Lège – Chasse aux retz

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« Et toutes les chasses qui dans les limites (dechs, decxs, droits) ou étendues de nos possessions se pratiquent en eaux et en terres. » La chasse en eaux est nommée la première pour ce temps où les armes à feu n’existaient pas ; elle s’exerce aux « retz » ou filets. Nous appelons encore les filets arrets avec e muet. Des quantités considérables de canards sauvages, en groupes serrés et avec bruit de bourrasque, viennent de la mer à la nuit tombante, l’hiver, et se jettent dans les lagunes et les étangs, pour ne regagner l’océan que vers le jour. Nous les appelons guits, simplement, à Arcachon, goumards au Marensin et à Mimizan. Depuis 1860, les fusils devenus nombreux chez les habitants font presque disparaître par effarouchement ce gibier d’eau. On le tire au vol au passage et le traque la nuit sur les eaux, au lieu de se contenter de l’œuvre silencieuse des « retz ». Cette chasse, mérite d’être plus détaillée.

Par baillette à fief nouveau et inféodation du 29 novembre 1628 et par acte des 12 &13 décembre suivant, le duc d’Épernon renouvelle et réglemente en faveur des habitants de Lège le droit de « chasse aux oiseaux de rivière qui se prennent et peuvent se prendre tant en lettes et monts que autres lieux et tachs. » [comme étymologie, tach (mouillez le ch) doit équivaloir à la part individuelle du tâcheron dans une entreprise en commun. Le chasseur ou tâcheron s’appelle tachey ; ici, tach désigne les bancs de sable] ; « Ce fait, iront aux lettes auxquelles aucuns desd. habitants ne tendront aucun retz sans avoir au préalable la permission et adresse du syndic. » Le texte dit : « Chasse aux oiseaux de rivière » [Arch. Gir., Dossier famille Caupos, et série E., terrier n’ 488, notaire Labezard] : il s’agit donc de gibier d’eau et de filets tendus à marée basse, à la manière qui se pratiquait encore récemment aux bords du bassin d’Arcachon, hors des dunes. Il s’agit donc pour Lège non d’une innovation, mais d’un renouvellement d’exercice de chasse empiétant sur les dunes de la Teste. [La seigneurie de Lège jouit du droit de pêche dans le bassin d’Arcachon. (Baurein, III, page 124.)]

Deux Testerins cherchèrent à faire opposition à Lège en 1628 et en 1630, marque de volonté et de ténacité dans l’usage des « lettes, monts et tachs ».

Un de mes anciens collaborateurs, homme fort sérieux, Jean Labrunette, enfant d’Arès, m’a expliqué que son grand-père, qui fut adjoint au maire de cette commune, avait exercé la chasse de nuit aux filets dans les tachs des dunes d’Arès-Lège. Les « retz » étaient tendus debout, élevés au bord le la lagune ; le tachey restait à affût à côté. Quand les canards, arrivant à l’eau ou en sortant, heurtaient le filet, le tachey lâchait la corde tendue et le gibier se trouvait pris dans un sac de mailles tombé à terre. C’est absolument en petit la chasse émouvante aux palombes qui se pratique dans les gorges des Pyrénées. Aux lagunes des dunes, la chasse coïncidait le plus souvent avec la pleine mer, moment auquel le gibier quittait le bassin pour aller barboter dans des eaux douces et moins profondes, et le chasseur rentrait ensuite avec son filet. Sur les bords du bassin d’Arcachon, au contraire, les filets, appelés maresqueyres d’après l’acte du 13 décembre 1628, restaient tendus à demeure tout l’hiver et sans que les tacheys restassent à l’affût à côté. Baurein (Variétés bordelaises, III, p. 342) décrit cette chasse, pour laquelle on utilisait les vieux filets de la pêche de haute mer, qui étaient ajustés de manière à donner deux brasses et demie environ de hauteur sur 20 à 25 brasses de longueur ; ils avaient pour supports des piquets de 5 à 6 mètres de long. Matin et soir on faisait la cueillette des canards de diverses variétés, sarcelles, oies même, pris dans le réseau de mailles.

La propriété des dunes de Gascogne, Bernard Saint-Jours, (1844-1938), 1914.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9612857q/f63.item.r=sangsue%20l%C3%A8ge#

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Raphaël

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