Raymond Radiguet à Piquey
Né à Saint-Maur-des-Fossés le 18 juin 1903, mort le 12 décembre à Paris, à 20 ans, pour être inhumé le 14 au cimetière du Père Lachaise, cent ans déjà : il se prénommait Raymond mais n’aimait rien tant qu’on l’appelle Radiguet.
Au mouvement artistique révolutionnaire « Dada » dont il fît partie à 16 ans, on le surnommait « Radigo ». Parfois : « Le nouveau Rimbaud. En effet Aragon trouvait ses poèmes admirables.
L’enfant à la canne et au monocle, style Dada, a un charme fou, comme Rimbaud. Et une culture dévastatrice.
Fils du caricaturiste de presse Maurice Radiguet, l’un des premiers en cet art à l’époque, et d’une institutrice de Saint-Maur-des-Fossés, il se présente à 16 ans, en tenue Dada au domicile très huppé des Cocteau, à Paris. Ceci n’est pas un rendez-vous intime mais un rendez-vous littéraire.
Autant que le poète Jean Cocteau, Radiguet veut rencontrer l’auteur du livret pacifiste « Parade« . Manifestation surréaliste de 1916 -en pleine guerre – à laquelle ont collaboré Picasso et Erik Satie. Pour ce faire, il est passé par André Salmon, son patron, puisque Radiguet père et fils collaborent au journal l’Intransigeant.
Salmon étant poète passe par Max Jacob, ami de Cocteau.
Au rendez-vous Cocteau tombe sous le charme ténébreux de l’enfant tellement adulte. Ce pourrait être le début d’une romance mais l’orientation sexuelle de Radiguet ne le permet pas. Celui-ci met par écrit les règles du jeu:
-« Ne comptes pas faire avec moi ce que tu fais avec le menu fretin qui t’entoure « .
Ceci n’est pas fermeture mais ouverture à autre rapport. Un vrai rapport amical.
Nous le vérifions en particulier après que Radiguet a connu le succès avec son premier roman : »Le Diable au corps « , écrit en grande partie à Piquey. Il saura ne pas être ingrat avec Cocteau, lui devant une partie de sa prompte réussite, notamment le havre de paix du Piquey, à « quelques heures de Paris par le train« , où il put écrire paisiblement ses romans
Le premier à m’entretenir de « La période Piquey » fut le journaliste écrivain Jacques Rigaud, au début des années 2000, dans sa villa du Pyla.
« Il y a bien eu une période culturelle avec un tel palmarès en tous Arts », me disait-il.
Plusieurs artistes sont d’ailleurs concernés.
Pour Radiguet, son doublon littéraire est incroyable. Il est exceptionnel d’écrire deux chefs d’œuvre consécutifs, en un temps si restreint.
Pour le succès des œuvres, précisons que Bernard Grasset, utilisant les techniques du marketing américain lança deux « best-sellers ».
Éditant, à grand renfort de publicité « Le Diable au corps« , au parfum de scandale, au printemps 1923, puis, en juillet 1924, » Le Bal du comte d’Orgel« .
On ne crée pas n’importe où. Il est des lieux créatifs, d’autres toxiques. On peut fréquenter ces derniers, comme Radiguet l’a fait, mais c’est dans un lieu protégé que l’on met au net le butin des expériences.
Suffisamment d’artistes ont séjourné à l’hôtel Chantecler du grand Piquey pour avancer que ces lieux étaient chargés artistiquement.
D’abord par le peintre André Lhote.
Ce Bordelais, passé par l’école des Beaux-Arts, a adopté la manière cubiste quand il est mobilisé aux armées en 1914.Victime d’une lésion oculaire, à la rétine, gravissime pour un peintre, il est réformé début 1915.
S’empresse-t-il, la vue recouvrée, de rejoindre avec sa femme Marguerite la presqu’île encore sauvage du Cap Ferret ?
On peut le penser. A preuve, cette petite aquarelle de 2015, »Le cabanon« , passée récemment aux enchères publiques.
Ce cabanon de planches ressemble à la « chaumière indienne » des Lhote au petit Piquey. Ainsi, appelaient- ils leur gîte regrettant qu’il soit trop petit pour loger leurs amis.
Il semble qu’André et Marguerite Lhote ayant leurs habitudes au Café Landais proche de la jetée du grand Piquey, aient à l’époque un accord avec son propriétaire, Jean Brice, pour loger leurs amis.
Parmi ceux-ci Jean Cocteau (1889-1963) et le sculpteur cubiste Jacques Lipchitz (1891-1973).
Le premier est invité l’été 1917 afin qu’il se remette de l’enfer vécu au front « où les rues de Verdun étaient rouges de sang« .
Cocteau arrive à la pension Brice le 17 août. Il sera dorloté par Marguerite Lhote mais aussi par la logeuse madame Brice, lui laissant utiliser la maison de planches à sa guise.
Jean Cocteau décrit pour sa mère la pension en planches sans eau courante, ni électricité :
« L’hôtel Brice a sept chambres, quatre derrière sur les pins, trois devant, dont la mienne, avec sa galerie sur les mimosas et qui abrite toute une famille d’hirondelles. Chambre en planches, cabine de frégate. »
Cette cabine, située au rez-de-chaussée, est peut être une huitième chambre.
Cocteau dort, lit et pêche.
Fait, nu, de longues promenades au bord de l’océan.
Ramasse des bois flottés qu’il achève de sculpter.
Dessine, imagine, pendant que Lhote peint des pins rectilignes sous le soleil. Lignes cubistes ouvertes sur la lumière.
Le peintre vérifie que sur les rives du bassin d’Arcachon les tons sont fondus et légèrement argentés. Fort différents de la palette contrastée des cieux méditerranéens.
André Lhote est pacifiste. Cocteau l’est encore plus après son engagement volontaire comme ambulancier.
Entre eux, ils parlent le même langage : ce sont des démocrates évolutionnistes refusant les dictats et la violence.
Selon Lhote le modernisme ne doit pas être rupture mais évolution.
Cocteau pense la même chose en littérature, et en autres disciplines artistiques qu’il pratique. Telles, les arts plastiques et la musique dont il ne peut se passer, silence inclus.
Renforçant la pluridisciplinarité artistique, le sculpteur Jacques Lipchitz que Radiguet eût comme camarade de classe de dessin à Montparnasse, semble avoir séjourné avant 1920 à Piquey. Il pourrait être venu plus tôt ayant signé en 1915 un contrat d’exclusivité auprès de la galerie d’art parisienne, « L’Effort Moderne« , de Léonce Rosenberg, le galeriste notamment de Picasso.
Selon Cocteau le sculpteur tiendrait atelier à Ciel ouvert dans la partie arrière du terrain de la pension Brice.
Il est au travail l’été 1920 lors de l’arrivée de Jean Cocteau et Raymond Radiguet.
Selon nos sources, c’est lui qui intervient auprès de madame Dourthe ayant succédé à sa sœur madame Brice dans la direction de la pension pour cause d’incompétence de la première.
Ainsi, madame Dourthe ne se sent-elle pas engagée par l’accord tacite conclu jadis avec les Lhote.
Pour un peu, Cocteau et Radiguet seraient repartis, faute de place pour Radiguet.
L’été 1920, il fait en France une chaleur accablante. Des pics de température dépassant les 40 degrés.
Il fait un peu moins chaud à Piquey, surtout le soir. Ainsi, la pension est pleine. D’ailleurs l’hôtelière attend, rien que cela, le Consul général de France à Shanghai et sa famille.
Auguste Wilden et les siens doivent d’être mentionnés car ils contribuent, lui érudit éclairé, d’avoir offert conseil. Sa famille d’avoir transformé la pension en logis habitable, très « out of Africa ». L’atmosphère évoque en effet ce film aux décors admirables. A l’intimité précurseur des actuelles tendances.
Se remettant au travail, Lipchitz s’empresse de créer un superbe buste de Radiguet en terre cuite sombre, puis il traite les commandes, notamment des pièces à créer pour Coco Chanel, dont des chenets de cheminée qui seront exécutés à Chantecler dans son atelier extérieur.
L’été 1920, madame Dourthe finit par accepter de loger Radiguet dans la cabine du rez-de-chaussée.
Celui-ci est mineur mais ne le paraît pas.
Il se vieillit d’un an, sans vergogne, ravi de pouvoir quitter plus facilement la pension de planches depuis sa petite chambre cabine servant d’ordinaire de placard.
Radiguet s’est senti tout de suite à l’aise dans le futur hôtel Chantecler.
Officiellement, la pension Brice ne sera rebaptisée Chantecler que l’été suivant mais déjà Jean Cocteau pense à l’appeler ainsi en hommage à Edmond Rostand qu’il admire.
Que l’on n’imagine pas un mineur timide avec Radiguet. Certes, il peut l’être mais ces derniers mois le jeune auteur journaliste fut particulièrement déniaisé par sa maîtresse Béatrice Hastings.
On prête à Cocteau d’avoir initié Radiguet à alcool et aux drogues. Ce qu’il ne ferait lui-même qu’après la mort tragique de Radiguet. Il ne semble pas que ce soit exact.
Comme le sait parfaitement Jacques Lipchitz, ami du peintre Modigliani, Radiguet, déjà lié à Modigliani, ami de son père, rencontra celle qui se faisait appeler Lady Hastings dans l’atelier montmartrois du peintre. Elle était sa maîtresse et son modèle, très affranchie.
Sa réputation au regard de l’alcool et la drogue étant détestable, le caricaturiste Maurice Radiguet accepta bien volontiers la proposition de Cocteau de sortir son fils Raymond de son emprise.
Quant à Cocteau, ayant déjà accepté les limites tracées par Radiguet fils, il les confirma à son père.
Il n’empêche qu’il y a parfois quelque chose de trouble dans l’attitude de Radiguet. Une sorte de jeu de séduction. Si je fais partie des biographes s’accordant à penser qu’il ne s’est rien passé de charnel entre les deux auteurs, il vient tout de même à l’idée, qu’après l’héritage Rimbaud, Radiguet pourrait anticiper Pasolini dans son film « Théorème » où le héros séduit tout azimut.
Toute comparaison ayant ses limites, Radiguet semble n’avoir eu à Piquey qu’une liaison éphémère avec une ostréicultrice. Il accepte de passer « des vacances studieuses sans virées nocturnes, impossibles d’ailleurs sur les rives sages du bassin d’Arcachon ».
Radiguet en profite pour mettre au net poésie et travaux de moindre importance.
Si Cocteau pense que leurs travaux de collaboration ponctuelle, tels piécettes et opéras bouffe, peuvent les mener à la gloire, Radiguet semble plus sceptique.
Même pour « Paul et Virginie » ce sera une impasse.
Seul le spectacle ballet « Les Mariés de la Tour Eiffel » sera joué avenue Montaigne, au théâtre des Champs Elysées, le 18 juin 1921, jour de l’anniversaire de Radiguet-ses 18ans. Officiellement, le livret est signé Cocteau mais il semble que Radiguet et Auric y aient mis la main.
Mais l’essentiel n’est pas là:
L’été 1920, les deux compères pensent surtout à rénover l’art d’écrire un roman.
Lhote croit en peinture à une harmonieuse évolution plus qu’à la brutalité des ruptures au regard de l’art classique, Radiguet partage ce point de vue en littérature.
Dans la revue « Le Coq » créée avec Cocteau, il dénonce les dictats de ses anciens amis Dada, en cours de devenir surréalistes.
Le jeune Radiguet pense contrairement à André Breton, fondateur du mouvement surréaliste, que le roman n’est pas fini car il reste un vecteur susceptible d’être révolutionnaire.
Ainsi « Les liaisons dangereuses » de Laclos, « La princesse de Clèves« , de madame de Lafayette, « les Misérables » d’Hugo ou « Le Rouge et le Noir » de Stendhal furent éminemment révolutionnaires à leur époque.
Cocteau pense ainsi, depuis longtemps.
Il écrit à Piquey « Le Secret Professionnel » où il communique, entre autres réflexions, ses recettes rédactionnelles.
A l’instar, Radiguet écrit un essai intitulé « Règle du jeu » et collaborera à l’essai « Art poétique » du poète Max Jacob.
Certes, il y a déjà des notes pour un roman mais ce sera pour l’été prochain.
L’été 1921, Cocteau arrive seul à Piquey début juillet pour être rejoint à la fin du mois par Radiguet qui apprécie dans l’entrée de l’hôtel les panneaux de Lhote représentant un Coq, tel celui de la revue qu’il dirige avec Cocteau.
Presque aussitôt, le jeune auteur se met au travail
Le 20 août, 120 pages du « Diable au corps » sont au net », pour user de cette expression qu’il a peut-être transmise à Cocteau car c’est un terme journalistique.
Le mentor, assumant sa mission, veille à ce que l’acteur ami Bertin et sa compagne la concertiste Marcelle Meyer spécialiste de Debussy, Ravel et Satie, ne s’attardent pas à Chantecler.
Radiguet doit travailler à son roman.
En revanche, on attend le musicien Georges Auric qui réclamera un piano. Ce qui sera obtenu l’été 23.
Fébrilement attendu l’est aussi le prince Firouz, ministre des Affaires Etrangères du shah de Perse.
Hors l’honneur de la visite, notons que le Prince, futur écrivain, donne cet été un bal masqué à Piquey auquel sont invités notamment les Beaumont, venus du Pyla, soit la côte d’en face, au regard de Piquey.
Tout à son premier roman, en partie autobiographique, Radiguet aurait-il déjà vue sur son second roman?
Deux ans avant l’écriture du « Bal du comte d’Orgel« , il y a déjà à Piquey les principaux personnages, le comte et la comtesse de Beaumont, dit d’Orgel dans le roman, et le prince Firouz.
C’est lui qui raccompagne Radiguet chez ses parents à Saint Maur.
Précisons qu’ils ne sont pas seuls mais agréablement accompagnés par deux belles jeunes femmes.
Quant à Cocteau, le prince lui offre un sleeping dans le train de nuit Bordeaux-Paris.
Un succès foudroyant attend Radiguet à Paris avec la sortie du « Diable au corps« . Ce sera en mars 1923. Une reconnaissance absolue.
Restant amicalement très proche de Cocteau, Radiguet s’évade. Se fait de nouveaux amis, pas des moindres, puisqu’il s’agit de Joseph Kessel, « le lion » et du génial sculpteur Brancusi, avec lequel il renforce les liens.
Avec ce dernier il fait une escapade à Marseille et en Corse, en janvier 1922, après l’inauguration du « Bœuf sur le toit » à Paris.
On pourrait croire que Piquey est oublié.
Radiguet a tout loisir d’écrire où bon lui semble étant désormais indépendant au plan financier.
Cependant, il choisit Piquey pour la mise au net de son second roman, « Le bal du comte d’Orgel« .
Non seulement il choisit mais organise.
Prend soin de confirmer son arrivée, celle de Cocteau et de ses amis.
Cet été nul résident à Chantecler hors les artistes amis.
De début juillet à fin octobre ce sera le plus long séjour de Cocteau et de Radiguet à Chantecler.
L’hôtel n’ayant que 7 chambres plus la cabine du rez-de-chaussée, les amis se succèdent.
Vient d’abord début juillet pour repartir quelques jours après, une charmante fille d’éditeur un peu paumée : Bolette Natanson.
Suivent les Hugo. Jean arrière-petit-fils de Victor est artiste peintre, créateur de décors ou de petits sujets, presque des miniatures. Sa femme, Valentine Gross est également peintre. De tous les artistes présents, elle est la seule qu’André Breton fera figurer au panthéon des artistes surréalistes.
Jean Cocteau fût le témoin de mariage des Hugo, le 9 août 1919, en compagnie du musicien Erik Satie. Il n’est pas près d’oublier la date car il ne pût être de la soirée jazz que Beaumont organisa à Piquey en 1919, d’où son intérêt pour le bal masqué à Chantecler, l’été 1921.
Deux ans plus tard, le succès venu pour Radiguet, Valentine n’aurait raté pour rien au monde cet été 1923. N’a-t-elle encouragé Radiguet à tenter, selon ses termes, « le grand chelem ».
Elle lira au fur et à mesure les chapitres du Bal.
C’est le musicien Georges Auric qui donne le tempo. Après Cocteau, oubliant un instant avoir lui-même écrit un roman nouveau style, « Thomas l’imposteur« , pour se consacrer aux deux romans de Radiguet, Georges Auric oublie avoir composé « Alphabet« , joué salle Pleyel, pour devenir dactylographe.
Muni d’une machine à écrire Remington il tape, demi-nu, le manuscrit. Riant aux éclats quand il croit reconnaître une connaissance.
Là on peut voir un musicien décontracté, exigeant au final un piano. Ponctuant les mots de note de solfège. Envisageant aussi que les Gymnopédies de Satie conviennent à l’atmosphère Chantecler, une musique éthérée mais narrative.
Jacques Rigaud est fondé à parler de la période Piquey. Georges Auric écrira en effet :« j’étais là » portant témoignage, mais aussi reconnaissance. Ce musicien classique, membre du groupe des six dont le porte-parole est Jean Cocteau serait-il allé jusqu’à écrire, entre autres, la musique du film « La grande Vadrouille » dont les acteurs sont Bourvil et Louis de Funès s’il n’avait connu la période Piquey ?
Acceptés par Radiguet, il y a aussi un couple d’amis artistes, l’érudit François de Gouy qui sera portraituré par Picasso. Et Russell Greeley, peintre de nationalité américaine.
D’autres seraient bien venus mais cette fois c’est Radiguet qui trie. Tant il veut terminer le Bal.
Jusqu’où le conduira ce bal existentiel?
Quittant leurs amis en septembre les Hugo ont un mauvais pressentiment.
Jean Hugo en fait part dans « Avant d’oublier« . Le livre sera publié par l’éditeur Fayard, comme le « j’étais là » de Georges Auric. Est-ce parce que le jeune Fayard a rendu visite aux pensionnaires de Piquey ?
Les Lhote demeurant dans leur chaumière du petit Piquey sont naturellement présents. Ayant ouvert la période Piquey ils se garderaient de ne pas assister au final.
Justement, Radiguet n’arrive pas à conclure son roman.
Alors que Valentine Hugo se soigne, ayant contracté la fièvre typhoïde en buvant l’eau du puits de Chantecler, Radiguet sans en connaître la cause ne se sent pas bien.
Contrairement à ce qui est souvent écrit, il semble bien qu’il ait contracté ce mal à Piquey et non en se baignant dans la Seine. Ce qui serait absurde car il ne se baignait que dans la Marne.
Rentré fin octobre à Paris, il néglige de se soigner, d’autant que le médecin dépêché par Cocteau fait un mauvais diagnostic, jusqu’à ce que les amis prévenus par les Hugo, depuis leur mas de Fourques, s’en mêlent. Coco Chanel en tête.
Trop tard hélas. Ce qui est d’autant plus cruel que Radiguet vient de retrouver Bronia Perlmutter rencontrée en février 1923. Elle épousera le cinéaste René Clair, et finira par tout dire en fin d’existence. Nous faisant découvrir un Radiguet différent, ayant enfin trouvé l’amour réciproque. Loin des caricatures souvent présentées.
Comme il est difficile de conclure cet exposé. Au diapason de la difficulté que Radiguet rencontra pour achever son Bal, si finement ciselé.
Certains affirment que c’est Joseph Kessel qui trouva la conclusion du « Bal du comte d’Orgel« , après la mort de Radiguet.
Cependant, le style du final. Ce, « maintenant dormez« , asséné à la Comtesse aux sens troublés, est plutôt du registre de Cocteau.
Sauf à ce que soit bien du Radiguet, imitant le style emphatique de son mentor, notre hypothèse.
Avec le décès tragique de Radiguet, la période Piquey se clôt.
Jean Cocteau qui a mis 5 ans pour se remettre, publie en 1929 chez Bernard Grasset « Les Enfants Terribles« . Ce roman d’une toute autre veine que « Thomas l’imposteur« , sa suite au théâtre avec les « Parents Terribles« , autant que la qualité de sa poésie, lui ouvre les portes de l’Académie française en 1955.
N’y a-t-il pas un peu de Radiguet dans cette progression ?
N’y a-t-il pas pour nous aussi, un peu de Radiguet dans notre attachement envers le bassin d’Arcachon, tant ses romans écrits à Chantecler, ses manières sincères et décontractées, résonnent toujours en nos mémoires.
Denis Blanchard Dignac
(Conférence prononcée à Arcachon le 14 décembre 2023)
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