Petite causerie vespérale consacrée à la bande dessinée et aux jurons gascons
Les HTBoïates qui n’en sont pas moins amateurs de bandes dessinées connaissent certainement le personnage de Gaston Lagaffe. Celui-ci semble indiscutablement belge, tout comme l’est son créateur André Franquin (il est né à Etterbeek, c’est dire s’il est belge).
Cependant, tout belge qu’il soit, Gaston porte des espadrilles. Toujours. Quel que soit le temps qu’il fait et celui-ci est souvent pluvieux, voire neigeux à la mauvaise saison en Belgique. Le port d’espadrilles en ces circonstances relève donc de l’exploit et exprime certainement quelque chose. Il y a un sens caché à ces espadrilles lagaffesques. Et si Gaston était gascon ? Gascon Lagaffe ?
Et que penser du rédacteur en chef du Journal Spirou, Léon Prunelle, personnage persistant avec opiniâtreté à vouloir mettre ledit Gaston au travail (sans le moindre succès) ? Il est très coléreux et jure beaucoup lorsque celle-ci se manifeste. Et quel juron emploie-t-il alors ? « Rogntudju ! » (ou Rgntdjû). Autrement dit : « Rhô (grognement) Noundidiou ! » (nom de Dieu). C’est du gascon et on peut donc en déduire que Prunelle qui jure en gascon l’est aussi. Voilà qui est épastrouillant, non ?
Car le gascon apprécie les jurons. Depuis le bon roi Henri, qui était de Navarre et jurait abondamment. Et de manière blasphématoire, ce qui est une des caractéristiques des bons jurons. On connait ici le Noundidiou déjà cité, il faut ajouter Mordious (mort Dieu), Miladiou (Mille Dieu), les classiques Boudiou (Bon Dieu), Vindiou (Vingt Dieux), sa variante Crévindiou (Sacré vingt Dieux) et bien sûr l’étonnant Diou biban (Dieu vivant), voire Gran Diou biban si on est particulièrement expansif.
Pour être complet sur le sujet, j’ajouterai qu’outre l’aspect sacrilège, le bon juron peut s’appuyer sur le sexuel ou le scatologique et sur l’éventuelle combinaison de ces différentes thématiques. C’est ainsi que « Au Noundidiou de bordèl de mèrda ! », alliant les trois, en exprimera la quintessence. Les connaisseurs auront reconnu la traduction gasconne approximative du juron prononcé par Jean-Pierre Marielle dans le film Les Galettes de Pont-Aven : « Oh nom de Dieu de bordel de merde ! » La chose nous éloigne de la Gascogne, mais cette évocation est jubilatoire.
Pour ce qui concerne les fameuses Galettes, je laisse le soin au lecteur aussi HTBoïate que numérique de rechercher la vidéo idoine sur la toile. Je ne vais pas tout faire, non plus.
Thierry PERREAUD