Chronique n° 019 – Nos premiers touristes

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Devenue, d’après Camille Julian, « la plus pauvre et la plus misérable des cités gauloises », voilà maintenant Boïos submergée après avoir été ruinée par les invasions barbares et par l’éclatement de l’empire romain. Alors que la civilisation chrétienne prend de l’ampleur, il faut se dépêtrer des Normands, débarquant à grands hurlements de leurs drakkars. Aussi, sur les ordres du comte commandant Bordeaux pour Charlemagne, les survivants de la défunte Boïi, élèvent-ils un « castéra ». Une motte fortifiée, entourée d’une palissade de bois. On peut encore deviner l’ensemble sous son épaisse frondaison, au lieu-dit  Lamothe. Un village s’y développe. En 1443, on y tient même un marché tous les lundis et deux foires, de huit jours chacune. Mais, comme décidément, ce delta de l’Eyre est voué aux embêtements, le débit de la rivière gonfle. Tout cela à cause d’une craste que les paroissiens de La Teste ont creusée pour évacuer le trop plein du lac de Cazaux qui les inonde.

Lamothe sera donc abandonnée par ses habitants qui en ont assez de patauger, dès l’automne venu. En 1778, l’archevêque supprime cette   paroisse pauvre, faute de revenus suffisants. Lamothe ne connaîtra plus qu’une activité, réduite au bac qui, l’hiver, traverse l’Eyre. Un pont, lui aussi à péage, ne sera construit que sous Napoléon. Et Lamothe, l’héritière de Boïos ne connaîtra plus qu’un titre de gloire au XIXe siècle, lorsqu’elle servira pendant cent ans de gare de chemin de fer pour le bois descendu par l’Eyre et de bifurcation pour le chemin de fer vers Arcachon.

Cependant, Boïi eut une descendance proche et moins prosaïque. On raconte que, Charlemagne, soi-même, aurait donné au chapitre de Saint-Seurin de Bordeaux, une chapelle située près du port des Tuiles, à Biganos. Un port qui existe toujours, creusé alors par les religieux, avec l’appui, pour manier la pelle, de quelques bonnes âmes, de plus, corvéables à  merci. Un bon investissement : ce port sert au commerce du sel. Cela explique, en partie, que, vers 1110, la chapelle  devienne le centre d’un prieuré, élevé à ce rang par Louis VI le Gros. Là, cinq chanoines font office de passeurs et, à l’hôpital, reçoivent tous ceux qui ont besoin d’aide, matérielle comme spirituelle.

À commencer, au Xe  siècle, par les pèlerins, les jacquets, s’échinant sur le chemin de St Jacques de Compostelle. Un chemin, dit des Anglais. Ils débarquent à Soulac, s’arrêtent à la Confrérie de St Jacques le Majeur d’Andernos et se refont une santé à Comprian, avant d’ affronter le désert landais, selon deux voies, l’une par le val de Leyre, l’autre par le littoral. Cela explique que les seigneurs du pays de Buch aient longtemps protégé Comprian où, en 1220, s’élève une église en pierre, en forme de croix, avec quatre piliers, trois autels et tout autant de cloches. Depuis cette époque, nous savons bien traiter les touristes… Mais les pèlerins, deviennent rares. Vers 1350, le déclin de Comprian commence inexorablement. Existerait-il, dans ce delta, comme une malédiction sur la pérennité des œuvres humaines ? Heureusement, ailleurs, l’évolution de la situation est meilleure car les hommes ont en nombre migré vers l’ouest, vers la forêt de la Montagne. Une autre histoire débute, celle du Pays de Buch et du captalat auxquels est intimement liée l’histoire d’Arcachon et pour longtemps.

À suivre …

Jean Dubroca

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Aimé

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