Pedro Reinel est un cartographe portugais du XVIe siècle et l’auteur de l’une des plus anciennes cartes marines portugaises signées.
Pedro Reinel et son fils Jorge (1518-72) comptent parmi les principaux cartographes de cette époque. Avec Diego Ribeiro, G. L. Viegas, D.J. de Castro et Lopo Diogo Homem, ils assurent la supériorité des cartes de navigation portugaises au XVIe siècle. Avec son fils Jorge Reinel et le cartographe Lopo Homem, il participe à la construction de l’Atlas Miller bien connu de 1519.
Découvert par hasard en 1960 dans des minutes notariales, le portulan dessiné en 1485, aujourd’hui conservée aux archives départementales de la Gironde, a été réalisée spécifiquement pour la navigation le long des côtes africaines, représente, avec une grande précision, les côtes atlantiques depuis les îles Britanniques jusqu’à l’embouchure du Congo, avec la Méditerranée occidentale.
Comme la carte anonyme dessinée vers 1471, la carte de Reinel est sans doute destinée à être emportée à bord, si l’on en juge d’après sa décoration sobre et ses marques d’usure.
Une partie du littoral africain, à l’est et au sud de la Côte-de-l’Or (l’actuel Ghana), est représentée à l’intérieur de la zone du Sahara et du Sahel. Cette solution ingénieuse tient probablement à l’absence de modèle adéquat couvrant toute cette partie du monde à l’époque de la réalisation de la carte. Avec la découverte de nouvelles terres au sud, les modèles utilisés par les cartographes pour la production ordinaire durent être repris à des échelles différentes, puisque la taille des peaux animales disponibles ne pouvait guère changer. La même solution est adoptée dans la carte de Jorge de Aguiar de 1492 (conservée à la Beinecke Rare Book and Manuscript Library, Université de Yale, à New Haven).
La carte de type portulan de Pedro Reinel, avec de nombreuses routes loxodromiques, également connue sous le nom de Kunstmann (Bayerische Staatsbibliothek, Munich), du nom de son collectionneur, a été dessinée par le navigateur portugais en 1504 ou 1505 ; ce portulan couvre l’Europe occidentale et une partie de l’Afrique et les territoires limitrophes, dont le Nouveau Monde et les explorations faites par Diego Cão en 1482-1485.
C’est le premier à décrire une rose des vents, avec une fleur de lys clairement dessinée, qui figure au milieu de l’océan Atlantique ; c’est la première à être orientée vers le nord, pratique qui se répand rapidement par la suite ; les roses des vents du Moyen Âge avaient parfois l’est en haut, pour indiquer que Jérusalem (à l’est de l’Europe) était supérieure à tout. Il s’agit également de la première carte connue avec une échelle de latitude ; en fait elle en comporte deux : une échelle de latitude secondaire, inscrite au large de Terre-Neuve et orientée vers le nord vrai, indique une déclinaison magnétique de 21 degrés ouest. La carte met en évidence les efforts des navigateurs portugais à reconnaître la côte est de Terre-Neuve. Le détroit de Belle-Isle au nord de Terre-Neuve et le détroit de Cabot au sud sont nettement indiqués. On y trouve de nombreux noms encore utilisés aujourd’hui : Rio de San Francisque (cap Saint-Francis), C. da Espara (cap Spear), Isla do Bacalhas (île Baccalieu). Le cap Bonavista n’est pas représenté, mais on trouve Sam Johã (Saint John, découverte par Jean Cabot), en face d’un territoire non identifié qui est certainement l’île du Cap-Breton. En utilisant l’échelle de latitude secondaire, les latitudes du cap Spear et de Sam Johã sont données avec une remarquable précision. Arcachon est nommé Arcaxam.
Sur la carte de Pedro Reinel ca. 1504, notez l’échelle de latitude secondaire, près de Terre-neuve. L’emplacement de cette région sur la carte a probablement été déterminé à l’aide d’un parcours magnétique et une distance estimée avec son origine aux Açores, c’est-à-dire sur la base de la méthode du point de fantaisie (Pf). Si la méthode du point de consigne était utilisée à la place (SP), l’échelle de latitude principale s’appliquerait également à Terre-Neuve, mais la distance des Açores aurait été largement sous-estimée.
Arcaxam
La découverte de l’Amérique a été une formidable révolution qui a révolutionné la conception du monde et a mis une exigence au tableau des conflits entre les nations : soudain, la clé de la suprématie est la capacité d’absorber, d’ordonner et d’interpréter le flot d’informations arrivant à la péninsule par les navires fragiles qui sont revenus d’Amérique.
Les monarques catholiques le comprennent vite, et c’est pourquoi ils fondent la « Casa de Contratación[1] » de Séville en 1503, ville avec accès à la mer mais à l’abri des attaques des pirates et des flottes ennemies. Et tous, pour abriter dans ses installations ce qui serait le plus grand trésor de tout l’empire en construction, d’une importance encore plus grande que les expéditions d’or, d’argent, d’épices et de marchandises diverses qui atteignent les ports espagnols : depuis 1508, le Casa responsable de la garde, de la maintenance et de la mise à jour du registre royal, la carte qui reflète le nouveau monde qui est révélé, et qui doit être préservée comme le secret le mieux gardé d’une monarchie qui brise les dispositions de la géographie connue jusque-là.
La Casa est devenue le lieu de fabrication des cartes utilisées par les navires qui traversent l’océan, et le degré de secret est tel que tous ceux qui travaillent sur quelque chose qui s’y rapporte sont pratiquement kidnappés par la Couronne afin qu’ils n’aient de contact avec personne. En fait, dans le cas où un navire doit être arraisonné par un navire ennemi, il doit d’abord lancer par-dessus bord toute carte qu’il transporte. La lutte pour le renseignement est donc un antécédent de ce qui se passera de nombreuses fois dans l’histoire, comme durant la guerre froide.
Cependant, les expéditions constantes, comme le tour du monde de Magellan-Elcano (1519-22), apportent de nouvelles informations qui forcent la correction périodique du Registre. Ainsi, des revues officielles sont commandées, comme celles de 1518 et 1526 par Hernando Colón, fils du découvreur, bien que des voix commencent à émerger affirmant que les informations contenues dans le registre ne correspondent pas à l’expérience. Le débat se termine brusquement en 1545, lorsque le roi décrète de nouveau la validité des lettres de la Chambre comme seule référence. Et il en est ainsi jusqu’à ce que, au tournant du siècle, la cartographie des cartes ait lieu en Flandre. Ce n’est qu’au XVIIIe siècle que la cartographie renaîtra en Espagne.
Mais le secret ne se limite pas seulement aux cartes, mais à tout détail de l’art de la navigation. Comme cela arrivera aux pionniers de l’air, le défi de l’océan force à plusieurs reprises à improviser et à développer des techniques et des instruments pour répondre aux nouveaux défis.
http://www.elespanol.com/cultura/20160205/99990273_0.html
& http://niunpasoatras.foroactivo.com/t10259-el-corazon-del-imperio-espanol-era-un-mapa
http://www.lecfc.fr/new/articles/216-article-6.pdf
La Rose des vents
Les marins de l’Antiquité disposaient déjà de connaissances astronomiques. Grâce à elles, ils n’étaient plus dépendants de la seule navigation côtière, mais pouvaient s’orienter la nuit grâce à la navigation astronomique. Pour cela il fallait connaître sa direction et une des techniques utilisées sera la rose des vents. Il est connu que les Phéniciens ont été les premiers à faire usage de la rose. Plus tard, elle a été utilisée dans la Grèce antique et améliorée par les marins italiens. Le principe d’utilisation d’une rose des vents consiste à trouver sa route selon la direction du vent afin de pouvoir naviguer ensuite.
Les marins grecs ont utilisé les quatre vents correspondant aux quatre points cardinaux, mais bien vite ils y ajoutent les quatre vents intermédiaires : Boreas (nord), Kaikias (nord-est), Apeliotes (est), Euros (sud-est), Notos (sud), Lips (sud-ouest), Zephuros (ouest) et Skiros (nord-ouest). Les Italiens ont appelé ces vents Tramontana (nord), Greco (nord-est), Levante (est), Scirocco (sud-est), Mezzodi (sud), Garbino, aussi appelé par la suite Africus ou Affricone (sud-ouest), Ponente (ouest) et Maestro (nord-ouest).
À la Renaissance, la rose des vents italienne est adoptée par les marins de la Méditerranée. Sur beaucoup de portulans de l’époque apparaît une rose des vents avec les initiales italiennes T, G, L, S, O, L, P et M. D’autres peuples à tradition maritime possèdent également des noms spécifiques pour les directions intermédiaires telles que le nord-est. Ainsi en breton, les huit directions s’appellent (à partir du nord, dans le sens des aiguilles d’une montre) : norzh (ou : sterenn), biz, reter, gevred, su, mervent, kornaoueg, gwalarn.
Il n’y a pas de norme absolue pour l’élaboration d’une rose des vents et ainsi chaque école de cartographes semble avoir développé sa propre norme. Sur les premières cartes le nord est indiqué par un fer de lance au-dessus de la lettre T (pour Tramontana). Ce symbole est devenu une fleur de lys, à l’époque de Christophe Colomb et a été vu sur les cartes portugaises. Toujours au XIVe siècle, le L (pour Levante) sur le côté est de la rose a été remplacé par une croix de Malte, indiquant Bethléem, c’est-à-dire l’endroit où le Christ est né.
En 1630, le navigateur et cartographe Jean Guérard de la célèbre École de cartographie de Dieppe, publie son « Traité d’hydrographie ». Il détaille dans ce manuscrit le système de représentation cartographique de la Rose des vents. En 1645, le « Traité de l’Astrolabe » reprend le système de Jean Guérard.
[1] – « Archives générales des Indes », à Séville, où l’héritage de la Casa de la Contratación est conservé aujourd’hui.