Le Bassin d’Arcachon à l’heure allemande

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Petite causerie vespérale consacrée au bassin d’Arcachon à l’heure allemande et au prochain changement de repère horaire.

Il ne s’agit pas pour moi de m’intéresser à la vie arcachonnaise sous le joug de l’occupant, du Boche comme on disait alors, mais de causer de l’heure qu’on pouvait voir afficher au cadran des horloges, pendules, montres et autres chronomètres chargés de donner l’heure aux Arcachonnais de ce temps-là. Eh bien, c’était la même qu’aujourd’hui, heure d’été et d’hiver inclus (cependant à des moments de l’année différents).

Mais ce ne fut pas toujours le cas…

À la fin des années 70, mon grand-père vigneron gabache méprisait l’heure légale, celle des « Boches ». Il ne se fiait qu’à l’heure « solaire » et celle du réveil de sa jument Polka. « Ah la carne, ah la salope ! » jurait-il depuis son lit lorsque cette bête (en réalité presque sa deuxième épouse) frappait de son sabot le sol de l’écurie située juste derrière la chambre grand-parentale — car cet ongulé avait grand faim dès son réveil et celui-ci était matutinal. Les mérites de cette heure « solaire » constitue pourtant un mythe, qui trouve d’ailleurs encore des échos aujourd’hui — mon copain Dédé m’en parlait encore avec émotion dernièrement. Evidemment c’est une galéjade car l’heure solaire change chaque jour.

Et conséquemment les remarques concernant un décalage éventuel de deux heures par rapport à l’heure solaire sont des couillonnades.

En réalité mon grand-père était resté « scotché » sur l’heure légale instituée par la loi du 9 mars 1911 qui définit l’heure appliquée en France comme étant le temps moyen de Greenwich (GMT), l’heure de la perfide Albion. Il confondait l’astre solaire et la reine d’Angleterre.

Afin de comprendre les différents changements horaires que connut notre pays je propose au lecteur aussi HTBoïate que numérique de parcourir ces derniers depuis le début du siècle précédent — car auparavant c’était un peu plus régional et forcément réellement compliqué (chose n’ayant rien à voir avec le sens désormais aussi moderne qu’idiot de ce qualificatif), notamment dès qu’il s’agissait d’établir les horaires des trains.

  • Loi du 9 mars 1911 : Création de l’heure légale en France (temps moyen de Greenwich, abrégé en GMT).
  • Décret du 10 juin 1916 : L’heure légale française est avancée de soixante minutes (GMT+1).
  • Guerre de 1914-1918 : Les territoires français sont à l’heure française ou à l’heure allemande (+1h) selon qu’ils sont ou pas occupés par l’Allemagne.
  • Loi du 24 mai 1923 : Création du dispositif faisant alterner les heures d’été et d’hiver. GMT à partir du premier samedi d’octobre et GMT+1 dès le dernier samedi de mars
  • Occupation allemande à partir de mai-juin 1940 : Adoption de l’heure d’été allemande (GMT+2). Alternance des heures d’été et d’hiver (GMT+1).
  • À la Libération, dès le 8 octobre 1944 : Les zones libérées passent à l’heure d’hiver (GMT+1). Abandon de l’heure d’été.
  • Décret du 19 septembre 1975 : A la suite du choc pétrolier de 1973, l’heure d’été (GMT+2) est rétablie le 28 mars 1976.

À la vue de ces faits et alors qu’on croit souvent la chose relativement récente et l’œuvre de bureaucrates européens, on s’aperçoit que nos aïeux pestaient déjà contre le passage à l’heure d’hiver durant l’Entre-deux-guerres et ceci depuis 1923. On présume que l’abandon du dispositif (de 1945 à 1976) fut causé par la volonté d’une rupture avec les temps de l’occupation germanique. Il n’en reste pas moins qu’en été nous vivons désormais avec un décalage de deux heures par rapport à nos ancêtres du début du siècle précédent, et d’une heure de plus que les anciens de l’Entre-deux-Guerres (ou ceux d’entre nous nés avant 1976).
Le repère horaire légal institué depuis 1976 correspond effectivement à celui de l’occupation allemande. Nous avons finalement capitulé pour ce qui concerne l’heure.

Thierry PERREAUD

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Aimé

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