À la fin du VIIIe siècle, le monastère monastère de Saint-Toribio de Liébana[1] situé sur les contreforts des pics d’Europe[2] accueille le moine Beatus qui y écrivit, en 776, un commentaire de l’Apocalypse de saint Jean l’Évangéliste, illustré de miniatures ; à l’approche de l’an Mil, ces commentaires connaissent un certain succès. Des scriptoriums importants de la région du nord de l’Espagne, comme les monastères Santo Domingo de Silos, ou encore Saint-Sever en France, produisent quelques codex enluminés qui diffusent ce texte. Ces manuscrits, appelés Beatus, comptent parmi les plus beaux exemples de l’enluminure romane et parmi les manuscrits médiévaux les plus précieux : Beatus de l’Escorial, Beatus de Facundus, Beatus de Morgan, Beatus d’Osma, Beatus de Silos, Beatus de Saint-Sever, Beatus d’Urgell, etc.
Sachant que Beatus de Liébana appelé aussi San Beato (milieu du VIIIe siècle – 19 février 798 ; à ne pas confondre avec le Saint Béat français) est un moine, théologien et abbé léonais qui s’est fortement impliqué dans la lutte contre les hérésies (le Christ n’est pas le fils de Dieu mais un enfant adopté par Dieu), on comprend mieux l’importance de l’Apocalypse chez les Chrétiens du Nord-Ouest de l’Espagne.
Le manuscrit du Beatus de Saint-Sever (Paris, Bibliothèque nationale de France, Ms. lat. 8878) est une œuvre extraordinaire, qui accumule les superlatifs : c’est le plus riche, le plus innovant et le plus important de tous les manuscrits des Beatus du point de vue artistique, son texte étant le plus complet de tous les textes conservés de la première rédaction du Commentaire à l’Apocalypse de Beatus de Liébana. Il fut illustré par Stephanus Garsia et d’autres peintres, sur l’ordre de Grégoire de Montaner qui siégea de 1028 à 1072 comme abbé de l’important monastère gascon de Saint-Sever, situé sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. C’est le seul manuscrit illustré de la tradition hispanique des Beatus qui ait été produit en dehors de la péninsule ibérique.
De plus, ses illustrations rassemblent l’iconographie de la première édition des Beatus avec un modèle de la troisième rédaction picturale (la plus riche des Beatus) ; ils intègrent probablement des motifs d’une Apocalypse illustrée non-hispanique. De nombreuses copies, dont 26 sont encore conservées ou rappelées par de simples fragments dispersés à travers le monde.
Certaines copies comportent quelques images additionnelles. L’ensemble est intégré au texte de manière assez identique dans les diverses copies : ainsi, une Mappemonde est souvent insérée à la description de la mission des Apôtres dans le Prologue du Livre II.
http://patrimonioediciones.com/portfolio-item/beato-de-saint-sever/?lang=fr
voir https://books.google.fr/books?id=pW0DAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q=sever&f=false
http://www.eglises-landes.cef.fr/dossiers/beatus/beatusc.htm
[1] – La grande porte du Pardon du monastère franciscain de Saint-Toribio de Liébana, sur la côte nord de l’Espagne, ne s’ouvre que rarement : il faut que la Saint-Toribio, le 16 avril, tombe un dimanche. Commence alors une année dite sainte, douze mois au cours desquels les croyants qui franchissent son seuil voient, d’après la tradition, tous leurs péchés effacés d’un coup. Ils vont ensuite toucher, dans la chapelle attenante, ce que les autorités ecclésiastiques considèrent comme le plus long fragment connu de la « vraie croix » du Christ.
[2] – Près du monastère, les routes empruntent des gorges étroites et sinueuses creusées par le rio Deva, que l’on remonte jusqu’à sa source dans un vaste amphithéâtre. A proximité, le téléphérique de Fuente Dé permet de s’élever en quelques minutes de 840 mètres pour parvenir au Mirador del Cable, paradis de l’escalade. La vue est splendide sur les pics d’Europe, qui culminent à plus de 2 500 m, d’un côté, et, de l’autre, la mer Cantabrique, à une quarantaine de kilomètres.