Corto Maltese et le Bassin d’Arcachon

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Une exposition consacrée à Corto Maltese, joliment baptisée « Escale atlantique », se tient pour quelques mois à la Maison des Douanes de nos voisins royannais.

Le lecteur numérique pointilleux me rétorquera peut-être qu’il ne voit pas là de relation avec les objectifs historico-régionalistes de notre groupe. Je lui répondrai alors que rien ne permet de l’affirmer car, bien évidemment nous ne connaissons pas tous les détails de la vie du gentilhomme de fortune dont Hugo Pratt nous conta quelques aventures… mais on peut les imaginer.

Le marin romantique ne noua-t-il pas amitié avec Gabriel D’Annunzio en 1921 ? Cela est attesté (cf. Fables de Venise) et comment croire que le poète dandy n’évoqua pas en sa compagnie les heureuses années que lui-même passa à Arcachon, à la villa Saint-Dominique, de 1910 à 1915. Quant à Corto, Hugo Pratt perd sa trace après son engagement dans les Brigades Internationales pendant la guerre civile espagnole. Mais faut-il supposer pour autant que le Maltais était alors passé ad patres ? N’avait-il pas traversé trente années meurtrières sur tous les continents sans autre dommage qu’un incurable vague à l’âme ? Du conflit russo-japonais de 1905 aux prémices de la seconde guerre mondiale, en passant par les révolutions irlandaise, brésilienne, bolchévique ou chinoise, sans compter la Grande guerre, il en était chaque fois sorti indemne, alors pourquoi aurait-il péri cette fois-ci et qu’était-il donc devenu ?

Il en est qui connaissent la fin de l’histoire car la « vraie vie (de ceux-là) est devenue celle de l’imagination, de la fantaisie et du fantastique »(1). Ils savent sans nul doute que le fils de la Nina de Gilbratar s’est embarqué à Santander le 24 août 1937 sur le Cantabria, une drague de l’administration du port, qui s’échoua deux jours plus tard sur la plage de Lacanau. Secouru par les Canaulais, comme les 500 républicains espagnols transportés par le navire, Corto Maltese ne tarda pas à rallier Arcachon en empruntant la ligne de chemin de fer des Landes de la Gironde jusqu’à Facture, puis celle de la Compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans (qui avait succédé à La compagnie du Midi en 1934). Se souvenant des description de D’Annunzio, il s’établit, et ceci jusqu’à son décès à une date incertaine, au Moulleau, annexe de la douce cité d’Arcachon « qui étend au flanc de son bassin où le varech compose ses parfums amers et vigoureux, où croissent, dans une paix bien surveillée, d’immenses peuples de mollusques, ses rangées de villas aux tuiles et aux clochers roses, aux balcons de bois ajouré, et sur laquelle le vent du sud pousse les parfums mielleux de quarante lieues de pins résineux, et la poudre légère du sable »(2).

Thierry PERREAUD

(1) Hugo Pratt, entretiens
(2) Robert Kemp, délégué de l’Académie française, D’Annunzio, écrivain français
https://fr.calameo.com/read/000279298a05eb0ebfd95…

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