Chronique n° 090 – Un empereur pour la pub

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Dès que le chemin de fer atteint Arcachon, la Compagnie du Midi comprend qu’il lui faut une activité hivernale, indispensable pour assurer la rentabilité de la ligne. C’est une des raisons de la création de la Ville d’Hiver. Mais il faut la remplir ! Les efforts en ce sens ne manquent pas. A commencer par les multiples invitations faites à Napoléon pour venir visiter la cité. Enfin, il y vient le 10 octobre 1859 et, quand le train impérial venant de Bayonne arrive à Arcachon, il pleut à verse. Le couple impérial, au milieu d’une foule compacte et ruisselante, va prier à Notre-Dame, collationne chez la maréchale de Saint-Arnaud avec le prince héritier, tandis que l’Empereur s’inquiète des sept millions de francs que coûterait un éventuel aménagement des passes du Bassin pour l’établissement d’un port de guerre.

Quatre ans après, le monarque et sa famille, venant de Labouheyre, reviennent à Arcachon, dans l’après-midi du 4 octobre 1863. Ils s’extasient, dit la presse, sur la villa et le parc d’Emile Pereire, ils admirent, lit-on, l’intelligence de conception du casino et se promènent durant une heure devant les chalets, avant de regagner Bordeaux à 5 heures 30, où le yacht « Reine Hortense » les attend. La venue de l’Empereur est évidemment un bon coup de « pub »pour Arcachon. Mais il faut noter, toute honte bue, que notre ville n’a pas su retenir la famille impériale pour de longs séjours, comme l’a réussi si bien Biarritz. Cela, malgré la bonne volonté de Deganne qui a voulu offrir son château à l’empereur. D’ailleurs, Arcachon souffre, déjà, du complexe d’infériorité face à Biarritz. Est-il aujourd’hui enfoui dans l’inconscient arcachonnais ? On peut toujours s’interroger.

Pour assurer la fréquentation de la ville d’hiver, il faut donc plutôt compter sur les activités des médecins arcachonnais. On a déjà raconté à plusieurs reprises comment, forts de leurs observations, ces médecins ont expliqué avec un zèle rare, en divers congrès nationaux ou internationaux, les vertus thérapeutiques de la cité en matière de soins pulmonaires. En même temps, les actions publicitaires se multiplient. Par exemple, le 8 octobre 1865, Émile Pereire organise le déplacement à Arcachon de tout le congrès national de médecine qui se tient à Bordeaux. Reçus sous les lambris tout neufs du casino, les médecins, éblouis, entendent expliquer l’intérêt d’une cure sous les pins. En même temps, les grands hôtels organisent leur publicité. L’hôtel Moderne met l’accent sur « Ses aménagements selon les dernières règles de l’hygiène, son mobilier aseptique, ses parquets en xylolith, ses murs ripolinés et ses larges balcons pour la cure d’air ».

La Compagnie du Midi, de son côté, développe une intense campagne d’affichage. On connaît bien ses superbes affiches, de style un peu pompier, mais chaleureuses comme un rayon de soleil. En 1880, l’une d’elles exhibe une parqueuse traditionnelle, patins aux pieds, qui au bord de la plage annonce que la ville est autant balnéaire qu’hivernale, à onze heures de Paris, tandis qu’émerge de la forêt tout ce qui peut y distraire le visiteur. En 1890, une autre affiche déclare que la « Reine du sud-Ouest » est une station hivernale où les enfants retrouvent le sourire et où l’on chasse à courre. En 1896, sur un autre placard de la Compagnie, dont les convois ne mettent plus que huit heures pour venir de Paris, une accorte baigneuse remplace la parqueuse, un enfant entasse des pâtés de sable, le casino devenu municipal scintille et met à son programme des opéras, des opérettes tandis qu’on peut jouer au golf, pédaler dans un vélodrome et même partir à l’aventure sur le lac de Caz(e)aux .

Observons-le bien : nulle part, on n’indique des soins contre une quelconque maladie. Un voile pudique est jeté sur le sujet. Mais c’est une autre histoire…

À suivre…

Jean Dubroca

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Aimé

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