier de Lestollerie, et enfin en sept autres maisons dispersées dans l’étendue de la Paroisse et dont la plus éloignée est à une lieue de distance de l’église.

Indépendamment de cette partie du territoire de la Paroisse qui s’étend sur la montagne ou forêt de la Teste, il y a encore dans la même paroisse une très vaste plaine, mais presque toute en lande, qui sert néanmoins à la nourriture du bétail : cette lande est bordée par un étang qui a sept lieues de long sur trois de largeur en certains endroits, mais qui se rétrécit en d’autres, au point de n’avoir qu’un quart de lieue. Cet étang néanmoins n’est pas en entier situé dans cette paroisse : il borde également celle de Sanguinet et de Biscarrosse : c’est par sa partie septentrionale qu’il s’avance dans celle de Casaux. Cette Paroisse est bornée, vers le levant et le nord, par celles du Teich et de Gujan ; vers le sud-est, par celle de Sanguinet ; vers le midi par cette partie du Bassin qui est dans l’alignement de la Paroisse de Sanguinet, et encore du même côté, par celle de Biscarrosse, qui s’étend jusqu’à une dune appelée le Trincat ; vers le couchant, par la forêt ou montagne de Buch, et vers le nord par la Paroisse de la Teste, au lieu appelé Corneaux, où il y a un morne ou petite montagne, et des croix qui font séparation de ces deux Paroisses.

Casaux, est placé à la distance de douze lieues de Bordeaux et deux de la Teste, de Gujan et de Sanguinet : le terrain de cette Paroisse est sablonneux et marécageux ; elle peut avoir huit lieues de circuit ; une maison située au Pujau Brostut, est la plus éloignée, étant à une lieue de distance de l’église. On peut faire parvenir les lettres à Casaux par la Teste, où il y a un bureau aux lettres. On remarque dans le territoire de cette Paroisse, une voie Romaine, par laquelle on peut aller de Casaux à la Teste : c’est celle qui conduisait, suivant l’Itinéraire d’Antonin, d’Aquis Tarbellicis à Boïos. Le port où l’on embarque des denrées, est celui de la Teste.

Cette Paroisse dépend du Captalat de Buch, et est placée dans la Juridiction de la Teste, dont M. de Ruat est le Seigneur Haut-Justicier, ainsi  que le Seigneur foncier et direct.

Il y a dans cette partie de la forêt des pins, placée dans Casaux, quarante fours à résine, douze servant à faire de la gemme, du goudron et du bré sec, qui tous appartiennent à des gens étrangers à la Paroisse de Casaux.

Extrait du livre sixième des Variété Bordeloises par l’Abbé Baurein[4].

En 1847, l’église de Cazaux est érigée en succursale ; l’église se trouve à côté du cimetière, dans la parcelle de « La Bat du Porge » (La vallée du cimetière). Heureusement, il nous reste un dessin de Gustave Galard (1779-1841).

En 1849, l’abbé Mouls, nommé à Cazaux, trouve cette église croulante et séparée de l’agglomération par une demi-lieue. Ne voulant pas que sa paroisse vive plus longtemps dans l’abandon, il obtient l’autorisation du préfet de la transporter au centre des maisons quelque peu éparpillées.

Sous sa conduite, les cazalins démolissent l’ancienne et construisent la nouvelle avec les anciennes pierres de garluche. Les travaux commencent le 28 août 1849 et l’église est livrée au culte à la fin septembre 1850,

ayant conservé la cloche de l’ancienne église, réalisée en 1546, qui sera classée monument historique. Doit-on se souvenir que l’abbé Mouls aura bâti qua­tre églises : Notre-Dame et Saint-Ferdinand d’Arcachon, Notre-Dame de Bon Secours à Montigaud, commune de Lagorce, près de Coutras, et Saint-Pierre de Cazaux.

[1] – Saint-Pierre-ès-Liens fait référence à une dédicace, également appelée « fête des chaînes du Prince des Apôtres », établie par le pape Sixte III en 439 sur le mont Esquilin en commémoration de l’emprisonnement que le roi Hérode Agrippa fit subir, à Jérusalem, à l’apôtre Pierre en l’an 441. Cette commémoration est fêtée le 1er août dans le christianisme occidental et le 16 janvier dans l’Église orthodoxe.

Ce terme est un toponyme mais désigne essentiellement des édifices religieux nommés en mémoire de l’apôtre.

[2] – Vers 1300, les sables comblent le chenal qui relie le lac de Cazaux à la mer, et dont l’embouchure commence au lieu dit le gruc de Maubruc.

[3] – En 1572, la paroisse de Cazaux est directement rattachée au collège des Jésuites de Bordeaux.

[4] – A été vicaire de Cissac.

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Raphaël

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